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Réflexions sur la place des droits fondamentaux dans la nouvelle Constitution marocaine
Publié dans Albayane le 10 - 06 - 2012

La Constitution marocaine de 2011 - Analyses et commentaires est le titre du nouveau livre initié et réalisé sous la direction du Centre d'Etudes Internationales* (CEI), paru aux éditions LGDJ le 24 avril 2012 et dont la commercialisation au Maroc aura lieu prochainement. Dans cet ouvrage collectif, Bertrand Mathieu** étudie le système des droits fondamentaux incorporé dans la nouvelle Loi fondamentale en puisant dans une approche de droit comparé.
L'inscription dans la nouvelle Constitution marocaine d'une liste complète et détaillée de droits fondamentaux, de même que leur rappel, au nom des valeurs sur lesquelles repose l'ordre juridique marocain, traduit la place qu'occupent ces droits et libertés dans la construction d'un Etat de droit. Au-delà de leur affirmation, la structuration de ces droits, leur articulation et leur formulation, conditionnent leur portée.
Ces droits fondamentaux représentent un système de valeurs propre à la société que la Constitution régit. En ce sens, la Constitution marocaine de 2011 est en même temps héritière et créatrice. Héritière, en ce qu'elle reprend des droits et libertés (égalité, liberté, dignité, droits sociaux, droits-garantie, etc.) constituant le patrimoine commun des Etats démocratiques. Créatrice, en ce qu'elle inscrit l'ordre juridique marocain dans cette logique tout en mettant en exergue les spécificités nationales.
Les droits fondamentaux ont, aujourd'hui, vocation à s'instituer en un système juridique qui modifie en profondeur certains des principes traditionnels qui ordonnent les sociétés politiques. C'est ainsi que la Constitution marocaine vise à intégrer ses traditions religieuses liées à l'Islam et les droits fondamentaux consacrés dans les sociétés qui se veulent des Etats de droit.
La Constitution marocaine traduit assez exactement cette logique.
L'idée de permanence, voire de prééminence des aspirations relatives à l'Etat de droit, se trouve exposée dès la première ligne du préambule de la Constitution affirmant que le royaume du Maroc est « Fidèle à son choix irréversible de construire un Etat de droit démocratique (...) ».
Le préambule de la Constitution établit d'abord un catalogue de valeurs très large qui renvoie à la société que régit cette Constitution. On y trouve un certain nombre de principes qui seront développés ou repris dans la suite de la Constitution : solidarité, sécurité, liberté, égalité des chances, dignité, justice sociale et corrélation entre les droits et les devoirs.
Ensuite, le texte définit le cadre étatique de cette société. L'Etat marocain est un Etat musulman, attaché aux principes de l'unité nationale et de l'intégrité territoriale. Son identité nationale est une et unique, bien que formée de nombreuses composantes.
On observe à la lecture de ces différentes considérations que la place tenue par la religion musulmane, prééminente, implique une conciliation entre un Etat d'inspiration théocratique - ce qui tient d'ailleurs au fait que le chef de l'Etat est aussi un chef religieux - et le caractère démocratique et ouvert aux autres religions. La tolérance vis-à-vis des autres religions participe d'un registre que l'on peut trouver quelque peu restrictif. Mais cette tolérance est accompagnée de dispositions plus précises, notamment l'article 3 rappelant que « L'Islam est la religion de l'Etat, [mais] qui garantit à tous le libre exercice des cultes ». Ce rappel n'est pas dépourvu de significations au regard de la situation qui prévaut dans certains pays musulmans.
Après les affirmations relatives aux principes qui régissent la société et l'Etat, interviennent celles qui intéressent les droits de l'Homme. Selon le texte lui-même, ces droits représentent des valeurs et des principes immuables. Cette Constitution s'inscrit, de ce point de vue, de manière plus moderne et, sur certains points, spécifique, dans la logique des textes fondateurs traduisant une conception naturaliste des droits fondamentaux. On retrouve, s'agissant non pas de l'affirmation des valeurs, mais de la pratique qu'elles déterminent, la volonté d'éradiquer les discriminations fondées sur le sexe, la couleur, les croyances, la culture, l'origine sociale ou régionale, la langue ou l'handicap. On relèvera que cette liste est à la fois très longue et pourrait paraître à certains comme oubliant des discriminations interdites dans d'autres systèmes juridiques comme celles fondées sur l'orientation sexuelle. Mais d'une part, on ne peut faire grief à un tel texte de ne pas énumérer toutes les discriminations imaginables, ce qui est, in fine, impossible et, d'autre part, le texte vise l'ensemble des circonstances personnelles. Cette formule inclut d'autres discriminations potentielles. Cependant, la question de l'universalisme des droits fondamentaux reste posée. La définition occidentale des droits fondamentaux, fondée sur une conception individualiste de l'homme et une conception universaliste et égalitaire de ses droits correspond mal à des sociétés qui ont une vision cosmogonique du monde (en Asie notamment), à des sociétés où le groupe compte plus que l'individu (en Afrique en particulier), sans parler du rejet de quelques principes inhérents à ce système par certains Etats qui se déclarent islamiques. Ainsi, à la globalisation économique ne correspond pas nécessairement l'universalisation des droits fondamentaux. On relèvera que la Constitution marocaine ancre la défense de ses spécificités dans l'éducation qui concerne, notamment, « (...) l'attachement à l'identité marocaine et aux constantes nationales immuables » (article 31).
On trouve ici, s'agissant du système de valeurs inscrit dans la Constitution, une articulation entre le patrimoine commun des droits de l'Homme et le patrimoine propre au Maroc, qui n'est pas explicitée, même si l'on glane dans le texte et de manière éparse quelques éléments, qui fonctionneraient difficilement, mais qui sont indispensables. En effet, la seule adhésion à des valeurs communément partagées, mais très générales, ne peut suffire à fonder une communauté nationale. C'est d'abord cette articulation, ce balancement, entre des principes et des valeurs qui peuvent se révéler antinomiques qui constitue l'élément central de l'analyse.
Cette analyse du droit constitutionnel marocain des droits fondamentaux, tel qu'il résulte du texte constitutionnel, devra être très largement éclairée par les applications qui en seront faites par le juge constitutionnel marocain. De ce point de vue, les références nombreuses et substantielles qui sont faites au droit constitutionnel français ne visent qu'à éclairer le débat. Elles ne préjugent aucunement des interprétations qui seront faites en droit marocain et qui tiendront nécessairement compte des spécificités de la société et de l'ordre juridique marocains. Il n'en reste pas moins que la rédaction d'un nouveau texte constitutionnel témoigne du développement d'un patrimoine commun, en l'espèce euro-méditerrannéen, dont les droits fondamentaux constituent l'un des axes centraux. L'analyse doit conduire, sans préjugés, à déterminer ce qui est, dans cet espace géographique et culturel, commun ou au contraire propre à chaque Etat ou groupe d'Etats, voire irréductiblement différent. De ce point de vue, cet article s'inscrit dans la volonté de participer à un dialogue franco-marocain très ouvert, mais qui ne s'arrête pas à une vision formelle ou purement consensuelle. Cet article a donc pour objet d'examiner, notamment au regard du droit français et des principes communs aux Etats démocratiques, comment la Constitution marocaine reprend ce patrimoine commun tout en l'adaptant à ses propres caractéristiques. La réflexion sur les droits fondamentaux renvoie à des questions essentielles tenant aux rapports entre la démocratie et les droits fondamentaux et à l'universalisme des valeurs.
Au-delà de ces débats idéologiques, les droits fondamentaux constituent un instrument juridique. Leur formulation, au-delà d'un rappel parfois incantatoire, doit être précisément examinée, ainsi que leur portée juridique. Doivent être ainsi distingués les droits des devoirs, les droits subjectifs des droits qui constituent des objectifs auxquels sont soumis les pouvoirs publics, les droits substantiels des droits qui constituent des garanties.


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