Après ses propos jugés rétrogrades sur les femmes, le secrétaire général du Parti de la Justice et du Développement (PJD), Abdelillah Benkirane, fait une nouvelle fois polémique. Lors d'une récente déclaration publique, l'ancien chef du gouvernement a appelé les parents à « marier leurs filles avant qu'il ne soit trop tard », estimant que « si elles ne se marient pas, leurs études ne leur serviront à rien ». Des propos qui ont suscité une vive indignation, notamment de la part de l'association Kif Mama Kif Baba, engagée dans la défense des droits des femmes. Sur ses réseaux sociaux, l'organisation a tenu à réagir fermement. « À M. Benkirane : Le Maroc mérite mieux que vos conseils rétrogrades», peut-on lire dans sa publication. Mais Benkirane ne s'est pas arrêté là. Il a exhorté les familles à « dire oui au premier venu, pourvu qu'il soit acceptable », allant jusqu'à affirmer à l'intention des jeunes femmes : « Il n'y a ni études, ni travail, ni rien. Le mariage avant tout. Vous pourrez faire des études après ». Remettant une couche, il a poursuivi : « Si vous ratez l'occasion de vous marier, ni les études ni le travail ne vous sauveront », comparant ainsi les femmes célibataires à des cigognes, alors qu'il les avait comparé auparavant à des « lustres ». « Même la cigogne vole, alors que vous resterez seules », a-t-il lancé à la fin. Des propos jugés sexistes, condescendants et déconnectés de la réalité marocaine. Pour Kif Mama Kif Baba, il ne s'agit ni d'un lapsus ni d'une simple maladresse, mais d'une énième dérive de la part de Abdelilah Benkirane qui n'en finit pas de s'attirer des foudres de toute part. Ce n'est, en effet, pas la première fois que Benkirane s'exprime de manière péjorative sur les femmes marocaines, en les réduisant à leur seule capacité à se marier, comme si leur avenir importait peu par la suite. Et l'ancien chef du gouvernement n'est pas sans ignorer les réalités sociales du pays. Justement, cette réalité, Kif Mama Kif Baba a tenu à la rappeler, chiffres officiels à l'appui. « La réalité sur le terrain, c'est que 97 % des filles mariées avant 18 ans quittent définitivement l'école», souligne l'association, en citant le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, lors d'une émission télévisée. « Pendant que l'État investit des milliards pour scolariser les filles, vous (Benkirane) les poussez vers la sortie. Ce n'est pas du bon sens, c'est une trahison sociale », dénonce encore l'association, qui ne s'arrête pas là. En défendant la diversité des parcours de vie, elle a tenu à rappeler à l'ancien chef de l'Exécutif qu'« être célibataire n'est pas un échec. C'est parfois un choix : celui de l'éducation, de l'indépendance, de la liberté. Et cela mérite le respect, pas vos sarcasmes ». L'association conclut sa prise de position par un message limpide : « Le mariage peut attendre. Le savoir, lui, ne se rattrape pas si on l'abandonne. Chaque fille a le droit de choisir son moment, son rythme et son avenir. Et ça, Monsieur Benkirane, vous n'aviez nullement le droit de le décider à leur place ». Sur les réseaux sociaux, les internautes, hommes et femmes, se sont également insurgés contre les propos de Benkirane, n'hésitant pas à le tourner en dérision : « On était des lustres et maintenant on est des cigognes ! La chance », « Vite, enlevez-lui ce micro, sa situation devient préoccupante», « L'indépendance intellectuelle est plus fiable que le mariage ! Choisissez l'éducation pour vos filles ! On ne parle pas assez des taux de divorce au Maroc », « M. Benkirane semble vivre encore à l'âge de pierre », « Le Maroc se passera de ses conseils », « À un an des prochaines élections et zéro programme, le PJD mise tout sur les discours populistes ». Face à cette vague d'indignation, une chose est sûre, les déclarations de Benkirane ne laissent personne indifférent. Mais elles soulèvent aussi des questions fondamentales sur la place des femmes, l'éducation et l'avenir d'une jeunesse marocaine en quête de choix libres et respectés.