Dans un mouvement administratif inédit, les autorités territoriales de la commune de Dar Bouazza, en périphérie sud-ouest de Casablanca, ont engagé une procédure d'alerte à l'endroit de plusieurs exploitants d'établissements balnéaires — cafés, restaurants et espaces de loisir — implantés sur le rivage, leur enjoignant de libérer les portions de terrain qu'ils occupent sans fondement légal sur le domaine public maritime. Enclenchement des mises en demeure sous l'égide de la préfecture Sous l'autorité du gouverneur de la province de Nouaceur, les services préfectoraux ont entamé une première vague d'avertissements oraux, invitant les exploitants à entamer sans délai les démarches de retrait de leurs installations. Il s'agit d'une mesure destinée à mettre un terme à l'occupation illégitime du domaine maritime, bien inaliénable de l'Etat, destiné par nature à un usage collectif. Conformément à la législation en vigueur — notamment les textes relatifs au domaine public — aucune exploitation privative, qu'elle soit pérenne ou saisonnière, ne peut être tolérée sans autorisation administrative explicite, généralement sous forme d'un arrêté ministériel ou d'un contrat d'occupation temporaire à durée déterminée. Or, nombre de ces établissements opèrent dans une situation de vide juridique manifeste, usant d'installations fixes érigées sans permis ni titre. Une pression immobilière accrue sur le littoral Cette intervention incarne une démarche de restauration de la régularité foncière sur la frange côtière, qui a vu, ces dernières années, une prolifération de constructions commerciales — piscines, terrasses, entrepôts, parkings privatifs — installées sur des parcelles relevant du domaine public maritime. L'occupation de ces espaces, outre son illégalité, entrave le libre accès des citoyens au littoral, dans une zone soumise à une pression foncière soutenue et à une spéculation touristique croissante. Les autorités évoquent la nécessité de préserver l'intégrité du domaine public et de garantir l'égal accès des usagers à ce patrimoine commun, conformément à l'esprit des textes régissant l'aménagement du littoral et à la jurisprudence constante du Conseil d'Etat marocain en matière de domanialité publique. Sept établissements haut de gamme directement visés Le gouverneur de Nouaceur a, selon nos informations, donné instruction au chef du ressort administratif de Dar Bouazza de signifier des mises en demeure formelles à sept établissements de standing situés sur le front de mer. Ces espaces, spécialisés dans la restauration, le divertissement ou le bien-être, exploitent depuis plusieurs années des portions de terrain du domaine public sans disposer du moindre acte de concession ni d'autorisation conforme aux prescriptions domaniales. Les documents transmis exigent une régularisation immédiate de la situation, à défaut de quoi les contrevenants s'exposent à des mesures coercitives, y compris des ordres de démolition administrative, exécutés en vertu des pouvoirs dévolus au wali dans le cadre du Code des libertés publiques et de la police spéciale du domaine. Risque d'éviction et interrogations sur les compensations La phase suivante, attendue dans les prochains jours, pourrait consister en des opérations concrètes de libération des emprises illégales, avec mobilisation éventuelle des services techniques municipaux et des forces de l'ordre. Toutefois, des voix s'élèvent pour plaider en faveur de mécanismes de compensation à l'endroit des opérateurs disposant, dans certains cas, de documents partiels — anciens contrats arrivés à expiration, autorisations provisoires non renouvelées —, qui pourraient justifier une instruction individualisée. Tensions entre rigueur administrative et inertie passée Cette campagne de réappropriation survient après une série de revirements observés ces dernières années, qui ont nourri la défiance d'une partie de la société civile. Plusieurs acteurs associatifs et élus locaux s'étonnent de l'inconstance de l'action publique, relevant que des tentatives antérieures de libération du littoral ont été suspendues sans justification claire, malgré des constats d'irrégularité documentés. Certains pointent une gestion à géométrie variable du domaine public, mettant en doute la volonté réelle de l'administration de faire prévaloir l'intérêt général face à des projets privés à forte rentabilité. D'autres appellent à un audit foncier indépendant, appuyé par la Direction des domaines de l'Etat et l'Agence nationale de la conservation foncière, afin de cartographier de manière exhaustive les empiètements en cours. Dans l'intervalle, la préfecture de Nouaceur poursuit ses opérations de rappel à la loi, déterminée à faire cesser toute occupation abusive du domaine public maritime, sans égard pour le statut social ou le poids économique des contrevenants.