Maroc et Sahara : Townhall dévoile l'alliance inquiétante entre le Polisario et l'Iran    Le Roi Mohammed VI ordonne au Conseil Supérieur des Oulémas d'émettre une fatwa au sujet de la Zakat    OMPIC : Plus de 6.500 créations d'entreprises à Marrakech-Safi au S1-2025    Maroc-Turquie : Aller au-delà du schéma classique, importateur-exportateur    Malí lleva a Argelia ante la Corte Internacional de Justicia por el derribo de un dron    Tanger : Lancement de la Stratégie nationale pour la conservation des rapaces    Diplomatie sanitaire : Un nouvel élan porté depuis l'Afrique    Mali files ICJ complaint against Algeria over drone incident in Kidal region    Sahara : The United Kingdom reaffirms support for the Moroccan autonomy plan    Niamey fonde Niger Air International, le nouveau transporteur national, grâce à l'appui technique et managérial du Maroc    DP World connecte les hubs d'Agadir et Casablanca aux ports de Londres et Anvers    Xi Jinping et Kim Jong Un réaffirment la solidité de l'alliance stratégique entre la Chine et la Corée du Nord    Le Mali saisit la Cour internationale de justice contre l'Algérie pour la destruction d'un drone    Liban : La Finul dénonce l'attaque israélienne contre son personnel    Qualifications CDM 26 / Europe : L'Allemagne battue et lanterne rouge de son groupe !    LDC (F) CAF/UNAF : L'AS FAR écrase Afak d'Algérie, dans le viseur la qualification !    Mondial 2026 : Les Lions de l'Atlas visent la qualification face au Niger    Maroc - Tunisie : Les choix personnels de Kais Saïed attisent la crise    Le roi Mohammed VI accorde sa grâce à 681 condamnés à l'occasion de l'Aïd Al Mawlid Annabawi    Le "Middle East Council on Global Affairs" dévoile sa recette pour résoudre la crise Maroc-Algérie : interrompre les querelles médiatiques et établir un canal direct de prévention des crises    Le dirham se déprécie légèrement face au dollar et à l'euro    Le Maroc enregistre la plus forte expansion du marché du tabac manufacturé en MENA avec +15,5 % par an et 80 % de la production    Les prévisions du vendredi 5 septembre 2025    David Beckham fête ses 50 ans à Marrakech    David Beckham fête ses 50 ans à Marrakech    Une fatwa exhaustive et un portail dédié pour mieux cerner les règles de la Zakat    Accidents de route: près de 7,9 MMDH versés en indemnisations en 2024    FAO: L'indice des prix des produits alimentaires reste inchangé en août    Italie : Youssef Maleh parti pour chauffer le banc de Lecce    Bilal El Khannouss, nouveau Jamal Musiala de la Bundesliga ?    Etats-Unis : une nouvelle vague de Covid-19 frappe la Californie    Températures prévues pour le samedi 06 septembre 2025    Ligue Europa : vitrine idéale pour une vingtaine de marocains    L'OMM alerte sur un « cercle vicieux » entre pollution atmosphérique et réchauffement climatique    USA : Trump va renommer le département de la Défense en "ministère de la Guerre"    PSG : tensions internes entre Zabarni et Safonov sur fond de guerre en Ukraine    Sous leadership royal, le Maroc affirme sa voix à la Ligue arabe    Qualifications africaines: Le match contre le Niger, décisif pour se qualifier au Mondial 2026 (Joueurs de l'équipe nationale)    Sahara : Le Royaume-Uni réaffirme son soutien au plan marocain d'autonomie    Législatives 2026 : Le PSU contre la participation des MRE d'Israël    Aïd Al Mawlid Annabawi : Grâce Royale au profit de 681 personnes    La victoire de la Chine sur le fascisme en images à Rabat    Rétro - Verso : Bab Maâlka, suspendue aux confins de l'Atlantique et de l'exil    Gad Elmaleh revient à Casablanca avec son spectacle « Lui-même »    The Jazz au Chellah festival relocates and becomes Jazz à Rabat    La montée et la chute de la Maurétanie, un royaume amazigh oublié    Le Maroc et l'Azerbaïdjan approfondissent leurs relations culturelles lors d'un entretien à Rabat en vue du 11e Salon international du livre de Bakou    Buraïda, capitale saoudienne des dattes, célèbre le patrimoine et la créativité lors d'un carnaval mondial    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Samir Amin, une pensée originale toujours vivante
Publié dans Challenge le 06 - 07 - 2019

Sortir des sentiers battus. Oser s'aventurer vers de nouveaux espaces de réflexion non exclusivement théoriques, telle est la voie qu'avait choisie Samir Amin, dans son engagement intellectuel et politique.
Samir Amin, ce «Marx du Tiers Monde», a incontestablement marqué la pensée de nombreux économistes, au Nord et au Sud. Sa pensée demeure incontournable dans l'étude des formations sociales connaissant une situation économique et sociale particulière et dont la compréhension est inséparable de l'analyse de l'économie mondiale.
Après la deuxième guerre mondiale, deux grands blocs s'étaient constitués. A l'Ouest, un monde «libre» occupait par la force une bonne partie du monde, exploitait à son profit les richesses naturelles, et déclarait avoir une mission de «civilisation» des autres peuples, «enfermés dans l'archaïsme», pour ne pas dire tout simplement réduits à «l'état sauvage». A l'Est, le monde «communiste» semblait avoir pour mission de «mettre fin à l'exploitation de l'homme par l'homme» et ouvrir la voie vers des «sociétés égalitaires sans classes». Ces deux pôles devaient être attractifs vis-à-vis du reste du monde.
C'est le contexte de la «guerre froide», en fait pas si froide dans certaines régions du monde où les conflits armés continuaient à opposer violemment les alliés des uns et des autres. Ce n'est qu'avec l'émergence des mouvements de libération, les premières vagues de décolonisation, la naissance de nouveaux Etats, qu'un nouveau bloc devait émerger avec une volonté de non alignement et de revendication d'un nouvel ordre économique international, un ordre plus juste. C'est dans ce contexte historique global que l'on devrait situer la naissance de la pensée de Samir Amin qui est d'abord une réaction profondément critique, en rupture avec le suivisme idéologique prédominant à l'époque. Qu'il s'agisse du schéma rostowien basé sur les fameuses cinq étapes devant permettre le «take off» (décollage) ou du schéma stalinien, caractérisé aussi par un étapisme universel, pour Samir Amin, ces deux voies étaient toutes les deux sans issues car tout à fait inadaptées aux formations sociales du Tiers Monde.
Pour Samir Amin et d'autres penseurs qui ont partagé la même démarche (Raul Prebisch, Paul Sweezy, Paul Baran, André Gunder Frank, Giovanni Arrighi …), il est nécessaire de revenir à la réalité dont l'analyse concrète peut devenir la première source de compréhension et de conceptualisation. Les Etats «décolonisés», mais toujours sous domination impérialiste, subissent une division internationale du travail les maintenant dans la «périphérie» par rapport au «centre» qui «siphonne» la plus-value créée dans les formations sociales structurellement dépendantes.
« Le phénomène de la délocalisation industrielle est aussi un indicateur important du processus en cours de restructuration du capitalisme mondial »
Karl Marx avait axé son analyse sur les rapports des classes sociales, essentiellement à l'intérieur des frontières nationales, en Europe, malgré l'emprise coloniale britannique sur le reste du monde, à cette époque. L'extension du capitalisme dans le monde était même perçue objectivement comme un «progrès universel». Le développement du mode de production capitaliste dans le monde devait bouleverser/balayer les autres «modes de production archaïques ou primitifs». Ce n'est que plus tard, que cette position changera chez K. Marx.
Amin resitue ces rapports au niveau mondial pour expliquer le phénomène du «sous-développement» comme une résultante d'abord de «l'échange inégal» et ensuite du «développement inégal», en tant que processus d'accumulation permettant le transfert de la plus-value créée collectivement dans les formations sociales de la périphérie/du Sud vers le centre/Nord. Le maintien ou la reproduction du statu quo se traduirait ainsi inévitablement par un «développement du sous-développement». La plus-value mondialement créée est partagée par les classes sociales dominantes dans le centre et la périphérie, à travers un système d'alliance complexe.
L'émergence des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) peut être considérée comme une tentative de rupture de cet «ancien ordre international injuste» pour ouvrir la voie vers des rapports internationaux plus équitables. La guerre commerciale à laquelle se livrent actuellement la Chine et les Etats Unis d'Amérique semble bien illustrer cette nouvelle réalité internationale qui a succédé à la bipolarité pour céder la place à l'unipolarité, synonyme de domination impériale (américaine), avec une difficile acception de la multipolarité, elle-même simple étape vers de nouvelles dynamiques à contours imprévisibles.
Aujourd'hui, l'«économie monde» se caractérise, de plus en plus, par la domination effective des multinationales et des institutions financières internationales (IFI), avec une érosion continue des traditionnelles souverainetés nationales des Etats, aussi bien sur le plan politique que sur le plan économique. La crise économique et financière mondiale de 2008 a bien révélé le rôle négatif, voire néfaste, des paradis fiscaux, y compris sur les Etats du centre/Nord. Le phénomène de la délocalisation industrielle est aussi un indicateur important du processus en cours de restructuration du capitalisme mondial. Cette restructuration porte actuellement principalement sur des segments à faible valeur ajoutée, avec un emploi massif de la main d'œuvre à faible coût.
La mondialisation libérale en cours est d'abord une mondialisation du capital où la dimension sociale est nivelée vers le bas. Si, au Nord/centre, elle se traduit socio-économiquement par un chômage structurel et chronique, avec une remise en cause des acquis sociaux et l'émergence des mouvements xénophobes, au Sud, elle se concrétise surtout par une réduction du coût de travail et des résistances sociales actuellement faibles.
Ce redéploiement du capitalisme, au niveau mondial, interpelle fortement les êtres humains assoiffés de justice, à contribuer au développement d'un nouvel esprit critique pour maintenir allumée la flamme de l'espoir, et œuvrer à d'autres alternatives où l'humanité, au-delà des frontières nationales, pourrait tisser de nouvelles formes de solidarité. Une solidarité qui dépasse ces «guerres de civilisations» dans lesquelles semblent s'enfermer les «théoriciens réalistes» du chaos permanent (1).
(1) Samuel P. Huntington : «Le choc des civilisations». Editions Jacob. 1997. Œuvre à travers laquelle l'auteur considère les différences culturelles comme étant les principales causes des conflits mondiaux actuels, pour mieux occulter les vraies contradictions, expression des intérêts économiques et sociaux.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.