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HCP/Banque mondiale/Nations unies : Quelle réponse immédiate à la crise Covid-19 au Maroc ?
Publié dans EcoActu le 17 - 08 - 2020

Le Haut-commissariat au Plan, le Système des Nations Unies au Maroc et la Banque mondiale ont développé conjointement une « Note Stratégique » pour approfondir la compréhension de l'impact socio-économique de la pandémie du COVID-19 au Maroc à travers une approche unique, inclusive et collaborative et formuler des recommandations stratégiques basées sur des données fiables afin que personne ne soit laissé pour compte. Les détails.
L'économie du Maroc est d'ores et déjà affectée par l'effondrement économique global, qui touche notamment l'Europe, son principal partenaire commercial. Les mesures de confinement pour faire face à la propagation de la pandémie montrent elles aussi des effets négatifs rapides sur l'économie. Ces circonstances se traduisent par des défis sans précédent pour le pays qui devait déjà faire face à une année agricole marquée par la sécheresse et laisse entrevoir que l'économie marocaine devrait fortement souffrir de l'impact négatif de la pandémie.
Selon le HCP, la croissance économique n'a pas dépassé 0,1% au premier trimestre de l'année. Cette faible croissance est imputable à l'accentuation de la baisse de la valeur ajoutée agricole à -5% et au ralentissement de l'industrie et des services marchands.
Au deuxième trimestre 2020, l'économie marocaine, sous confinement strict de la population pendant près de 10 semaines sur 13, a été confrontée à une baisse de la demande intérieure. La consommation des ménages, en volume, se serait repliée de 6,7%. Cette baisse aurait, particulièrement, concerné les dépenses des ménages en biens manufacturés, notamment celles de l'habillement et d'équipement ainsi que celles du transport, de la restauration et des loisirs. La demande extérieure aurait également flanché, entraînant une baisse de 25,1% du volume des exportations. Les importations se seraient, pour leur part, infléchies de 26,7%, impactées par le recul des achats des biens d'équipement, des produits énergétiques, des biens de consommation, des produits bruts et des demi-produits. Dans ces conditions, le repli du PIB aurait atteint -13,8% par rapport à la même période de 2019.
Par branche d'activité, la baisse de la valeur ajoutée se serait établie à -6,1% au deuxième trimestre 2020, dans l'agriculture, sous l'effet de la sécheresse. Le secteur tertiaire, principal moteur de la croissance économique, aurait régressé de 11,5%, pâtissant de la contraction des activités commerciales, de transport, d'hébergement et de restauration. Dans le secteur secondaire, les valeurs ajoutées de la construction, de l'électricité, du textile et des industries électriques et mécaniques auraient sensiblement diminué. Cette situation aurait particulièrement pénalisé les activités des très petites et moyennes entreprises. Selon l'enquête premier passage, réalisée par le HCP en avril 2020 auprès des entreprises, 72% et 26% respectivement des unités de production en arrêt d'activité de façon temporaire ou définitive en avril ont été des TPE (très petites entreprises) et des PME (petites et moyennes entreprises).
En revanche, les entreprises opérant dans les mines, l'agroalimentaire et les industries chimiques auraient mieux résisté face aux effets de la pandémie. Les services non marchands auraient été également dynamiques, permettant ainsi d'amortir partiellement la baisse des autres activités.
Au troisième trimestre 2020, le repli de l'activité s'atténuerait progressivement, pour se situer à -4,1%, au lieu de -13,8% au deuxième trimestre. Ce mouvement serait principalement attribuable à la reprise des activités du commerce, du transport et des industries manufacturières. Au mois de juillet 2020, la deuxième enquête réalisée par le HCP auprès des entreprises a révélé que 86% de celles qui ont arrêté leurs activités pendant le confinement ont repris totalement et/ou partiellement leurs activités après le déconfinement. La reprise d'activité en rythme normal a concerné 40% des grandes entreprises, 35% des PME et 31% des TPE.
Sur l'ensemble de l'année 2020, l'économie marocaine devrait connaître une récession, la première depuis plus de deux décennies, sous l'effet conjugué de la sécheresse et de la pandémie. En effet, selon les prévisions annuelles du HCP, le PIB connaîtrait une contraction de 5,8% qui serait accompagnée par un creusement du déficit budgétaire à 7,4% du PIB. Le déficit courant devrait également s'aggraver, pour atteindre 6,9% du PIB.
Le retour de la croissance vers son sentier d'évolution s'opérerait progressivement à partir de 2021, avec une hausse prévue du PIB de 4,4% par rapport à 2020. Les activités non agricoles se redresseraient, affichant une progression de 3,6%, en ligne avec la reprise de la demande intérieure et extérieure, alors que le retour des conditions climatiques de saison favoriserait une hausse de la valeur ajoutée agricole.
Les différentes prévisions des organismes financiers internationaux, notamment la Banque mondiale et le Fond Monétaire International rejoignent globalement les projections du HCP. L'économie marocaine subirait le double impact des chocs économiques intérieurs et extérieurs.
Selon la Banque mondiale, le PIB réel diminuerait de 4% en 2020. Bien que peu de secteurs soient épargnés, cette contraction est notamment due à la chute de la production des biens et services, la réduction des exportations, la perturbation des chaînes de valeur mondiales ainsi qu'au déclin du tourisme sous l'effet de la fermeture des frontières et des mesures restreignant la mobilité.
Les déficits jumeaux du Maroc devraient se creuser, mais rester gérables. En dépit de la baisse des importations, le déficit du compte courant s'accentuerait pour atteindre, selon les estimations de la Banque mondiale, 8,4% en 2020, en raison du fort déclin des exportations, des recettes touristiques et des transferts de fonds.
En conséquence, le déficit budgétaire global se creuserait atteignant 7,5 % du PIB en 2020, un pourcentage similaire à celui projeté par le HCP et supérieur de près de quatre points aux prévisions antérieures à l'épidémie. Les dettes publique et extérieure augmenteraient également, mais demeureraient soutenables.
Quid de l'impact social ?
Au cours des vingt dernières années, le Maroc a réussi une réduction significative de la pauvreté monétaire, passée de 15.3% en 2001 à 4.8% en 2014 selon le HCP. Cependant, les nouvelles estimations de la Banque mondiale, basées sur le revenu par habitant, indiquent que l'incidence de la pauvreté[1] pourrait atteindre 6.6% en 2020. Par ailleurs, en raison de la crise économique et sociale déclenchée par le COVID-19, la proportion de personnes « vulnérables à la pauvreté » et/ou « pauvres » pourrait passer de 17,1% de la population en 2019 à environ 19.87% en 2020, soit 1,058 million de personnes additionnelles.
Toutefois, des évaluations plus précises devraient être conduites pour mieux comprendre les effets de cette crise sur la pauvreté multidimensionnelle et les différents segments de la population et de l'économie marocaine. L'impact socio-économique de la crise sera sans doute ressenti en premier lieu et durement par les travailleurs du secteur informel qui représentent une grande majorité des marocains actifs et populations étrangères (migrants, réfugiés), et qui sont généralement employés dans des secteurs particulièrement vulnérables à la crise, comme le secteur du tourisme ou des transports, la vente au détail, ou encore la « gig économie »[2] mais également par tous ceux dont le travail ne peut pas se faire à distance.
Comme l'illustre le tableau ci-dessous, la crise risque d'affecter négativement l'emploi dans de multiples secteurs économiques, en raison de leurs interconnections (ex. tourisme et agriculture) avec également des implications en matière de sécurité sociale, d'égalité de genre, d'environnement, et de stabilité macroéconomique.
Face aux effets socioéconomiques de la crise, quelle est la réponse du Maroc ?
Outre des mesures de santé publique strictes qui ont permis au pays de réagir rapidement contre l'évolution de la pandémie, le Maroc a également mis en place le Fonds national COVID-19 (d'un montant de près de 3,3 milliards USD à la fin Mai) afin d'atténuer les impacts de la pandémie sur les entreprises et les ménages vulnérables tout en permettant des allocations de santé plus élevées. En plus des mesures monétaires, il pourrait permettre d'éviter la faillite d'un bon nombre d'entreprises, notamment les PME et sauver des emplois. Un comité de veille économique (CVE) a été mis en place au niveau du Ministère de l'Economie, des Finances et de la Réforme Administrative, chargé, d'une part, de suivre l'évolution de la situation économique à travers des mécanismes de suivi et d'évaluation rigoureux et, d'autre part, d'identifier les mesures appropriées en termes de soutien aux secteurs impactés. Le CVE a ainsi décidé d'un plan d'action à exécuter jusqu'à fin juin avec une première série de mesures et prépare un plan national de relance. Le pays a également préparé un projet de loi de finances rectificative, afin de rééquilibrer les comptes publics et soutenir les secteurs et les catégories fortement affectés par la crise.
Pourquoi est-il important de cibler les populations vulnérables ?
Le Maroc, à l'instar de nombreux autres pays dans le monde, peut tirer des enseignements de la mise en place en 1983-84 de programmes d'ajustement structurel (PAS), dont l'impact négatif sur les secteurs sociaux a demandé un effort de plus de 30 ans pour tenter de réduire les inégalités engendrées. Toutefois, la crise actuelle revêt un caractère unique qui remet également en question la viabilité et la priorité des réformes positives engagées par le pays sur le plan social face à une crise économique qui demandera probablement une réallocation des ressources financières. Le renforcement de la protection sociale semble alors être une réponse appropriée et viable aux impacts négatifs du COVID-19 sur les populations vulnérables opérant dans les différents segments de l'économie marocaine. Par ailleurs, la vulnérabilité des populations face à la crise concerne également l'accès aux services de base, en particulier la santé et l'éducation. A cet égard, l'UNICEF souligne que la priorité donnée au COVID-19 dans la réponse sanitaire peut affecter négativement l'accès aux soins de santé réguliers et primaires (vaccination, suivi de grossesse, etc.) ou encore la continuité de l'enseignement, déjà inégale entre les secteurs privé et public et entre les zones rurales et urbaines.
L'identification des personnes en situation de vulnérabilité multidimensionnelle est un élément clé de la réponse à la crise. Le Maroc dispose d'ores et déjà, à travers le dispositif du RAMED, d'une première base de données importante pour l'identification des personnes les plus vulnérables aux effets de la crise. Celle-ci a permis de recenser 15,1 millions de personnes (i.e. personnes disposant d'une carte RAMED, valide ou non) présentant un risque de vulnérabilité accrue. Des mesures sont déjà mises en place pour cibler cette population.
Protéger les segments vulnérables du marché du travail : une priorité.
La crise du COVID-19 a provoqué un choc sanitaire impactant directement le marché du travail. Comme expliqué plus haut, les travailleurs informels sont plus vulnérables à l'appauvrissement et aux maladies, ne bénéficiant pas des filets de sécurité sociale et des systèmes de soutien nécessaires s'ils perdent leurs moyens de subsistance. Il convient alors d'examiner les impacts de la crise sur le chômage, le sous-emploi, la pauvreté au travail, mais aussi l'impact différencié sur les groupes vulnérables comme les travailleurs indépendants, les travailleurs non-protégés et les personnes occupant des formes d'emploi atypiques, urbains et ruraux, notamment les jeunes et les femmes.
Une réponse inclusive doit aussi répondre aux besoins particuliers des migrants et des réfugiés.
À l'échelle mondiale, l'OIM et le HCR soulignent la nécessité d'inclure les migrants, les réfugiés et les demandeurs d'asile dans les réponses nationales contre la pandémie, en accordant une priorité à la coordination des interventions d'assistance directe avec une approche systémique, soutenant les autorités nationales et locales. Au Maroc, la population enregistrée dans la base de données du HCR est, au 31 mai 2020, de 11.149 personnes dont 3.843 demandeurs d'asile et 7.306 réfugiés ayant besoin d'une protection. L'inclusion de ces populations dans les réponses nationales est primordiale pour soutenir leur résilience face à cette situation de crise, et ce, également dans l'optique de ne laisser personne pour compte en conformité avec la réalisation des ODD. Le HCP et le HCR ont mené du 02 au 07 juin 2020 une enquête-ménages auprès de 600 familles afin de mesurer l'impact de la crise COVID-19 sur les réfugiés. Une fois disponibles et communiqués, les résultats de cette analyse constitueront une importante référence pour cette note stratégique.
Il est primordial de tenir compte des vulnérabilités spécifiques des femmes et d'engager les femmes dans la réponse à la crise.
La crise risque d'aggraver les inégalités de genre. En effet, les femmes sont plus exposées aux risques de la crise et ont également des besoins spécifiques de protection sanitaire et médicale qui ne sont pas toujours satisfaits, notamment l'équipement, la sécurité psychologique et un environnement de travail adapté.
Au Maroc, les femmes représentent 57% du personnel médical, 66% du personnel paramédical et 64% des fonctionnaires du secteur social. ONU Femmes rappelle que lorsque les systèmes de santé sont surchargés, la charge des soins à domicile est plus importante et incombe en grande partie aux femmes, qui ont consacré en moyenne six fois plus de temps au travail domestique que les hommes pendant la période de confinement.
D'après la deuxième enquête réalisée par le HCP auprès des ménages durant la crise COVID-19, le temps moyen journalier alloué aux travaux ménagers au domicile (cuisine, vaisselle, linge…) est de 2h 37mn, soit 33mn de plus par rapport à une journée normale avant le confinement (40 mn en milieu urbain et 23mn en milieu rural).
Il est important ainsi d'inclure les femmes dans la prise de décision et la conception des programmes de soutien, pour promouvoir l'égalité des sexes dans les mesures budgétaires, d'amortissement et de relance. Un transfert d'argent rapide est aussi nécessaire pour les femmes travaillant dans le secteur informel.
Les PME, les startups ou les coopératives dirigées par des femmes ont besoin de soutien par le renforcement de leurs capacités et l'accès au marché, surtout durant les phases de restriction de mobilité, plus élevée pour les femmes. Au Maroc, la participation des femmes à la vie économique compte parmi les plus modestes au monde (22% en 2018 vs 48% mondialement, dont 10% d'entrepreneuriat) avec un recul depuis 20 ans (29% en 2000).
Les services de base pour les victimes de violences basées sur le genre ne fonctionnent qu'à capacité réduite à cause du confinement, cette note invite donc à une réflexion autour d'autres outils innovants pour s'assurer que les femmes et les filles soient protégées contre les violences dans leur foyer. Au Maroc, le taux de prévalence des violences domestiques est de 52%, soit 6,1 millions de femmes avant la crise et le monde observe aujourd'hui une tendance haussière. Enfin, la résilience communautaire dépend en grande partie des femmes ; le dialogue communautaire devrait être renforcé pour inclure les voix des femmes dans la recherche d'une réponse de crise.
Conclusions et recommandations des agences des Nations Unies ?
Comme le montre le graphique présenté en fin de note, le COVID-19 présente un risque systémique créant des vulnérabilités, renforçant les inégalités et entravant la réalisation des ODD.
La pandémie du COVID-19 engendre non seulement une nouvelle crise économique et sociale, mais souligne aussi les lacunes existantes dans la manière dont les pays se préparent, réagissent et se rétablissent. Le Maroc devra agir rapidement et de manière intégrée pour mesurer et répondre à l'ampleur des changements dans la vie des individus et dans plusieurs secteurs de son économie, tout particulièrement le secteur informel.
Le Secrétaire Général des Nations Unies a présenté un Cadre de Réponse Socio-économique Immédiate au COVID-19 dans son rapport global, en mentionnant des principes généraux pour atteindre les ODD tout en répondant à la crise et en renforçant la préparation et la récupération. Ce Cadre recommande cinq pistes d'action prioritaires à explorer par les équipes pays des Nations Unies, lesquelles sont intégrées aux recommandations exprimées dans cette partie, soit :
1. La santé d'abord : cet axe répond à l'impératif de soutien aux systèmes de santé qui courent le risque d'être submergés. Ce soutien se formalise par un appui technique visant à assurer le fonctionnement régulier des services de santé et une allocation optimale des ressources en temps de crise, en ciblant notamment les populations les plus vulnérables. La présente note stratégique étant focalisée sur les aspects socio-économiques de la crise, elle n'intègre pas les mesures destinées spécifiquement aux services de santé, qui font l'objet d'un travail plus ciblé ;
1. La protection sociale et les services essentiels: cet axe renvoie à la nécessité d'assurer la continuité des services publics en situation de crise. En effet, les services à considérer ne sont pas uniquement sanitaires. Il s'agit de la continuité et du renforcement de l'inclusion des plus vulnérables, y compris des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants, dans les différents programmes de santé, des systèmes scolaires, des systèmes d'assistance juridique, ainsi que du soutien aux femmes victimes de violences basées sur le genre ;
1. La réponse et la relance économique : face à l'ampleur de la récession mondiale et de la montée du chômage, il est important pour les politiques économiques nationales de protéger l'emploi et de promouvoir l'inclusion dans les programmes nationaux d'insertion socio-économique, notamment des plus vulnérables, y compris des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants. Les pistes à envisager pour soutenir l'activité et protéger l'emploi sont nécessairement adaptées au contexte du pays, l'effort d'analyse et de diagnostic est donc une partie intégrante de la définition d'un plan de relance adapté, prenant en considération le genre, sans laisser pour compte les populations les plus vulnérables (travailleurs de l'informel, jeunes, migrants et réfugiés, entre autres) ;
1. Mesures macroéconomiques et collaboration multilatérale: cet axe renvoie vers l'éventail des politiques budgétaires, fiscales, commerciales et monétaires mises en place par les gouvernements pour amortir les effets de la crise. Cette réflexion ne saurait faire l'économie de la collaboration au niveau régional et multilatérale. La crise actuelle étant par essence transnationale, les politiques-pays fondées sur le « chacun-pour-soi » entraineraient un effet sous-optimal, voire négatif ;
1. La cohésion sociale et la résilience communautaire : la crise met à l'épreuve la cohésion sociale et teste la résilience des communautés. Or, le capital social est la ressource qui assure la confiance entre les membres d'une société et vis-à-vis de ses institutions. Cet axe vise à promouvoir les mécanismes de participation et d'inclusion citoyenne et porte sur plusieurs niveaux d'intervention : la communication et la sensibilisation des populations, l'existence d'espaces de dialogue entre les communautés et les autorités nationales et locales, ainsi que la prise en compte des attentes des communautés dans la formulation des politiques publiques.
Cette grille de lecture a ainsi été utilisée pour définir les recommandations suivantes propres au Maroc, lesquelles sont le résultat conjoint des consultations entre le Système des Nations Unies pour le Développement (SNUD) au Maroc, le Haut-Commissariat au Plan (HCP), la Banque mondiale et leurs partenaires.
Recommandation #1 : Elaboration d'un nouveau modèle d'équilibre économique et de développement durable, aligné avec la réalisation des ODD et appuyé par un suivi des indicateurs déjà disponibles
Alors que le Maroc élabore un nouveau modèle de développement, le Système des Nations Unies et ses partenaires proposent d'apporter un soutien et un accompagnement à cette réflexion autour d'un nouveau modèle d'équilibre économique et de développement durable, aligné avec la réalisation des ODD, en tirant les leçons de la crise actuelle et en ne laissant personne pour compte.
Cette recommandation s'inscrit dans les axes 3 et 4 du Cadre de réponse socio-économique promu par le Secrétaire général des Nations Unies. Dans le contexte marocain, cette recommandation implique, dans un premier temps, de soutenir l'analyse d'impact de la crise sur les différents secteurs, l'appui à la planification de la réponse économique et sociale, ainsi que la gestion des ressources. L'appui du SNUD intégrera spécifiquement la prise en compte de l'atteinte des ODD à l'horizon 2030, sur la base des indicateurs existants, lesquels prennent en compte les populations les plus vulnérables.
Recommandation #2 : Innover dans la collecte et l'analyse des données contextualisées afin de ne laisser personne pour compte
Le Système des Nations Unies propose d'accélérer la mise en place de méthodes innovantes pour collecter, analyser et tirer des informations utiles des données socio-économiques marocaines, afin d'accompagner au mieux la prise de décision de manière éthique, scientifique et contextualisée. La digitalisation, l'Intelligence Artificielle et les nouvelles technologies en général sont déjà au centre de la compréhension de la crise à travers le monde et généreront aussi des enseignements selon l'expérience qui en est faite par les services gouvernementaux, les entreprises et la société civile marocaines.
Conscient que les données fiables et la transparence contribuent à la fois à l'amélioration des politiques publiques et à la confiance des citoyens, le Maroc a accompli des efforts significatifs de transparence et de gestion des données, ce qui renforce le respect des règles et l'acceptation des mesures par la population. Dans un contexte de pression accrue sur les ressources publiques, il est important de construire une compréhension commune et tangible, permettant de mesurer l'impact de la crise et des politiques visant à la mitiger. Cette note stratégique propose à la réflexion un point sur l'importance de la gestion des données en temps de crise pour éclairer la prise de décision.
Cette recommandation est transversale et s'applique à la totalité des axes promus par le Secrétaire général des Nations Unies dans son Cadre de réponse socio-économique à la crise du COVID-19. Sa mise en œuvre permettrait de renforcer le capital social, c'est-à-dire la confiance. En effet, il est important de considérer la confiance et les comportements, en soulignant que les marocains déploient un effort de solidarité et de respect des règles considérable, et que les startup et PME rivalisent d'inventivité malgré les difficultés financières.
Recommandation #3 : Voir la crise comme une opportunité de renforcer la régionalisation avancée et valoriser le rôle de la société civile
Parmi les douze recommandations des travaux des premières Assises nationales de la régionalisation avancée (Décembre 2019), le renforcement des mécanismes de planification territoriale en cohésion avec la politique générale de l'Etat, ainsi que la convergence et l'adéquation des programmes de développement régional avec les plans sectoriels ont été fortement soulignés.
Cette recommandation, en cohérence avec l'axe 5 du cadre de réponse socio-économique du Secrétaire général des Nations Unies, s'applique d'autant plus en temps de crise où les stratégies nationales de réponse sectorielle ne peuvent être mises en place sans une planification et une budgétisation régionale renforcée.
Les collectivités territoriales ont d'ores et déjà mené des actions louables pour réduire l'impact de la pandémie. Les exemples d'efforts et de solidarité locale ne manquent pas, et la société civile est souvent en première ligne, notamment pour collecter les informations sur le terrain auprès des populations vulnérables et participer ainsi à une réponse nationale coordonnée, notamment entre les autorités locales (conseils élus localement), les représentants de l'autorité centrale au niveau territorial et la société civile, dans le cadre de la réponse d'urgence au Covid-19. Les agences onusiennes soulignent ainsi l'importance de l'inclusion des collectivités territoriales et de la société civile dans la réponse du pays et la mise en œuvre des politiques nationales au niveau local. Une telle bonne pratique est un exemple de coordination et renforcement du travail conjoint entre les institutions locales et les associations de la société civile dans le cadre de la Régionalisation Avancée, qui mériterait d'être systématisé et documenté dans le cadre d'un développement régional inclusif.
Recommandation #4 : Accorder une attention particulière à l'évolution de la pauvreté multidimensionnelle et à la planification d'une réponse inclusive
Il est par ailleurs recommandé d'accorder une attention particulière à la pauvreté multidimensionnelle, même s'il faudra attendre une collecte de données plus précises afin de formuler une analyse approfondie à ce sujet. L'estimation de la Banque mondiale concernant le recul du PIB (-4%) implique une hausse de la pauvreté dont la proportion exacte reste à estimer, mais qui sera de toute évidence sensible.
Cette recommandation s'inscrit dans l'axe 3 du Cadre de réponse socio-économique du Secrétaire général des Nations Unies. Il s'agit notamment de planifier une réponse adaptée aux segments de la population les plus durement touchés par la crise, et donc les plus vulnérables à basculer dans la pauvreté.
Il s'agit des salariés des PME, des travailleurs indépendants, des travailleurs agricoles et des journaliers. L'impact selon le genre étant particulièrement différencié, cette approche devra l'intégrer, ainsi que les populations migrantes, réfugiées, et demandeurs d'asile, souvent premières victimes du ralentissement économique. Il est important de ne pas considérer uniquement le volet monétaire de la pauvreté. L'accent est mis sur la pauvreté multidimensionnelle car les conséquences sur la santé et l'éducation ne sont pas toujours captées par les indicateurs monétaires.
Les indicateurs déjà existants et portant sur les ODD sont, à cet égard, des instruments de compréhension et de suivi utiles pour une compréhension approfondie des besoins des populations. Ainsi, une réponse inclusive, basée des indicateurs éprouvés et des données probantes, est donc recommandée pour garantir l'efficacité du ciblage des populations et l'effet des politiques de soutien économique et social.
Recommandation #5 : Investir dans la continuité des services publics de santé, d'éducation et d'administration durant et après la crise
Les services publics essentiels constituent l'unique filet social pour certaines populations, les plus vulnérables. Certains indicateurs montrent déjà un impact de la crise sur l'accès aux services de base. Sur le plan sanitaire, 30% des ménages éligibles aux services de consultations prénatales et postnatales (33% en milieu rural) ont dû renoncer à ces services selon l'enquête réalisée par le HCP en avril 2020 sur les effets de la crise sur les ménages. 36% des ménages ayant des enfants à vacciner ont dû également renoncer aux services de vaccination (43% en milieu rural contre 31% en milieu urbain).
Cette interruption des services publics essentiels, souvent liée à la peur du virus, à l'incertitude quant à la durée de la situation, à la réduction de la mobilité ou au manque de connectivité, peut créer des vulnérabilités latentes ou amplifier les vulnérabilités déjà existantes, qui risquent alors de se manifester de manière plus profonde dans les mois et les années à venir. Cela est valable pour la santé (dépistage des pathologies et soins réguliers), mais également pour l'éducation, où les interruptions de scolarité augmentent le risque d'abandon scolaire.
Or, il convient aussi de noter que les communes, les provinces et les régions ont développé, avec une grande rapidité, des mesures facilitant l'accès à leurs services pour les citoyens, tout en essayant de garantir leur­ protection. Cela a été le cas pour des services administratifs qui, lorsque les conditions étaient réunies, ont été digitalisés, mais également pour des services de santé de base ou d'urgence, qui ont été maintenus malgré la pression sur le système de santé.
Cela est d'autant plus important dans le secteur de la santé et de l'éducation comme le montre l'impact d'une interruption des services sur les facteurs de pauvreté multidimensionnelle. Enfin, au-delà de la disponibilité de services continus, leur qualité et leur perception par la population sont tout aussi importantes. En cohérence avec l'axe 2 du Cadre réponse socio-économique du Secrétaire général des Nations Unies, il est donc recommandé de capitaliser sur les efforts déployés en temps de crise pour investir davantage dans la résilience des services publics afin qu'ils puissent assurer une continuité de l'offre, quelle que soit la situation sanitaire ou économique.
[1] En retenant un seuil de pauvreté de 3,2 $/ jour PPA.
[2] Qui travaillent sur la base de courts contrats, à la demande


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