En amont de la visite de Nasser Bourita, Moscou qualifie le Maroc de « partenaire important » de la Russie sur le continent africain    Tourisme : Le Maroc se hisse parmi les destinations mondiales les plus dynamiques    Access Bank et SaudiExim Bank, symboles de la montée en puissance de Casablanca Finance City    « Sir B3id » : la nouvelle signature de inwi au service d'un Maroc digital et inclusif    Les niveaux de CO2 atteignent un record historique en 2024, alerte l'OMM    Bruxelles dresse un « mur » antidrones pour 2027 : l'Europe se protège face à la menace venue du ciel    Mondial U-20 : Le Maroc en finale    Maroc-France : à quelle heure et sur quelle chaîne suivre la demi-finale du Mondial U20    Averses orageuses localement fortes avec rafales de vent jeudi dans les provinces de Figuig et Boulemane    La startup marocaine Chari réussit une levée de fonds de 12 millions de dollars    Transport : le HCP adopte le suivi en temps réel du secteur    Etats-Unis : Duke Buchan prête serment en qualité d'ambassadeur à Rabat    Rabat et Moscou : Bourita et Lavrov ouvrent une nouvelle ère de coordination stratégique entre le Maroc et la Russie    Droits de douane américains : la Chine prête à se battre "jusqu'au bout"    Espagne: Une impasse professionnelle pour les travailleurs migrants    Presse : le CESE plaide pour une gouvernance plus équilibrée et inclusive du CNP    Parlement : le gouvernement affirme avoir répondu à 70% des questions écrites    L'Equipe écrit : Yassine Jassim, le joyau de Dunkerque qui émerveille le monde sous le maillot du Maroc au Mondial des moins de 20 ans    CdM 2026 : Cameroun, RDC, Nigeria et Gabon en barrages pour le dernier ticket africain    Effet multiplicateur du bâtiment sur l'économie : un dirham investi, 2,36 générés    Le Chef du gouvernement reçoit une délégation de hauts responsables et d'opérateurs économiques de la province chinoise d'Anhui    Hyatt Regency Casablanca : Le luxe urbain au cœur d'une métropole en mouvement    Tribunaux : Grand déficit de moyens humains    Aït Amira : Lourdes condamnations à l'encontre de17 personnes impliquées dans les émeutes    Migration : Attaque armée contre une embarcation près de Malte    La rhumatologie marocaine: de la douleur silencieuse à la révolution du mouvement    El Jadida: Le quartier Al Matar à bout de souffle ...!    Education: Le diagnostic inquiétant de Berrada de la gestion des écoles    Rétro-Verso : Rabat-Ville ou la renaissance d'une gare historique    Nador : Mémoire de la Paix: le cinéma comme dernier refuge du dialogue    « Marrakech », refuge pictural de Winston Churchill, bientôt aux enchères    Classement FIFA : Le Maroc reculera d'un rang malgré sa série record ?    Mondial féminin U17 : Maroc – Brésil pour l'ouverture ce vendredi    Entre record et doutes, les Lions de Regragui gagnent mais ne rugissent pas    Accès aux soins oncologiques au Maroc : disparités territoriales, insuffisance des ressources et lenteur du parcours thérapeutique face à une charge cancéreuse croissante    La cour d'appel d'Agadir inflige de lourdes peines après les événements d'Aït Amira    Assurance: Le Maroc et le Burkina Faso veulent consolider leur partenariat    Moyen-Orient : le Caucus des accords d'Abraham salue la paix entre Israël et le Hamas et confirme la participation de Rabat au processus    Record mondial : les Lions de l'Atlas en majesté après une seizième victoire consécutive    AFRI'CAN : Afrique en transe design    Palestine : Quelle suite au cessez-le-feu entre Israël et le Hamas ?    Maroc : Un étudiant condamné pour le piratage des panneaux d'affichage de la CAN 2025    CAN 2025 : 58 000 billets vendus jusqu'à présent, le comité d'organisation promet des améliorations à l'application Yalla    Comediablanca, la success story d'un festival qui conquiert le monde    Quatre femmes, mille rires : "Ménopause" au studio des arts vivants de Casablanca    L'art moderne nigérian s'expose à Londres    Le Maroc mentionné dans une enquête israélienne sur un ressortissant accusé d'espionnage au profit de l'Iran    Comediablanca announces international tour starting at Paris Olympia    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les chikhates, ces mal-aimées: Elles sont libres, elles divertissent et elles dérangent !
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 09 - 04 - 2016

«Voir des chikhates s'en aller l'une après l'autre est affligeant. Chacune de ces artistes est un trésor dont on ignore la valeur. Je ne sais pas si ce désintérêt est né du fameux complexe que l'on a de l'Occident et de cette manière de dénigrer tout ce qui est tribal, mais il faut savoir que ces chikhates sont fières. Elles chérissent cet héritage, le font vivre et le défendent».
Comment aimer ces femmes, les vénérer, danser sur leurs proses et déhancher sans pour autant l'assumer? Les chikhates, ces artistes à part entière dérangent car libres. Libres de par leur verbe, leur ton et leurs mœurs. Dans ce dossier, Aujourd'hui Le Maroc tente d'approcher l'univers de ces femmes, discréditer les idées reçues à leur propos et se questionner sur leurs passé et avenir dans un environnement qui les a enfantées sans pour autant les protéger.
A ses débuts, la chikha était tout sauf ce de quoi on la taxe aujourd'hui. Ce sont là les mots de Nacim Haddad, chercheur en culture populaire marocaine. Ce jeune qui est également doctorant en physique nucléaire à ses heures perdues nous explique comment la perception de la chikha a été déformée pour des raisons politiques (Voir interview page 19). Les chikhates étaient des voix libres qui chantaient l'injustice dont elles souffraient en tant que femmes mais également celles qui touchaient leurs tribus. Leur prose n'était pas mieux qu'un discours mobilisateur à même d'inciter la population à se soulever contre un caïd corrompu ou contre le colonisateur.
Auteurs anonymes
Ce point a également été relevé par Hassan Najmi, un auteur qui a consacré une grande partie de ses recherches sur l'Aïta, cet art indissociable des chioukhs et chikhates. Dans son essai «Al-Aita poésie orale et musique traditionnelle au Maroc» (éditions Toubkal, Casablanca), celui-ci déplore l'étrange destin de cette culture ; «celles qui en constituent la cheville ouvrière, les chikhates sont aimées d'un côté et rejetées de l'autre par une volte-face sociale schizophrénique. Or ce travail leur rend hommage comme étant celles qui ont fait don de leur vie et talents pour la perpétuation de la mémoire d'une culture et poésie dont les auteurs sont des anonymes ».
En effet, contrairement aux autres chants lyriques comme le malhoun et la musique andalouse, les auteurs de la Aïta sont anonymes. Pour Nacim Hassad, ce qui est fascinant à propos de ce que font les chikhates est justement le fait qu'elles soient porteuses d'une mémoire, d'un patrimoine et d'une histoire dont la richesse est immense. Ceci dit, «voir des chioukhs et des chikhates s'en aller l'un après l'autre est affligeant. Chacun de ces artistes est un trésor dont on ignore la valeur. Je ne sais pas si ce désintérêt est né du fameux complexe que l'on a de l'Occident et de cette manière de dénigrer tout ce qui est tribal, mais il faut savoir que ces chikhates sont fières. Elles chérissent cet héritage, le font vivre et le défendent», insiste-t-il.
De nos jours, les chikhates sont moins considérées pour la valeur des textes mais sont associées au divertissement dans toutes ses dimensions. Selon les régions, on peut les retrouver dans des occasions de baptême, circoncision ou mariage. Ces femmes sont peu rémunérées et sont amenées, pour vivre de leur art, à intégrer également un monde de nuit où le terrain d'artistes peut être glissant. C'est ce que décrit Nacim Haddad comme «taches noires». Il précise dans ce sens qu'il est important de faire la distinction entre les métiers de chikhates. «Le rôle d'une chikha «Khilal» est de danser. C'était par exemple le cas de la chikha Imane Tsunami qui accompagnait Khadija Lbidaouia. La chikha «tebbaâa», elle, ne danse jamais. C'est même très mal vu dans le milieu. Celle-ci interprète les textes. On peut citer ici la chikha Dona, Lhamounia ou encore la fameuse Fatna Bent Lhoussine».
Finir seules est le prix à payer
A l'instar de cette dernière, les chikhates ont souvent beaucoup sacrifié de leur vie pour exercer ce métier. Elles ont été rejetées par leurs proches et familles et finissent souvent seules. Nacim Haddad ajoute dans ce sens que «si certaines se sont mariées comme chikha Saadia Msika et Lhamounia, d'autres vivent leurs derniers jours solitaires. Chikha Dona, dont l'âge a dépassé les 80 ans, ne s'est jamais mariée et n'a jamais eu d'enfant». Vivre seule a été donc le prix à payer pour avoir fait de son art un métier que la population assigne aux bas-fonds des mœurs. Aujourd'hui, rien n'a changé et, paraît-il, trouver une relève à qui passer le flambeau de cet immense répertoire de la tradition musicale populaire devient de plus en plus difficile. Après tout, qui voudrait porter le poids du mot «chikha» ?


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.