À la réception d'une lettre adressée par le président Emmanuel Macron à son Premier ministre, les autorités algériennes ont publié un communiqué amer, jeudi 7 août, dont la structure accumulative et le lexique accusatoire démontrent la solitude d'un régime aux abois. L'Algérie affirme avoir procédé à une «étude méticuleuse» de la lettre présidentielle française et des «précisions qui l'accompagnaient», pour aussitôt s'en remettre à une série de «remarques préliminaires importantes». Cette précaution rhétorique annonce le déploiement d'un argumentaire rigide fondé sur le rejet intégral de la perspective française. À propos de l'analyse française relative à la détérioration des relations bilatérales, publiée la veille, la diplomatie algérienne estime que celle-ci «se fonde uniquement sur le récit de la partie française, sans tenir compte ni du réel ni de la vérité». Elle accuse Paris d'avoir «délibérément renoncé à toute présentation objective», préférant «le discours à la réalité, la posture à la rigueur». La France, à en croire Alger, est aussi accusée d'avoir «éludé la totalité des données officielles publiées à chaque étape de la crise», alors que «les autorités algériennes, pour leur part, ont toujours répondu avec clarté, méthode et rigueur, dans le respect du principe de traitement d'égal à égal». La dénonciation des engagements trahis Le cœur du texte s'en prend longuement à ce qu'Alger présente comme des manquements répétés aux accords bilatéraux : «la France a enfreint pas moins de trois accords : l'accord algéro-français de 1968 sur la circulation des personnes, celui de 1974 sur le regroupement familial, et enfin l'accord spécifique de 2013 sur les documents de voyage diplomatiques». La partie algérienne accuse son ancienne puissance coloniale de «s'être affranchie de ses obligations en y substituant des pratiques unilatérales», rompant avec «l'esprit même des engagements multilatéraux auxquels elle prétend adhérer». La politique des visas est décrite comme «discriminatoire, arbitraire et systématiquement défavorable aux ressortissants algériens, y compris les titulaires de passeports diplomatiques». Le communiqué souligne par ailleurs que «jamais la France n'a amorcé la réflexion de négocier avec l'Algérie un accord bilatéral sur les régimes d'entrée des détenteurs de titres diplomatiques», tout en affirmant que «les pratiques imposées unilatéralement n'ont aucun fondement juridique». Un vocabulaire martial contre les expulsions Le ton se durcit encore lorsque le texte aborde la politique d'éloignement : la procédure dite «visa contre laissez-passer» est dénoncée comme «une instrumentalisation grossière de l'outil consulaire à des fins d'expulsion expéditive». Le ministère y voit une «dérive incompatible avec la lettre et l'esprit de la Convention européenne des droits de l'homme de 1950». Alger accuse, en outre, Paris de «mépriser les droits des citoyens algériens, en les exposant à des pratiques administratives et judiciaires indignes d'un Etat de droit». Le texte insiste : «La France doit à tout moment et en tout lieu garantir la protection consulaire prévue par le droit international». La gravité du ton culmine dans cette formule : «La France a choisi la voie de la menace, de l'intimidation, et du chantage, oubliant que l'Algérie ne cèdera jamais à la pression, quelle que soit sa forme ou son origine». Une obstination qui compromet toute réciprocité Le ministère rejette toute responsabilité dans les difficultés rencontrées par les diplomates français en Algérie : «C'est la France qui a unilatéralement suspendu l'agrément des agents consulaires algériens, sans justification, en contradiction avec les usages diplomatiques les plus élémentaires». Il affirme encore que «la levée de cette suspension dépend uniquement de la volonté française», tout en rappelant que «les autorités algériennes ont notifié officiellement leur position à Paris», sans recevoir de réponse équivalente.