Comme en Occident, sur les grandes artères de Casablanca, les trottinettes font le bonheur de certains citadins. Sans casque, roulant à vive allure, ces petites machines soulèvent plusieurs questions... Décryptage ! Sur les grandes artères de Casablanca, les machines à deux petites roues ne passent pas inaperçues. Donnant un certain style aux conducteurs, ces engins, souvent pilotés sans casque ni règles, se fraient un chemin entre les voitures, les piétons et les cyclistes. Ainsi, ce nouvel engin de mobilité urbaine, emprunté aux grandes capitales occidentales, a séduit une jeunesse marocaine en quête de rapidité et d'autonomie dans une ville où les embouteillages font partie du quotidien. De plus en plus présentes à l'entrée des gares, à proximité des bureaux, elles s'imposent aujourd'hui aussi comme un choix pragmatique pour éviter les taxis saturés et les longs périples dans les trams. Cependant, au-delà des multiples commodités, cette nouvelle offre de mobilité cache une réalité plus complexe. Sous cette liberté apparente se dissimule un vide juridique préoccupant. Ni code de la route précis, ni obligation de port du casque, ni assurance dédiée : les trottinettes circulent dans un flou total. En France, par exemple, elles sont limitées à 25 km/h, interdites sur les trottoirs et soumises à une réglementation claire depuis 2019. À Casablanca, la réglementation tarde encore. Lire aussi | Mobilité urbaine : Laftit active le plan de réforme « On les voit rouler à contresens, doubler par la droite, ignorer les feux rouges, sans que personne n'intervienne », nous confie un taxi. Rappelons que ces derniers sont exposés sans couverture. Côté assurance, le DG de AtlantaSanad, Jalal Benchekroune, nous a confirmé que pour l'heure, il n'existe aucun produit d'assurance dédié à ces engins. Une révolution sans règles ? À Casablanca seulement, les magasins vendant ces engins électriques fleurissent de toutes parts. Le prix variant entre 3 000 et 4 500 DH, ces trottinettes sont très accessibles. Peu répandues, des start-up locales proposent des flottes de trottinettes en libre-service, parfois sans demander d'autorisation aux autorités locales. Les usagers, eux, s'improvisent conducteurs sans formation. Au Maroc, ce marché est à ce jour en constante expansion. Xiaomi, l'un des leaders du secteur, propose des modèles populaires conçus pour les trajets urbains, à un prix compétitif et avec une autonomie de 45 km. D'autres enseignes se positionnent sur le segment plus "premium", comme Dualtron ou encore Ducati, avec des modèles à haute performance capables d'atteindre 100 km/h et offrant une autonomie pouvant aller jusqu'à 170 km. Lire aussi | Fiat Maroc : trois nouveaux modèles pour une mobilité plus verte Alors que la ville multiplie les projets de mobilité durable – tramway, voies cyclables, bus à haut niveau de service – elle laisse une brèche béante en ne légiférant pas sur un outil de déplacement déjà bien implanté. En attendant une réglementation effective, on est juste au stade d'un projet de loi. Le texte prévoit, dans son premier article, des infractions à l'encontre des utilisateurs de trottinettes électriques, notamment : « la conduite d'un vélo à moteur, d'une motocyclette, d'un tricycle à moteur ou d'un quadricycle à moteur dépourvu de carrosserie, sans l'utilisation d'un casque homologué. » Les infractions sont de divers ordres : « le non-respect par le conducteur d'un véhicule de l'arrêt obligatoire imposé par un panneau "Stop" ou un feu rouge ; l'utilisation du téléphone ou le fait de parler en le tenant en main pendant la conduite, ou de tout autre appareil remplissant la même fonction. » De plus, le projet de loi inclut des mesures coercitives, telles que la mise en fourrière des trottinettes en infraction. Par exemple, les engins qui circuleraient sur une autoroute sans atteindre la vitesse minimale de 60 km/h pourraient être saisis. En attendant, la micro-mobilité a mauvaise réputation, souvent perçue comme un terrain propice aux trublions qui prennent un malin plaisir à perturber l'ordre. « Sur la question de la mobilité, il faut redéfinir les voies et pistes cyclables, et cela manque dans nos quartiers et villes », alerte l'urbaniste Tariq Akdim.