Inégalités spatiales : le CNDH explore les pistes d'un rééquilibrage territorial    La BAD investit pour booster l'agriculture en Angola    Les langues béninoises entrent dans l'ère de l'IA    Kigali et Djibouti franchissent un cap avec neuf instruments signés    Mondial 2026: Les listes des 42 pays qualifiés et des 22 barragistes dévoilées    FIFM 2025 : La liste du jury dévoilée    Rabat accueille jeudi la Conférence ministérielle africaine sur le Désarmement, la Démobilisation et la Réintégration des enfants soldats    À Dakar, le Maroc met en avant une vision africaine fondée sur l'unité et l'intégration    Exclusif : Plus d'un an après sa sortie des prisons algériennes, Ismail Snabi accuse le coup    Tomates marocaines : l'Irlande devient un marché émergent avec des importations en forte hausse    Cours des devises du mercredi 19 novembre 2025    Le Maroc redessine son modèle agricole grâce à une ingénierie financière de nouvelle génération    Agro Export Day 2025 : Ryad Mezzour appelle à un sursaut pour valoriser l'origine Maroc    A Washington, le Prince héritier d'Arabie Saoudite annonce 1.000 milliards de dollars d'investissements aux Etats-Unis    PAM: Pas moins de 318 millions de personnes pourraient être confrontées à une crise alimentaire en 2026    Mafia : Le Maroc arrête le chef du clan d'Aprilia, activement recherché par l'Italie    Lutte anti-tabac: le monde appelé à affûter ses armes face à une menace aux dimensions complexes    Sahara : la prétention burlesque de l'Algérie d'être juge et partie !    CAF Awards 2025 : Ce qu'il faut savoir sur la cérémonie de ce mercredi    Match amical Maroc-Ouganda : Walid Regragui est plus serein pour la CAN 2025    JSI Riyad 2025 / Mardi : Le Maroc enrichit sa moisson mais glisse au classement    Mondial U17 / Quarts de finale :Le Maroc et le Burkina Faso portent l'Afrique    LDC (f) : L'AS FAR défiée en finale par l'ASEC Mimosa    Kénitra: Les informations sur un prétendu mariage par "la Fatiha" d'une mineure dénuées de tout fondement    Regragui after 4–0 win : «We must arrive at AFCON as a united group»    Hammouchi préside la cérémonie d'excellence annuelle organisée par la Fondation Mohammed VI pour les oeuvres sociales du personnel de la Sûreté nationale    Températures prévues pour jeudi 20 novembre 2025    Morocco beats Uganda 4–0 in friendly    Agadir : Ouverture d'un centre d'accueil pour chiens errants    L'ambassadrice de Chine en visite à la Commune de Marrakech pour explorer les perspectives de coopération    Marrakech Film Festival 2025 jury unites global cinema icons    Mélita Toscan du Plantier : Le FIFM soutient «l'émergence de nouvelles écritures autour du cinéma» [Interview]    FIFM 2025 : un jury cosmopolite et intergénérationnel    L'ambassadrice de Chine visite le Centre de langue chinoise "Mandarin" à Marrakech    Le ministère de la Santé assure l'évacuation sanitaire urgente d'un nouveau-né de Laâyoune vers Rabat    La Bourse de Casablanca ouvre en grise mine    18 Novembre : La date des dates!    Morocco shines with silver and bronze at Islamic Solidarity Games in Riyadh    Pressée par Trump, l'Algérie lâche les Palestiniens à l'ONU    Presionada por Trump, Argelia abandona a los palestinos en la ONU    Assassinat de Khashoggi : MBS évoque une "énorme erreur"    Coupe du monde 2026 : les détenteurs de billets bénéficieront de créneaux prioritaires pour les entretiens de visa américain    L'artisanat marocain s'expose à Séville pour renforcer les liens culturels avec l'Andalousie    Ayoub Gretaa retenu dans la sélection des "Révélations masculines César 2026"    L'eau et les infrastructures... au cœur des entretiens entre le ministre de l'Equipement et de l'Eau et l'ambassadrice de Chine    Gaza : Le Conseil de sécurité vote pour la création d'une force internationale    Patrimoine culturel immatériel : La candidature du Caftan marocain examinée en décembre par l'UNESCO    Dakar Fashion Week : L'élégance africaine défile    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Belkahia à cœur ouvert
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 24 - 01 - 2003

Le peintre Farid Belkahia expose ses œuvres à la galerie Al Manar à Casablanca. Ce peintre, dont le nom se confond avec l'Histoire de la peinture au Maroc, parle de sa relation au signe et récuse les propos rapportés par certains de ses confrères sur son art.
Aujourd'hui le Maroc : Que pouvez-vous dire de votre relation avec le signe ?
Farid Belkahia : Ecoutez ! Si l'on considère que la calligraphie est un signe, et si certains artistes y ont recours par souci identitaire, ça peut être légitime, mais c'est une préoccupation somme toute très limitée et qui ouvre très peu de perspectives. Les jeunes qui transforment la calligraphie en œuvre plastique oublient qu'il s'agit d'un texte qui véhicule un sens.
C'est une écriture avant tout. D'ailleurs, nous ne sommes pas la seule civilisation à s'enorgueillir d'avoir une calligraphie exceptionnelle. Les Chinois et les Japonais en font depuis des millénaires. Les hébraïques ont également une belle calligraphie, mais je ne connais aucun artiste moderne japonais, chinois ou juif qui fait de la calligraphie l'objet de son art. Ça veut dire qu'il s'agit d'une voie sans issue, un piège. Les artistes et ceux qui les encouragent à faire de la calligraphie perdent beaucoup de temps.
Oui, mais que pouvez-vous dire du signe indépendamment de la calligraphie…
C'est vrai que j'ai utilisé des signes du tifinargh (caractères de l'écriture des Touaregs, ndlr), mais dans un but très précis, en ce sens où je faisais appel à la mémoire. J'ai voulu tenir compte de ce patrimoine graphique. Ce que j'en ai fait est strictement esthétique, et ne peut pas se limiter à des significations identitaires. D'ailleurs, Le tifinargh n'est pas propre au Maroc. Il s'étend sur une zone qui comprend de nombreux pays et va jusqu'en Egypte. Le signe dans mon travail participe d'un dépouillement qui a partie liée avec ma démarche. De même qu'un objet peut être épuré jusqu'à son expression essentielle : une ligne, un corps peut être décomposé jusqu'à son apparence dépouillée : le signe. Le corps éclaté, disloqué prend souvent la forme d'un signe dans mon travail. Pareil pour le paysage. Et dans ce sens le signe est moins cette chose, telle qu'on l'appréhende généralement, que l'expression de la nature telle que je la perçois.
Vous êtes préoccupé par le corps et vous peignez sur la peau. Remplacer une toile par une peau, ce n'est pas rien…
Bien sûr que ce n'est pas rien ! Mais ce n'est pas à moi d'en expliquer la signification. Cela est du ressort des critiques et des observateurs. Tout ce que je peux vous dire, c'est comment j'en suis arrivé à la peau. C'était à une époque où je travaillais le cuivre. Un soir j'écoute à la radio tout un speech sur la crise mondiale que nous allions vivre, et que le métal du cuivre se raréfiait de plus en plus. J'en ai éprouvé une grande angoisse, de crainte de n'avoir plus de matériau sur lequel travailler. Il fallait trouver autre chose. J'ai alors pensé à la peau que j'ai travaillée pendant 4 ans sans jamais la montrer, parce qu'il fallait que je fasse connaissance avec ce nouveau matériau. Voir quelle est sa résistance, comment il se développe. La peau devient aujourd'hui rare, parce qu'elle est très utilisée par la mode. Sa qualité se dégrade aussi. Je pense que je vais aller vers un autre matériau, en l'occurrence le papier avec lequel j'ai gardé une grande familiarité grâce au dessin. Il est curieux de constater qu'il n'existe plus de moulin à papier dans des villes comme Fès, alors que tous les moulins du Sud de la France portent un fronton qui dit que le papier a été introduit par les Arabes. Le travail sur ce support-mémoire m'intéresse beaucoup.
La mémoire vous intéresserait alors plus que l'identité…
Oui, la mémoire m'intéresse, mais pas plus qu'un autre préoccupé de son histoire personnelle et de l'Histoire. Ceci pour vous dire que ne je vis pas dans le passé ! Les peintres qui considèrent que je suis un artiste passéiste, traditionaliste, archaïque, employant du “henné”, comme le dit l'un d'eux avec un certain mépris, je vais tâcher de rester poli et répondre à ces personnes : moi, je ne suis pas un plagiaire ! Et d'ailleurs, je n'ai aucune prétention. Je n'ai créé ni école, ni fondé de mouvement artistique. J'essaie tout simplement de sauver ma peau ! Si des personnes se reconnaissent dans mon travail, si elles peuvent trouver des solutions à des problèmes auxquels elles sont confrontées dans leur art, je serais alors l'homme le plus heureux sur terre !
À propos du henné, il participe à l'identité marocaine de votre peinture…
Le henné est un patrimoine mondial. Le henné est utilisé depuis plus de 5000 ans par les pharaons, par les Indiens. Je ne cherche pas en intégrant le henné à ce que ma peinture soit désignée comme marocaine. D'ailleurs, je ne comprends pas ce que veut dire une peinture marocaine. Est-ce que cela signifie qu'elle a été réalisée par un individu situé géographiquement dans un pays qui s'appelle le Maroc ? Alors pourquoi pas ! Mais qu'une œuvre porte en elle les marques d'une marocanité, je doute fort que cela soit suffisant pour être œuvre. Je n'ai pas d'angoisse identitaire. Même si j'étais en Sibérie, je continuerais à faire ce travail à condition que les moyens me soient disponibles.
Cela fait longtemps que l'on ne vous a pas vu dans une galerie nationale. Pourquoi ?
Mes rapports avec le ministère de la culture, qui est propriétaire de ces galeries, n'ont jamais été très bons. Personnellement, je n'ai aucune considération pour le ministère de la culture. Je le dis ouvertement et très franchement sans même pas avoir envie de polémiquer là-dessus. Je me contenterai de préciser : ce ministère n'est même pas capable de donner mon adresse ou mon téléphone à des personnes qui l'appellent pour cela, et je ne dois pas être le seul peintre dans cette situation !
Même en dehors des galeries nationales, l'on vous voit peu. Vous n'êtes pas un peintre prodigue ?
Je travaille beaucoup pour peu de résultats au bout du compte. Ce qui reste, ce qui est montré, ce que le public voit est infime par rapport à la masse de travail que je réalise. Des fois, je me dis que c'est normal pour que le travail ne soit pas verbeux ou bavard, pour qu'il n'y ait pas beaucoup de déchets. C'est ainsi que je manifeste mon respect pour l'art que j'exerce, mon sens de l'exigence. J'essaie de concentrer au maximum, d'atteindre l'essence de ce que je veux exprimer. En même temps je ne peux pas m'empêcher de me dire : combien d'efforts, combien d'heures de travail pour si peu de résultats !


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.