Les deux opérateurs marocains confient à des sociétés communes le déploiement d'infrastructures passives, sous haute vigilance concurrentielle. L'Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) a donné son assentiment à la création de deux entités juridiques autonomes par les sociétés Itissalat Al-Maghrib (IAM) et Wana Corporate (WANA), dont l'objet exclusif sera le développement et la gestion d'infrastructures passives dans le domaine des télécommunications. À l'issue d'un examen méticuleux, consigné dans la décision ANRT/DG/N°08/2025 rendue publique ce mercredi, le régulateur estime que cette double opération de concentration économique «ne soulève pas, au stade actuel, de préoccupations du point de vue de la concurrence quant à sa compatibilité avec les marchés concernés». Deux sociétés communes voient le jour Le projet notifié par IAM et WANA repose sur la création parallèle de deux structures distinctes. La première, désignée dans le dossier sous le nom fonctionnel de FiberCo, aura pour mission exclusive «le déploiement d'infrastructures passives de réseaux à fibres optiques jusqu'aux clients». La seconde, nommée TowerCo, sera consacrée «au déploiement d'infrastructures passives d'accueil des équipements de téléphonie mobile des opérateurs de télécommunications». Dotées de capitaux propres respectifs de 3 milliards de dirhams pour FiberCo et de 1,4 milliard de dirhams pour TowerCo, ces entités opéreront en toute indépendance décisionnelle, conformément aux prescriptions légales. «Ces sociétés disposeront, chacune, de ressources humaines, matérielles et financières propres et suffisantes pour assurer leur autonomie. Elles seront soumises aux règles d'objectivité et de non-discrimination», précise la décision. Le régulateur a souligné que ni FiberCo ni TowerCo n'interviendront sur les marchés de détail et qu'elles devront traiter leurs maisons-mères «sans priorité ni privilège, à l'instar des autres opérateurs de télécommunications». Une structure encadrée par des garanties juridiques L'ANRT rappelle que la création de telles sociétés communes est strictement encadrée par la loi n°24-96 relative à la poste et aux télécommunications. Son article 22Bis oblige «les exploitants de réseaux publics de télécommunications à mettre à disposition leurs infrastructures dans des conditions techniques et financières, objectives, proportionnées et non discriminatoires». Afin de prévenir tout risque de verrouillage des marchés ou d'échange d'informations sensibles entre concurrents, les sociétés mères ont formulé une série d'engagements détaillés, dont «la séparation fonctionnelle des systèmes d'information», «l'absence de transfert d'actifs vers les entreprises communes» et «la transparence tarifaire». L'ANRT a par ailleurs tenu compte des observations reçues pendant la période de consultation publique. Médi Telecom (MDT), troisième opérateur national, a exprimé sa vigilance quant à la neutralité de traitement. L'agence précise que «les engagements proposés par les Sociétés Notifiantes sont suffisants à ce stade et devront être transcrits comme engagements de la FiberCo et de la TowerCo». Un équilibre concurrentiel maintenu Sur le plan concurrentiel, l'ANRT souligne que FiberCo ne modifiera pas l'équilibre actuel du marché FTTH, en raison notamment de l'absence de transfert d'infrastructures et de la pluralité des acteurs actifs. «La création de FiberCo ne conduira pas à la disparition d'un acteur concurrent existant et ne viendrait pas altérer la structure concurrentielle desdits marchés», lit-on dans la décision. Concernant TowerCo, bien qu'IAM et WANA détiennent déjà ensemble plus de 65 % des sites passifs de téléphonie mobile, l'Agence rappelle que «les conditions d'accès auxquelles seront assujetties les infrastructures seront strictement encadrées». La décision se conclut en ces termes : «L'ANRT autorise l'opération de concentration économique telle que notifiée par les Sociétés Notifiantes». Le document est signé par Az-El-Arabe Hassibi, directeur général de l'Agence nationale de réglementation des télécommunications. La constitution de ces deux sociétés communes, attendue de longue date, pourrait, sans préjudice des équilibres concurrentiels, étendre la couverture numérique du Royaume et rationaliser les investissements des opérateurs, pourvu que l'ensemble des engagements soient scrupuleusement respectés.