Ce Maroc qui ingénie...    Diplomatie : Rabat entre le poids de l'Occident et l'infortune des BRICS    EHTP : Un Pôle d'excellence et d'ingénierie technologique    CAN féminine 2024 : Coup de griffe décisif des Lionnes de l'Atlas    Fès, la spiritualité Tidjane au cœur du lien entre le Maroc et l'Afrique de l'Ouest    Trottinettes électriques : l'ombre des incendies de batteries lithium-ion    Arafat Najib, le gardien d'Al-Aqsa... des années de résistance face à l'exil et à l'arrestation    Renforcement du partenariat stratégique entre Moscou et Pékin : Lavrov rencontre Wang Yi à Pékin    Dubaï : Trois fugitifs recherchés par Interpol et Europol, dont El Ballouti, arrêtés et extradés vers la Belgique    Sit-in à Ouled Youssef : la réaction du CNDH    Vague de chaleur de mardi à vendredi dans plusieurs provinces du Royaume    Le Conseil national des droits de l'homme déplore les suites tragiques de l'occupation du château d'eau à Béni Mellal et les entorses au code de la presse    Prévisions météorologiques pour le lundi 14 juillet 2025    Démantèlement d'un sillage de ténèbres près d'El Jadida    Bac 2025: Casablanca Settat dépasse les 80% de réussite avec 65 894 lauréats    Jazzablanca 2025 : Clôture en apothéose aux rythmes de gnawa et d'un show explosif de Macklemore    Rissani : Lancement des travaux de sauvegarde et de valorisation du site archéologique de Sijilmassa pour 245,5 MDH    Real Madrid : Vinicius Jr provoque la colère de Florentino Perez après l'humiliation face au PSG    Fouad Akhrif explore avec les responsables jordaniens de nouveaux horizons municipaux entre Amman et Rabat    Marruecos: El Comité de Liberación de Ceuta y Melilla renace de sus cenizas    Corruption au Maroc : Un frein à l'export, mais un "coup de pouce" aux ventes locales    L'AS Roma insiste pour Nayef Aguerd, mais West Ham refuse un prêt    Le Nigeria et l'UE s'allient pour la promotion des musées et des industries créatives    Le Maroc atteint les quarts de finale de la CAN féminine en battant le Sénégal    Les cavaliers de la DGSN brillent au championnat national équestre    Trump menace d'imposer des tarifs douaniers de 30% à l'UE et au Mexique    Bitcoin: le portefeuille du Salvador dépasse 700 millions de dollars    Coopération Sud-Sud: le Maroc a fait de la solidarité et du codéveloppement un pilier de sa politique étrangère    Stagiaires.ma: Plus de 400.000 candidats inscrits et 12 millions de candidatures générées sur six mois    Maroc : Le Comité de libération de Ceuta et Melilla renait de ses cendres    Ballon d'Or 2025 : Un front africain se forme pour soutenir Hakimi    Un objet céleste mystérieux venu de l'extérieur du système solaire s'approche du Soleil à une vitesse fulgurante, suscitant la perplexité des scientifiques    Plus de 311.600 candidats scolarisés décrochent leur baccalauréat en 2025    Copa América Féminine 2025 : Le Chili démarre fort ; cette nuit le Brésil entre en lice    CAN Féminine : Jorge Vilda fier de ses joueuses après la victoire contre le Sénégal    MAGAZINE : Kouider Bennani, le cinéma quand on aime la vie    La Mauritanie dément toute réunion entre son président et Netanyahu    Polisario invité au Congrès du PP espagnol: Nizar Baraka recadre Feijóo sur la marocanité du Sahara    5G au Maroc : L'ANRT lance l'appel à concurrence pour les futurs opérateurs    Diaspo #397 : Lamiss Amya, la violoniste marocaine qui fusionne techno et racines orientales    Pastilla à l'honneur : Le Maroc décroche la 3e place au concours gastronomique de Washington    Gazoduc Africain Atlantique : Réunions à Rabat du Comité technique et du Comité de pilotage    Droits de douane: Trump revient à la charge contre l'UE, Bruxelles souhaite un accord    Rencontre sino-américaine à Kuala Lumpur : ouvre-t-elle la voie à une désescalade entre Pékin et Washington ?    Un nouveau plan d'action pour les échanges entre civilisations dévoilé lors d'un sous-forum    L'ICESCO renforce le dialogue civilisationnel lors d'une rencontre de haut niveau avec des responsables chinois    Mehdi Bensaïd lance des projets culturels et pose la première pierre du chantier de restauration de Sijilmassa    Dar Taarji dévoile AKAN, une collection singulière de boutique-hôtels de charme    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Chronique du Dr Lahna : Au CHU, la mort évitable de patients
Publié dans Yabiladi le 09 - 01 - 2018

Le rejet du système de santé marocain par tous les citoyen n'est qu'un symptôme du rejet des valeurs humaines de ceux qui le constituent et acceptent d'en faire partie, voire de le servir.
La jeune étudiante en médecine n'a pas accepté la mort d'une fillette de 13 ans par négligence, victime d'un système de santé ivre et sans repères. N'en déplaise aux fonctionnaires qui exécutent des directives de marchandisation de la santé et poussent les bons professeurs à la démission.
L'élève médecin, empli de toutes les bonnes intentions du monde, a assisté impuissante avec sa collègue à une nuit d'agonie dans le service de pédiatrie au CHU. Non pas que le cas de maladie rénale dont souffrait la petite était désespéré ou d'emblée gravissime, mais plutôt le fait d'assister, impuissantes, à la chute heure après heure de la patiente, aux complications qui se succèdent avec une indifférence de la jeune interne qui ne se déplaçait pas de sa chambre, à l'absence de l'infirmier de nuit qui dormait paisiblement et à la nonchalance des collègues d'un autre service que les jeunes étudiantes ont essayé en vain d'appeler à la rescousse. Jusqu'au constat de l'aggravation notable de l'état de santé de la fillette au matin et au transfert (trop tardif) vers la réanimation. La petite est décédée dans l'après midi.
Cette expérience macabre et inhumaine marquera à tout jamais les deux jeunes étudiantes qui sont venues me voir ce dimanche matin. Elles ont quitté le service de pédiatrie où, me disent-elles, elles n'ont rien appris. Le service subit à l'instar de toutes les autres unités des CHU, une hémorragie de professeurs qui partent s'installer dans le privé. Des huit professeurs que comptait le service, il n'en reste plus que trois. Les résidants et internes sont livrés à eux-mêmes pour apprendre le métier, alors les étudiants en médecine... Ce n'est plus qu'un détail de la désillusion ambiante.
Toutes les bonnes intentions et bonnes initiatives sont broyées par cette machine
Le système, tel un ogre indéfinissable, est le responsable de tous les manquements et de tous les excès. Le système est difficilement attaquable parce qu'il est immatériel, bien que ce soit le produit des hommes et des femmes qui l'ont alimenté depuis des décennies. Hérité des temps de la colonisation, il a été ensuite engrossé et complexifié en y ajoutant des ingrédients de toutes sortes : inconséquence, irresponsabilité, corruption et impunité. Dans ce climat, toutes les bonnes intentions et bonnes initiatives sont broyées par cette machine.
On peut passer tout le temps qu'on souhaite à condamner et se défouler sur le système, mais rien n'y fait, il demeure insensible et intouchable, ou presque. Sa force vient de son caractère immatériel. Parfois, il éjecte à la vindicte populaire un appât facile. Mais quand la plupart des éléments de ce dernier acceptent les inépties, c'est vers l'écroulement et le chaos qu'on se dirige. Ceux qui s'y opposent ou se fatiguent sont priés de le quitter, afin qu'il demeure libre et destructeur de la société et de ses valeurs.
Il est question de valeurs morales, religieuses et éthiques de la société, qui sont en destruction. Et le rejet du système de santé marocain par tous les citoyen n'est qu'un symptôme du rejet des valeurs humaines de ceux qui le constituent et acceptent d'en faire partie, voire de le servir. Les étudiantes effarées que j'ai croisées ne souhaitent pas appartenir à une telle organisation mais leur formation les oblige à y être, comme je l'ai été moi-même il y a de cela une génération. Comme tant d'autres, je l'ai fui à la première occasion sachant que je n'apprendrais jamais mon métier dans un chaos pareil. Des années plus tard, je suis revenu pour utiliser les faibles marges de manœuvre du système pour accéder aux démunis et enseigner un certain savoir-faire et un savoir-être.
Un matin, j'ai croisé, à l'Ordre des médecins de Casablanca, un professeur en médecine en gynécologie que je connais depuis de longues années.
- Alors comment ça se passe dans ton service ?
- Je suis fatiguée et désabusée, je vais peut être partir !!
Ensuite, elle m'a égrené les noms de tous ceux de ma génération et même en dessous qui ont quitté les trois services du CHU de Casablanca, laissant les jeunes faire face à une charge de travail colossale et privés de formateurs.
- Comment le ministère de la Santé et celui de l'Enseignement supérieur acceptent-ils les démissions des enseignants en masse ? Ce n'est pas normal, lui dis-je.
- C'est pire, on a l'impression qu'on nous pousse vers la démission et le départ.
- Est-ce pour encourager les deux facultés privées qui viennent d'ouvrir au Maroc ?
Et même !! Les étudiants ont toujours besoin de terrain de stage et cette politique par le vide n'est que suicidaire. Enfin, je ne comprends plus rien, m'a-t-elle répondu d'un air détaché et incrédule.
Cette dame est parmi les dernières qui résistent. Faisant un peu de privé, elle continue à enseigner et à tenir un service. Son départ et celui de tant d'autres est préjudiciable, aussi bien aux soins octroyés aux patients qui arrivent souvent dans des états compliqués d'autres hôpitaux périphériques voire d'autres villes, que pour la formation de jeunes médecins et des étudiants en médecine.
Le système, laissé comme un bateau ivre, pourra bien s'écrouler, hélas, en occasionnant des dégâts considérables qui éclabousseront tout le monde, et surtout ceux qui l'ont laissé pourrir par mépris ou par indifférence.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.