Un séminaire de haut niveau consacré aux chaînes de valeur atlantiques s'est tenu lundi à la résidence de l'ambassadeur du Maroc à Dakar, réunissant des personnalités politiques, diplomatiques, économiques et universitaires du Maroc, du Sénégal, de la Mauritanie et des Nations unies, rapporte l'agence de presse africaine APA. Placée sous le thème «Vers des chaînes de valeur intégrées pour une Afrique atlantique émergente», la rencontre, organisée par l'ambassade du Maroc au Sénégal en partenariat avec l'Institut Emergence, se réfère explicitement à l'Agenda 2063 de l'Union africaine et à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Elle avait pour dessein de nourrir l'intégration régionale, la souveraineté économique et la connectivité continentale. Trois démarches marocaines structurantes L'ambassadeur Hassan Naciri a ouvert la cérémonie en saluant la présence de figures éminentes issues des cercles institutionnels sénégalais. Il a souligné que «l'Afrique, notamment son versant atlantique, se prépare à occuper une place toujours plus centrale dans le mouvement mondial», narre la même source. Le diplomate a ensuite détaillé trois démarches portées par le Maroc pour structurer l'espace atlantique africain : l'Initiative des Etats africains atlantiques, qui fédère 23 pays littoraux autour de priorités telles que la sécurité maritime, l'économie bleue et l'interconnexion régionale ; le projet de gazoduc Afrique-Atlantique, corridor énergétique d'envergure traversant treize Etats ; et l'Accès atlantique pour les Etats sahéliens, pensé pour relier les pays enclavés aux grands axes économiques. M. Naciri a mis en exergue l'importance d'infrastructures concrètes comme le port atlantique de Dakhla, le corridor Tanger-Lagos ou la voie express Tiznit-Dakhla, les qualifiant de «signes tangibles de l'engagement du Royaume pour une Afrique atlantique unifiée et connectée.» Une Afrique souveraine et interdépendante Représentant le président de l'Assemblée nationale du Sénégal, M. Amadou Ba a pris la parole au nom d'El Malick Ndiaye. Il a lancé un appel solennel aux parlementaires, les exhortant à accompagner ce mouvement continental : «L'histoire nous appelle à rédiger une nouvelle grammaire économique, portée par les Africains eux-mêmes, par leurs complémentarités, leurs ressources et leur aspiration collective à la dignité.» Selon lui, «l'Afrique atlantique peut devenir un terrain d'expérimentation pour une souveraineté africaine partagée, pluraliste et cohérente.» Ancien président de l'Assemblée nationale du Sénégal, Moustapha Niasse a prononcé le discours magistral en louant «l'élan continental poussé et incarné par le Maroc sous la direction remarquable du roi Mohammed VI.» Il a ajouté : «Lorsque Sa Majesté prendra connaissance des conclusions de ce séminaire, il constatera une fois de plus que nous sommes nombreux – amis du Maroc – à marcher à ses côtés et aux côtés de nos propres chefs d'Etat dans cette entreprise», rapporte APA. De Casablanca à Lagos : les corridors de demain Aminata Maïga, coordinatrice résidente du système des Nations unies au Sénégal, a rappelé le rôle stratégique des corridors atlantiques reliant Casablanca à Lagos, en passant par Nouakchott, Dakar, Abidjan et Accra. Selon elle, ces trajets doivent devenir «plus que de simples routes logistiques : ils doivent former l'ossature du développement régional.» Elle a insisté sur le fait que «l'intégration n'est pas une affaire technique ; elle procède d'une décision politique, d'un investissement dans la durée et d'un pari sur la coopération contre la fragmentation.» Entre potentialités et entraves systémiques Le directeur de l'Institut Emergence, M. Moubarack Lo, a décrit l'Afrique atlantique comme «un espace stratégique au cœur des recompositions géoéconomiques et géopolitiques contemporaines.» Le corridor Tanger-Lagos, selon lui, incarne «davantage qu'un projet technique : une vision panafricaine où la géographie des infrastructures devient celle d'un destin partagé.» Il a néanmoins alerté sur plusieurs entraves : fragilité des chaînes de valeur régionales, dépendance excessive aux matières premières brutes, insécurité maritime, dispersion institutionnelle, coûts logistiques prohibitifs — estimés à «40 à 60 % du prix final des marchandises échangées entre pays africains.» Un appel à la construction d'une architecture souveraine Au terme de la session inaugurale, les participants ont unanimement appelé à «bâtir nos propres infrastructures, former nos compétences, organiser nos marchés et relier nos ports et zones industrielles dans une logique panafricaine propre à l'Atlantique.» L'ambition exprimée : jeter les fondations d'un espace africain atlantique intégré, concurrentiel et résilient, fidèle à la vision royale, en harmonie avec les objectifs de la ZLECAf et de l'Agenda 2063 de l'Union africaine.