Fin des illusions séparatistes : Le Polisario face à l'heure de vérité    Hicham Balaoui nommé Procureur général du Roi près la Cour de Cassation    Isolée, marginalisée, l'Algérie rétrograde sa représentation au sommet de la Ligue arabe à Bagdad    Hicham Balaoui : Le parcours d'un juriste-né    PEAA. Les ministres africains se retrouveront à New York    Conseil des ministres : De nouvelles nominations Royales    Le Burundi salue la Vision Royale en faveur de l'Afrique    Ciment : plus de 4,52 Mt de livraisons à fin avril    Info en images. Une mission économique marocaine promeut le Made in Morocco aux Etats-Unis    Douanes : les recettes nettes en hausse de 10,3% à fin avril    Madrid relance le projet de tunnel sous-marin reliant l'Espagne et le Maroc    Africorp et l'UM6P unissent leurs forces pour l'innovation en Afrique    Exploitation illégale de l'eau : les infractions en forte progression    Le ministre chinois des Affaires étrangères : la visite du président chinois en Russie a représenté une étape cruciale dans le renforcement du partenariat stratégique global entre les deux pays    Le Polisario à la recherche d'un nouvel idiot utile !    Manifestations en Allemagne pour l'interdiction de l'AfD, un parti d'extrême droite    Lancement officiel de la 21ème édition de l'Exercice "African Lion"    L'Algérie a décidé d'expulser d'autres fonctionnaires français    La 24è édition du Trophée Hassan II de "Tbourida" du 26 mai au 1er juin 2025 à Rabat    France : Ousmane Dembélé sacré meilleur joueur de Ligue 1    CAN U20 : L'Afrique du Sud 4e mondialiste et 4e demi-finaliste au bout des prolongations    Achraf Hakimi, lauréat du Prix Marc-Vivien Foé 2025    Handball /32e Super Coupe d'Afrique des clubs, Caire 25 : Mountada Derb Sultan vs Attaraji ce soir    Officiel : L'Italien Carlo Ancelotti nommé sélectionneur du Brésil    La RS Berkane et l'AS FAR en Ligue des Champions de la CAF    Secteur informel : une régularisation qui peine à contenir l'ampleur du fléau    Températures prévues pour mardi 13 mai 2025    "Handi'Cap sur l'Atlas" : quand l'inclusion prend de l'altitude    Cybersécurité : près de 70 000 attaques DDoS ont visé le Maroc au second semestre 2024    Ligne à grande vitesse : l'Etat autorise de nouvelles expropriations foncières pour le tracé entre Kénitra et Marrakech    La DGAPR explique les circonstances de la sortie exceptionnelle de Nasser Zefzafi    «Club with Moroccan roots» label sparks controversy in Ceuta    « L'Oiseau, la Coquille et le Poisson » : un spectacle muet enchante petits et grands à Rabat par ses messages profonds et sa sagesse chinoise    Essaouira : le Festival Gnaoua lève le voile sur les fusions de sa 26e édition    Trophées Marocains du Monde 2025: Des parcours exceptionnels à l'honneur    Rabat célèbre le rap marocain avec la première édition du 212'FlowFest    L'UNESCO appelle à renforcer les sites du patrimoine africain    Maroc-Chine : une coopération stratégique fructueuse dans l'industrie et l'énergie verte    Mercato : Kevin De Bruyne aurait donné son accord pour rejoindre Naples    Le CHU Mohammed VI de Marrakech prend en charge un nouveau-né dans un état critique    En présence de l'ambassadeur de Chine à Rabat... L'Oiseau, la Coquille et le Poisson : une pièce de théâtre chinoise qui renforce le dialogue culturel sino-marocain    Berlin confirme officiellement son intérêt pour la relance navale marocaine et pour la construction de centrales à gaz, de gazoducs et de terminaux de gaz naturel liquéfié dans le pays    Revue de presse de ce lundi 12 mai 2025    Gaza : le Hamas va libérer un otage israélo-américain ce lundi    USA-Chine : Des "progrès substantiels" dans les pourparlers à Genève    Le Chœur de Chambre du Maroc et Le Concert Spirituel réunis pour célébrer Mozart    Marrakech: Le défilé de la "Caftan Week 2025" célèbre le Sahara marocain et consacre le Maroc comme référence mondiale du caftan    MAGAZINE : Mohamed Choubi, la mort ne ment pas    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Histoire : Quand le Maroc a failli se transformer en royaume des Taïfas [1/5]
Publié dans Yabiladi le 10 - 07 - 2018

Dans cette série bimensuelle, Yabiladi revient sur une période délicate de l'histoire du royaume où plusieurs parties du Maroc, sous les Saadiens, étaient contrôlées par des entités différentes. Dans cette première partie, l'histoire de la Zaouia de Dila.
Avant l'avènement des Alaouites vers 1631, le Maroc sous les Saadiens était divisé en plusieurs zones d'influences. Des Etats contrôlés notamment par deux puissantes zaouias berbères : Celle de Dila, au centre, et celle des Illighs au sud. Quelque part dans l'ouest, la République de Salé était arrivée à son apogée, au moment où les sultans saadiens ne contrôlaient que Marrakech et une partie du Nord, vers Tanger. Même Tétouan était alors gouvernée par la puissante famille des Naqsis.
Pour retracer cette histoire dans laquelle le Maroc avait failli se transformer en une deuxième Andalousie à l'époque des royaumes des Taïfas, un retour au XVII siècle s'impose. Vers 1566, Sidi Aboubakr ibn Mohammad As-Sanhaji Al-Mejjati réunit ses disciples berbères en confrérie religieuse appelée la Zaouia de Dila, ayant d'abord élu domicile au sud-est d'Aït Ishaq (province de Khénifra). Alors qu'elle jouait seulement un rôle religieux et social au début de son existence, entretenant ainsi des relations cordiales avec le pouvoir saadien, la Zaouia de Dila se transformera ensuite en une entité à part entière, influençant la vie politique, religieuse et même littéraire du Maroc du XVII siècle.
Du social à la politique et du coran à l'épée
Nous sommes en 1603. Dès la mort d'Ahmed Al Mansour, 6ème sultan saadien, la dynastie au pouvoir est divisée sur fond de courses au pouvoir entre ses fils. «Sur le plan religieux, cette période est surtout marquée par la naissance de plusieurs zaouias qui étaient toutes des stations religieuses pour réciter le Coran et certains hadiths», racontent Charif Hidaya et Ismail Ait Abderrafie, citant Mohamed Hajji et son œuvre «La Zaouia de Dila et ses rôles religieux, scientifiques et politiques» (Editions Ennajah, 1988). L'apparition des Zaouias en tant que centres destinés à accueillir et à nourrir les Marocains nécessiteux date, elle, de l'époque du sultan almohade Yaacoub Al Mansour.
Des ruines de la Zaouia de Dila près de Khénifra. / Ph. DR
La Zaouia en profitera pour bâtir «une solide réputation basée sur leur prestige religieux, leur générosité, ainsi que leur aptitude à dénouer des différends de pacages entre pasteurs transhumants imaziġen du Moyen-Atlas», écrit Michel Peyron, dans un article paru dans l'Encyclopédie berbère.
«Du temps de [Abu Bakr ben Muḥammad El Mejjati Es-sanhaji], ainsi que sous son successeur, tous deux tenants du conformisme soufi, la Zaouia se cantonna dans ses fonctions classiques d'enseignement coranique, d'arbitrage des conflits, et d'hospitalité aux voyageurs. Au fil des années, cependant, (…)s'était façonnée une véritable trame de solidarité et d'entraide, laquelle, débordant le cadre du seul Moyen-Atlas, englobait l'ensemble du pays amaziġ, y compris la Haute Moulouya et le Haut-Atlas oriental jusque sur son versant sud.»
Extrait de «Dila», article publié par Michel Peyron dans l'Encyclopédie berbère
La Zaouia de Dila entamera ainsi sa transformation déjà enclenchée par la construction d'un lieu, portant aussi le nom de Zaouia tout comme la confrérie, près de Taghoulit (province d'Azilal). Avec l'arrivée de Mohammad Al Hajj, troisième chef depuis la fondation de la Zaouia de Dila, cette dernière déclare la rébellion ouverte contre le pouvoir central saadien à partir de 1638. Lors de la bataille de l'Oued L'Abid en 1638, Mohammed Al Hajj bât même les Saadiens.
Le royaume vers 1600. / Ph. DR
Un Etat régnant sur une bonne partie du royaume
Il construit une nouvelle Zaouia de Dila, vers Sidi Ishaq, sur l'actuelle route reliant Khénifra à Kasbat Tadla. «La situation justifie la création d'une base arrière solide et la constitution d'une armée, compte tenu de la vacance du pouvoir central au Maroc, suite au déclin des Saadiens, et au morcellement du pays en fiefs rivaux sous la tutelle des chefs tels que El Ayyachi Abou Hassan Es-Semlali, ou les Churfas filaliens. Une deuxième zaouia est aussitôt créée sur le site de l'actuelle Zaouia des Ayt Ishaq, ainsi qu'une ville fortifiée», raconte Michel Peyron.
Mohammad Al Hajj «tenta la fondation d'une dynastie berbère avec l'appui des [Sanhajas] du [Fès] et du Moyen Atlas, une tentative [ayant] failli d'ailleurs réussir», indique un article des «Archives Berbères», une publication du Comité d'Etudes Berbères de Rabat (Volume II - Fascicule 3, 1917).
«Mohammed Al Hajj régna à Fez et sur le Nord-Ouest marocain pendant une trentaine d'années environ ; il est certain qu'entre la dynastie Saadienne qui s'éteignait a Marrakech avec Abou Al Abbas Ahmed Ben Zidan et celle des Filala qui commençait à [apparaître] avec Mohamed Ali Chrif de Sijilmassa, la dynastie des Dilaite faillit soumettre une seconde fois le Maroc aux Berbères Sanhajas qui avait déjà régné avec la dynastie Almoravide.»
Extrait des «Archives Berbères»
Après la prise de Meknes, puis Fès en 1641, les troupes de la Zaouia de Dila arrivent même jusqu'au port de Safi, contrôlant ainsi une bonne partie du commerce anglais et hollandais qui transitait par ce port à l'époque. Il aurait fallu à Mohammed Al Hajj d'évincer un autre rival, El Ayyachi et de s'allier avec les Morisques de Salé, permettant ainsi à la Zaouia de Dila de s'imposer comme Etat berbère à part entière.
La zaouia de Dila était située près de Aït Ishaq (province de Khénifra). / Ph. DR
Mohammed Al Hajj, sultan de Fès jusqu'en 1663
Profitant de l'emprise de son Etat sur une partie de la façade maritime du royaume et sur les voies caravanières entre le Tafilalet et le Saïss, Mohammed Al Hajj s'autoproclamera même à Fès en tant que sultan en 1659. De quoi irriter Moulay M'hammed, frère de Moulay Rachid et fils de Moulay Ali Chrif, qui adressait même une lettre au nouveau sultan.
«Les feux de discorde que vous avez rallumés de leurs cendres vous dépassent. Aussi bien le peuple du Maroc ne vous reconnaît-il à vous, gens de Dila, que la capacité de servir des plats de bouillies entre vous. Vous mangez de la bouillie tandis que nous mangeons, nous, du couscous. Entre vous, vous rivalisez de poèmes impossibles à écouter tant ils sont horribles. Quant aux sciences, nous vous en concédons équitablement l'apanage, tant que vous ne visez par elles que la jurisprudence ou un salaire d'enseignant.»
Lettre de défi adressée par Moulay M'hammed à Mohammed Al Hajj, citée par Ahmad ibn Khalid al-Nasiri dans son œuvre Al-Istiqsa
Et le déclin de la Zaouia de Dila commencera. Les Dilaïtes renonceront, en effet, à garder Fès comme capitale dès 1663, incapables de s'affirmer sur le nord-est du pays et sur les côtes atlantiques. Parallèlement, et entre 1664 et 1666, les Alaouites mettent fin à leurs querelles intestinales et s'unifient autour de Moulay Rachid. L'accession au trône de ce dernier, en 1666, marqueront un tournant décisif puisque le nouveau sultan alaouite lancera une grande opération visant à l'unification du Maroc. La zaouia de Dila perdra tout pouvoir politique en 1668 à l'issue de la bataille de Btan Romman, opposant alaouites et Dilaïtes qui essayeront un échec mémorable. Les adeptes de la Zaouia sont ainsi exilés vers Fès ou Tlemcen, comme le rapporte Jaouad Tebbaâi dans Al Hewar Al Moutamaddin. Selon ce dernier, Moulay Rachid ordonnera même de «détruire la nouvelle et l'ancienne Zaouia».
Portrait de Moulay Rachid. / DR
La Zaouia tentera à nouveau de renaître de ses cendres en 1677, avec un soulèvement des tribus amazighes, orchestré par Aḥamad Ben Abdallah, petit-fils de Mohammad Al Hajj avec l'appui des Turcs avant que l'influente confrérie ne soit enfin rasée en 1696 par Moulay Ismail.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.