C'est peu de dire qu'Abdellatif Jouahri ménage les banques. Lui qui n'hésitait pas, à la moindre occasion, à leur taper sur les doigts, adopte depuis quelque temps une posture un peu plus diplomatique. En effet, à propos de la montée en puissance des créances en souffrance, sujet sur lequel il était intraitable, le gouverneur de la Banque centrale compatit presque à cette phase délicate que traversent certains établissements bancaires. Pour rappel, les créances en souffrance ont augmenté de 23,5% à fin 2013 pour se situer à 44,6 Mds de DH, soit un taux de 6% qui a encore augmenté pour s'établir à 6,2% à fin février. «Cela n'a rien d'inquiétant et reste conjoncturel, certains secteurs comme la sidérurgie et le BTP ayant subi les impacts d'une situation économique défavorable», souligne Jouahri, non sans préciser que «la Banque centrale surveille de près l'évolution des créances en souffrance». Ce soutien des établissements bancaires, Bank Al-Maghrib le décline également sur un autre registre : celui des besoins en liquidité. Le déficit de liquidité persistant sur le marché monétaire l'a, en effet, conduit, mardi dernier, à réduire le taux de la réserve monétaire de 2 points de pourcentage, pour le ramener à 2%. Une mesure qui va permettre de mettre à la disposition des banques 8 Mds de DH de cash. Ce n'est pas rien. Mieux encore, Jouahri s'engage, par ailleurs, à octroyer toutes les liquidités nécessaires au secteur bancaire marocain et qui sont destinées notamment au financement de l'activité économique réelle. Dans un marché bancaire marqué par un déficit structurel de liquidité depuis quelques années, cette initiative est bien évidemment la bienvenue. Surtout que la Banque centrale avait décidé, en décembre dernier, de mettre fin à la rémunération de la réserve obligatoire (0,75%) des banques constituées sous forme de dépôts auprès d'elle, ce qui induit logiquement un manque à gagner pour le système bancaire. Il était estimé à 150 MDH par an avant la baisse du taux à 2% décidée mardi. Comment les banques vont-elles alors traduire cette mesure qui, forcément, aura un impact sur le coût moyen de leurs ressources ? Bénéficiera-t-elle à la clientèle ? C'est ce que Jouahri espère en tout cas. Quoi qu'il faille reconnaître que les banques ne relaient pas toujours les impulsions de la politique monétaire aux agents économiques.