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Entretien avec le philosophe français Michel Onfray
Publié dans Albayane le 28 - 11 - 2012


Le socialisme libertaire est un humanisme...
Michel Onfray, né le 1er janvier 1959, docteur en philosophie a enseigné dans les classes terminales d'un lycée technique de Caen de 1983 à 2002 avant de créer une Université Populaire à Caen en octobre 2002, puis une Université Populaire du goût à Argentan en 2006. Natif d'Argentan, dans l'Orne, il y est domicilié. Il a publié une cinquantaine d'ouvrages dans lesquels il propose une théorie de l'hédonisme : que peut le corps ? En quoi est-il l'objet philosophique de prédilection ? Comment penser en artiste ? De quelle manière installer une éthique sur le terrain de l'esthétique ? Quelle place laisser à Dionysos dans une civilisation tout entière soumise à Apollon ? Parmi ses ouvrages, «Contre-histoire de la philosophie, tome 7, “L'ordre libertaire. La vie philosophique d'Albert Camus", éditions Flammarion, janvier 2012 et “Rendre la raison populaire" aux éditions Autrement (octobre 2012).
Al Bayane : à quelle fin écrivez-vous ?
Michel Onfray : Si, cas de figure hypothétique, tous les éditeurs de la planète se liguaient pour m'interdire la publication d'une seule ligne de moi, je continuerai à écrire... C'est pour moi un besoin vital, une occasion de mettre de l'ordre dans mon esprit, donc dans ma vie.
Ensuite, quand on sait qu'on va être publié, on écrit par militantisme : pour diffuser les idées auxquelles on croit, des idées qui font avancer la raison, la paix, la concorde, l'intelligence, la solidarité, la fraternité, l'amitié...
Votre œuvre porte la marque de vos lectures d'Albert Camus. Pourquoi la pensée camusienne est votre premier sujet de votre réflexion ?
J'ai un rapport épidermique à l'injustice que je ne supporte pas, viscéralement. J'ai voulu restaurer une justice pour Camus qui est lu avec les lunettes sartriennes - alors que Sartre fut de tous les mauvais combats de son siècle. Sartre avait la haine chevillée au corps ; Camus, la raison. Sartre voulait égorger le bourgeois et le faisait faire par d'autres et criait bravo quand de bons petits soldats le faisaient pour lui ; Camus voulait résoudre les problèmes sans guillotines, sans terreur, sans faire couler le sang. Je voulais juste qu'on sache qui il était et qu'ensuite on l'aime, ou pas, mais en connaissance de cause de ce qu'il fut vraiment.
Que veut dire le socialisme libertaire ?
C'est le socialisme plus la liberté, autrement dit : la solidarité, la fraternité, la justice, le partage, sans camps de concentration, sans barbelés, sans flics ni militaires, sans commissaires du peuple, sans goulag, sans miradors...
Comment envisagez-vous la situation de la gauche française actuellement?
Il y a deux gauches en France : une gauche de droite, c'est celle qui est au pouvoir, elle est libérale, se dit de gauche, mais gère le capitalisme dans le cadre de l'Europe de Maastricht. Puis une gauche robespierriste, celle de Mélenchon, du Nouveau parti anticapitaliste, de Lutte ouvrière, du Parti communiste français, qui est brutale, sommaire, agressive, violente, nostalgique de la guillotine qu'elle pratique par le verbe. La première aime la liberté, mais pas l'égalité ni la justice ; la seconde aime l'égalité, mais pas la liberté et la justice. Pour ma part, j'aime la liberté, l'égalité et la justice : c'est seulement ainsi qu'on crée la fraternité qui manque à la première gauche comme à la seconde.
Suivant le mot de F. Nietzsche dans Le Gai savoir, 1882, la tâche de la philosophie est de : «nuire à la bêtise». De quelle bêtise s'agit-t-elle ? Et quelles sont actuellement les tâches de la philosophie et l'intellectuel des temps modernes ?
La bêtise, c'est le catéchisme, la récitation au lieu de la réflexion, le lieu commun au lieu du raisonnement construit, «la pensée unique» contre la pensée critique, c'est la soumission à une doctrine, à un homme, à un parti, à une secte, à une religion, parce que la soumission n'est jamais une bonne chose...
Vous avez consacré une grande patrie dans votre étude à la théorie de l'hédonisme et le corps. Pourquoi cette éloge du corps ?
Parce que c'est la seule chose que nous possédions en propre et avec laquelle il nous est possible de construire notre plaisir en même temps que celui d'autrui. Quand tous les grands discours se sont effondrés (christianisme, marxisme, freudisme), il ne nous reste que ce seul capital – et il faut en faire un bon usage, ce qui nécessite un apprentissage. D'où cette théorie du corps hédoniste.
Vous êtes le créateur de l'Université populaire de Caen et l'Université Populaire du goût à Argentan. Comment voyez-vous l'enseignement de la philosophie dans les écoles et les universités traditionnelles ? Et quelle est, selon vous, la spécificité de l'université populaire?
Les écoles reproduisent l'idéologie dominante. Elles enseignent le catéchisme que la société s'est construit pour légitimer son être et sa durée. On y apprend les lieux communs utiles à la cohésion sociale, en l'occurrence le renoncement à soi au profit de la soumission à la collectivité.
L'université populaire propose une construction de soi qui n'est pas pour autant négligente de son inscription dans la communauté. Elle inverse la perspective : l'institution veut la soumission de l'individu à la collectivité, et vise l'harmonie entre l'individu et la société.
Dans votre ouvrage «Le crépuscule d'une idole» vous avez beaucoup critiqué Freud et les psychanalystes, pourquoi cette attaque ? Et comment expliquez-vous que les psychanalystes sont des menteurs qui vendent l'illusion aux gens ?
Dire la vérité n'est pas attaquer : vient-il à l'idée de quelqu'un de dire d'Hannah Arendt qu'elle a été méchante et injuste avec Hitler ou Staline pour avoir «critiqué» et «attaqué» le totalitarisme ? Il faut juste restaurer la vérité et dire que la psychanalyse ne guérissait pas, ce que Freud écrivait lui-même d'ailleurs ; que Freud a accompagné les régimes fascistes européens ; que Freud dormait pendant les analyses ; qu'une séance coûtait 450 euros et qu'il en prescrivait une par jour ; qu'il a travaillé avec l'Institut Göring, les nazis donc, pour que la psychanalyse puisse continuer à exister sous le régime nazi, en même temps qu'il intriguait pour évincer les psychanalystes de gauche, etc.
Les psychanalystes ont constitué un clergé qui organise les choses comme dans une religion. Et toutes les religions traitent l'opposition par l'inquisition, la torture et le bûcher, pas par le débat, la raison, le dialogue et l'échange...
Le surhumain, aura t-il une place dans l'ère de l'étant et la fin du sens ?
Contentons-nous pour l'instant d'instaurer le règne de l'humain, ce serait déjà beaucoup...


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