La presse écrite perd la bataille d'informer Le journal papier que se procure le public chaque jour au kiosque risque de disparaître s'il n'améliore pas son contenu et change radicalement de conception. Cette impression, qui peut être considérée comme une mise en garde à la presse traditionnelle, est faite, à la 8 ème Conférence Moyen-Orient pour l'Edition Journalistique, tenue les 26 et 27 février à Dubaï, à l'Etat des Emirats Arabes Unis. Une foule de données puisées dans des enquêtes de terrain ont été exposées par des experts pour démontrer que le monde de la presse évolue dans le sens qui n'est guère favorable au futur du journal papier devant l'éclosion des réseaux sociaux et de la presse électronique. Toutefois, le journaliste de la presse écrite se distingue par certaines qualités et capacités par rapport aux usagers des réseaux électroniques. Il est aussi mieux préparé pour s'adapter aux changements dans le monde des médias dans la mesure où il domine les nouvelles technologies, a la facilité de traiter des thèmes de différents genres et maitrise la déontologie. Toutefois, les participants à ce forum thématique ont dû suivre avec énormément d'étonnement et de surprise le rapport d'un expert allemand Peter Littger, directeur de l'entreprise Innovation International Media Consulting Group, basée à Berlin, qui a tiré la sonnette en révélant que 80% du contenu de la presse écrite peut être rencontré dans les autres médias. Ceci signifie que le produit journalistique représente uniquement 20% de l'édition du journal, une situation que l'expert allemand a qualifiée de «règle renversée» qu'il faut corriger pour que la presse écrite puisse survivre et renforcer sa diffusion auprès de ses lecteurs. Selon ce journaliste et consultant en stratégie pour les éditeurs, spécialisé en l'innovation éditoriale et le contenu, le journal actuel tend à devenir numérique dont sa rédaction sera un espace ouvert. Le futur modèle de journal va bannir le papier pour utiliser uniquement l'internet parce que, a-t-il expliqué, le contenu qui sera présenté par l'usager substituera celui du journaliste alors que les lecteurs utiliseront pour lire un écran IPad. Les journaux dont la production est exclusivement axée sur l'actualité (informations) seront confrontés à «une situation délicate», a relevé Littger. Ceux-ci doivent abandonner la présentation de l'information comme un «produit commercial» en optant pour la formule «information payée». Pour préserver le taux de diffusion du journal, l'expert allemand a proposé trois formules : «prospection de multiples voies pour l'amélioration du travail journalistique, présentation des réflexions et points de vue de tous les journalistes sans respect de hiérarchie et participation des parties concernées aux conférences de rédaction». Cette stratégie, visant à développer le contenu du journal, « n'a nullement besoin de conseillers de marketing du fait qu'il suffit que l'ensemble des acteurs concernés (journalistes, directeurs, public ou lecteurs) se concerte sur le mode de révolutionner le journal. « Désormais, le grand public aspire à connaître plus de choses nouvelles que des informations d'actualités», a observé l'expert allemand. Le journal actuel est appelé aussi à passer de la dimension à la valeur et faire participer à sa conception le plus grand nombre de bénéficiaires des services offerts dans leurs lieux de résidence (presse régionale). L'expert allemand a également proposé d'illustrer l'information (ou commentaire) de graphiques car la conception d'un journal «rentable économiquement» se base sur «le travail d'équipe, l'innovation, la communication, la collecte propre de données et le multimédia». Il serait possible que les «points de faiblesse peuvent devenir des points forts». Comme le public «boude les informations de la veille, les longs articles et même parfois les informations du jour et celles de demain», il est recommandé de faire participer les lecteurs au travail de la rédaction pour vaincre cette difficulté. Cette réflexion ne diffère guère de l'avis d'autres experts des analyses du contenu des médias qui ont assuré que 75% des quotidiens dans le monde ont introduit dans leurs rédactions les technologies nouvelles comme support technique. Les difficultés auxquelles est confrontée la presse écrite diffèrent pourtant d'une région à l'autre. Dans les pays dits en développement, par exemple, la progression du taux d'alphabétisation est accompagnée de l'augmentation du taux de diffusion de journaux et de publicité dans la presse. Ils ont également observé que les journaux vont se confronter au cours de la deuxième décennie du troisième millénaire à la profusion des réseaux sociaux de manière que le journalisme numérique offrira aux entreprises de communication davantage de formules d'innovation, ce qui rend encore plus difficile pour les éditeurs de journaux la mission d'augmenter leurs chiffres d'affaires. Pour avoir une idée de l'évolution des réseaux sociaux, il suffit de se référer au rapport mondial sur l'innovation dans la presse qui signale l'existence de 200 millions de sites web en 2011/2012 contre 200 uniquement en 1993. Le même rapport fait également état de 38,7 milliards de dollars en termes de recettes publicitaires en 2011, contre 47,5 milliards en 2005. Ainsi donc, le journal papier, tel qu'il est conçu actuellement, est-il confronté à de sérieux défis à cause d'une part de la forte concurrence exercée par le journalisme numérique et les réseaux sociaux, et d'autre part, la baisse des recettes publicitaires, principal support économique.