Le développement des pays pauvres ne doit pas être tributaire de la générosité des pays riches. Les Objectifs du Millénaire pour le Développement ne peuvent voir le jour uniquement en fonction de laide financière. Mise au point avec Larbi Jaidi, économiste. Finances News Hebdo : Depuis la fameuse déclaration du Millénaire des Nations-Unies, approuvé par 189 pays, la situation des pays concernés par lesdits objectifs ne cesse de s'aggraver. Comment peut-on atteindre, à votre avis, les OMD d'ici 2015 ? Larbi Jaidi : Il faut être convaincu que le principal défi que ces pays doivent relever est lélimination de la pauvreté et le développement des droits humains. Les pays en développement doivent surmonter des difficultés particulières pour faire face à ce défi majeur. Un important soutien doit être consenti par la communauté internationale. Il doit se traduire par des politiques et mesures qui correspondent aux besoins de ces pays. Mais, il y a aussi une responsabilité propre qui doit être assumée par les Etats des pays en développement à légard de leurs sociétés respectives. Une aide au développement plus généreuse est donc nécessaire. Mais la mobilisation des ressources nationales pour financer le développement durable est une nécessité encore plus forte. Toutefois, le challenge ne se réduit pas à une dimension financière. Il consiste dans la formulation et lapplication de stratégies et de politiques appropriées. Ce qui exige avant tout un mode de gouvernance démocratique des affaires publiques. Il en va du respect de la dignité humaine, de légalité et de léquité. F. N. H. : Certains reprochent aux ODM leur caractère minimaliste dans la mesure où les causes profondes ne sont pas prises en compte. Qu'en pensez-vous ? L. J. : Evidemment, pour chacun des objectifs du millénaire, il y a une chaîne causale où simbriquent des contraintes externes mais aussi des paramètres internes. Mais, en général, une des principales causes est la difficulté de mettre en place un système commercial et financier multilatéral ouvert, équitable, fondé sur le droit, prévisible et non discriminatoire qui permet aux pays en développement de mieux se positionner dans la compétition mondiale. Lautre cause est la capacité des pays en développement à concevoir et mettre en uvre des choix de développement où les règles de la bonne gouvernance sont respectées. F. N. H. : Comment, à votre avis, les pays concernés par les OMD peuvent réussir ce pari alors qu'ils sont constamment tenus de réduire leurs sources de dépenses publiques et rembourser des dettes insupportables ? L. J. : Certes, les dépenses publiques dans de nombreux pays ne couvrent pas les besoins sociaux, surtout que le déficit daccessibilité aux infrastructures sociales de base pour certaines catégories de la population est patent. Mais, leffort doit avant tout porter sur la rationalisation des dépenses sociales, la qualité de leur gestion, loptimisation de leur impact. Il y a des gains considérables à réaliser sur ce terrain. Dans la déclaration du Millénaire, il est bien évoqué la nécessité dappréhender de façon globale et effective le problème de la dette des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, grâce à diverses mesures dordre national et international propres à rendre leur endettement viable à long terme. Il faudrait appliquer sans plus tarder ce programme renforcé dallégement de la dette des pays pauvres très endettés et annuler toutes les dettes bilatérales contractées par ces pays. F. N. H. : Entre le Processus de Barcelone, les OMD et autres programmes de développement, où en est le Maroc ? L.J. : Vous voulez probablement évoquer la question de la convergence des politiques de coopération avec les choix des programmes de développement. Le Maroc consolide et élargit le champ de sa politique de coopération multilatérale et bilatérale en mobilisant, jespère, au mieux les cadres et les instruments définis par les différents accords contractés. Il y a toujours un effort additionnel à déployer pour renforcer la coordination de ces actions, la complémentarité de ces programmes et éviter les saupoudrages.