Par Dr Lamia OUZREN 2ème partie « Je souhaite que la santé soit enfin considérée non plus comme une bénédiction que l'on espère mais comme un droit de l'homme pour lequel on se bat. » Kofi Annan, ancien secrétaire général de l'ONU Le lien entre la santé et les droits humains Il existe des liens complexes entre la santé et les droits humains : La violation ou la négligence de droit humain peuvent avoir des conséquences grave sur la santé ; Les politiques et les programmes de santé, par leur conception ou leur mise en œuvre, peuvent contribuer à la promotion ou à la violation de droits humains ; La vulnérabilité et les conséquences de problème de santé peuvent être atténuées par des mesures visant à respecter, protéger et à mettre en œuvre des droits humains. Le contenu normatif de chaque droit est pleinement énoncé dans les instruments de droits humains .concernant le droit à la santé et à la non- discrimination, Voici des exemples des termes utilisés dans les instruments des droits humains énoncer le contenu normatif des autres droits fondamentaux en matière de santé : Torture « nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En particulier, il est interdit de soumettre une personne son libre consentement à une expérience médicale ou scientifique. » Violence contre les enfants : « toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l'enfant contre toutes formes de violence, d'atteinte ou brutalité physique ou mentale, d'abandon ou de négligence , des mauvais traitements ou d' exploitation , y compris la violence sexuelle ...... » doivent être prises. Pratiques traditionnelles préjudiciables : « toutes les mesures efficaces appropriés en vue d'abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants » doivent être prises. Participation : le droit à « une participation active, libre et utile » Information : «liberté de chercher, recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce » II- droit à la santé dans la nouvelle constitution La possession du meilleur état de santé a été consacrée comme l'un des droits fondamentaux de tout être humain dans la constitution de l'OMS il y a plus de cinquante ans, En effet ce droit a été évoqué avec force dans un grand nombre d'instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l'homme. Selon le haut-commissaire des nations unies pour les droits de l'homme, Mary robinson : « Le droit à la santé n'équivaut pas à un droit d'être en bonne santé, en vertu du droit à la santé, les gouvernements et les autorités sont tenus de mettre en place des politiques et des plans d'actions qui permettent à tous d'accéder le plus rapidement possible à des soins de santé » Dans cette perspective et à l'instar des autres pays, Faisant parties au pacte international relatif au droit économiques, sociaux et culturels (PIDESC), le Maroc a mis en œuvre des politiques et des plans d'actions pour assurer le respect, la protection et la garantie du droit au meilleur état de santé susceptible d'être atteint. Selon l'OMS 1946 : « La santé est un état de bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ». Selon René Dubos, 1973 : « Un individu en bonne santé est celui qui est capable de fonctionner aussi efficacement que possible dans son milieu et de se consacrer pleinement à ses projets ». Le droit à la santé est un droit humain fondamental reconnu dans de nombreux instruments internationaux ; Le Maroc a formellement reconnu le droit à la santé dans sa Constitution, adoptée en juillet 2011 :[1] Celle-ci reconnaît sept droits liés à la santé: * le droit à la vie [article 20] qui comprend également la lutte contre les mortalités évitables ; * le droit à la sécurité et à la protection de la santé [article 21] ; * les droits aux soins, à un environnement sain, à la couverture médicale [article 31] ; * le droit à la santé des personnes et catégories à besoins spécifiques [article 34] ; * le droit d'accès à des soins de qualité et à la continuité des prestations [article 154] ; Sa Majesté le Roi Mohammed VI a exprimé dans de nombreux discours la nécessité d'assurer aux Marocains et notamment aux plus démunis, l'accès à des soins de santé de qualité et à une couverture médicale de base (CMB) ; le Maroc, en adhérant à la Déclaration du Millénaire des Nations Unies s'est engagé à adopter des stratégies à même de lui permettre d'atteindre en 2015, les huit objectifs des « Objectifs du Millénaire pour le développement », dont trois sont relatifs à la santé : réduire la mortalité infantile ; améliorer la santé maternelle ; et combattre le VIH/SIDA, le paludisme et d'autres maladies ; le Conseil Economique, Social et Environnemental, dans son rapport intitulé « Pour une charte sociale : Des normes à respecter et des objectifs à contractualiser », adopté le 26 novembre 2011, fait référence au droit à la santé physique et mentale et définit neuf objectifs dont quatre concernent le présent avis : * améliorer l'équité d'accès et la qualité des structures et des services de soins ; * améliorer la santé maternelle et infantile ; * améliorer le cadre médico-légal de l'interruption de grossesse ; * évaluer et améliorer en continu les politiques nationales et régionales de prophylaxie, de traitement et d'éradication des maladies épidémiques et endémiques ; les soins de santé de base sont des soins essentiels, curatifs, préventifs et promotionnels, de premier recours qui font partie intégrante à la fois du système de santé national, dont ils sont la cheville ouvrière, et du développement économique et social d'ensemble de la communauté. Leur mission est de prodiguer des soins et des services équitables et de qualité pour répondre aux besoins essentiels en matière de santé d'une communauté définie sur une base géographique.[2] Tels qu'exprimés dans les textes internationaux, ces droits servent de référence aux Etats pour leur intégration dans leurs droits internes respectifs. Nombreux sont ceux qui reconnaissent ces droits à leurs citoyens en les mentionnant au niveau de la constitution, explicitement ou implicitement. C'est le cas de la constitution marocaine de 1996, comme celles qui l'ont précédée, qui reconnaît explicitement le droit à l'éducation et le droit au travail, expressément dans l'article 13 qui stipule : « tous les citoyens ont également droit à l'éducation et au travail ». A l'inverse, le droit au logement et le droit à la santé ne sont consacrés par aucune disposition particulière. Ces derniers sont implicitement reconnus dans le préambule de la constitution à travers l'adhésion du Maroc aux droits humains[3]. 1. Le droit à la santé [4]: Selon la charte de l'Organisation Mondiale de la Santé, (OMS) :« …La possession du meilleur état de santé qu'il est capable d'atteindre constitue l'un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale.» Le droit à la santé est un droit global, dans le champ duquel entrent non seulement la prestation de soins de santé appropriés en temps opportun, mais aussi les facteurs fondamentaux déterminants de la santé. 1. La Constitution de l'OMS (1945) : Les Etats parties à cette Constitution déclarent, en accord avec la Charte des Nations Unies, que les principes suivants sont à la base du bonheur des peuples, de leurs relations harmonieuses et de leur sécurité : * La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité. * La possession du meilleur état de santé qu'il est capable d'atteindre constitue l'un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale. * Les gouvernements ont la responsabilité de la santé de leurs peuples : ils ne peuvent y faire face qu'en prenant les mesures sanitaires et sociales appropriées. o Charte Internationale des droits de l'homme1948 : * La Déclaration Universelle des droits de l'Homme (DUDH) : * Article 1 : » Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits... » La reconnaissance du droit à la santé se profile à travers trois articles : * L'article 3 : «Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne». * L'article 22 : « Toute personne en tant que membre de la société a droit à la sécurité sociale ; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité... ». * L'article 25 : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que les services sociaux nécessaires... La maternité et l'enfance ont droit à une aide et à une assistance spéciale. Tous les enfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même protection sociale. 1. Conventions internationals: 2. Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966) ; 3. Convention relative aux droits de l'enfant (1989) ; 4. La Déclaration des droits des personnes âgées : Adopté par la Résolution 46/91des N.U le 16/ 12/1991 ; 5. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes : Adoptée par l'A. G. des N.U. En 1979 ; 6. La Convention relative aux droits des personnes handicapées : Proclamée par l'A. G. de l'ONU le 9/12/1975 ; 7. La Déclaration des droits du déficient mental : Proclamée par l'A. G. de l'ONU le 20/12/1971. L'article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966) stipule que les mesures à prendre pour assurer le plein exercice du droit à la santé doivent assurer : * la diminution de la mortalité infantile, ainsi que le développement sain de l'enfant ; * l'amélioration de tous les aspects de l'hygiène du milieu et de l'hygiène industrielle ; * la prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, ainsi que la lutte contre ces maladies ; * la création de conditions propres à assurer à tous des services médicaux. * La convention relative aux droits des enfants stipule dans son 24ème article ce qui suit : Les Etats Parties reconnaissent le droit de l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible et de bénéficier des services médicaux et de rééducation. Ils s'efforcent de garantir qu'aucun enfant ne soit privé du droit d'avoir accès à ces services. * Les dimensions de droit à la santé [5]: o Le droit à la santé : un droit indissociable et interdépendant : La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, qui constitue la source de tous les droits humains et l'instrument de base en vigueur, elle mentionne le droit à la santé dans son article 25 que : « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par la suite de circonstance spéciale, tous les enfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même protection sociale.» * Le droit à la santé : un droit individuel inaliénable : Les Etats parties au pacte international relatif aux droits économiques, Sociaux et culturels (PIDESC) reconnaissent : « le droit qu'à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable D'atteindre.» Pour le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CODESC), principal organe qui contrôle le respect du droit à la santé au niveau international, la santé : « Est un droit fondamental de l'être humain, indispensable à l'exercice des autres droits humains. Toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé susceptible d'être atteint, lui permettant de vivre dans la dignité.» * Les piliers du droit à la santé :