Jamais, sans doute, les préoccupations de la guerre et paix au Proche Orient n'ont été si présentes dans le débat politique français au point de créer de nouvelles lignes de fractures. Jamais sans doute le Proche Orient n'a produit en France des lignes de démarcation aussi claires que depuis les opérations du Hamas du 7 octobre et la réponse militaire israélienne exceptionnellement meurtrière contre la population civile de Gaza. À mesure que cette guerre se prolonge dans le temps, ses effets sur la politique française se font plus marquants, encouragés sans doute par l'effet girouette, voire une posture d'indécision et d'illisibilité du président Emmanuel Macron. À au moins deux reprises, il donna le vertige même à son fan club diplomatique. La première fois, lorsque sous l'effet d'une émotion non contrôlée, il annonça aux côtés d'un Benjamin Nethanyahou gonflé à bloc par le soutien international face aux drames du 7 octobre, sa proposition de mettre sur pied une coalition militaire internationale pour lutter contre le Hamas sur le même modèle que celle qui a démantelé Daesh. La proposition resta dans les limbes de la diplomatie mondiale comme une mauvaise inspiration. Plus tard, il organisa un sommet humanitaire pour le soutien des Palestiniens et fut un des premiers chef d'Etat occidentaux à souligner la nécessité d'un cessez-le-feu immédiat. Le seconde fois, lorsqu'il s'était abstenu de participer à la marche contre l'antisémitisme organisée dans le sillage émotionnel de cette guerre. Devant le flot incessant de critiques et de reproches, Emmanuel Macron laissa se dérouler à l'Elysée une cérémonie religieuse juive au risque de donner un sérieux coup d'entorse au principe même de la laïcité des institutions de la république. La guerre au Proche Orient a de ce fait configuré le positionnement des partis politiques français avec au bout de ces effets, une nouvelle logique et de nouvelles approches. La différence s'est faite sentir sur les extrêmes de la carte politique française au point de transformer le Proche Orient et ses guerres en un grand marqueur de distinction politique. Cette bataille se joue actuellement entre les deux forces les plus dynamiques du paysage politique français. La France insoumise de Jean Luc Mélenchon et le Rassemblement National de Marine Le Pen. La LFI a dès le début de cette nouvelle guerre été plongé dans la polémique. Donnant l'impression de refuser de condamner les drames du 7 octobre et de qualifier le Hamas d'organisation terroriste, le leadership de la France insoumise a passé le plus clair de son temps médiatique à tenter de justifier cette position. Ses adversaires l'ont immédiatement qualifié d'islamo-gauchiste et ont attribué à sa démarche des arrières pensées électorales. En ménageant la sensibilité pro palestinienne, la LFI visait à mobiliser le réservoir de vote français d'origine arabe, qui, s'il se mobilisait pour les prochains scrutins, pourrait faire la différence. La présence de Rima Hassan sur la liste LFI des européennes viserait à tester cette stratégie. La seconde force impactée par cette guerre est l'extrême droite que dirige actuellement le duo Marine Le Pen/Eric Zemmour. Elle a surpris par une nouveau positionnement en collision direct avec son héritage et son idéologie. Mêlant une haine atavique des arabes et une volonté opportuniste de se débarrasser de lourdes et persistantes accusations d'antisémitisme pour lesquelles le fondateur du Front National, Jean Marie Le Pen, a été condamné par la justice et mis au ban de la société, le Rassemblement national a profité de cette guerre pour tenter de se refaire une nouvelle virginité sur le sujet. Étrange renversement de situations et de tendances, la communauté juive française, qui se méfiait comme d'un diable de l'extrême droite à cause de son passé antisémite historiquement avéré, voit quelques uns de ses icônes lui tresser des lauriers et participer ainsi à ce long processus de dé-diabolisation du Rassemblement national entamé par Marine Le Pen. Pour eux , juste parce que Marine Le Pen a eu cette intelligence de conjoncture de soutenir la politique militaire de Netanyahu à Gaza, suffit à leurs yeux pour l'installer dans l'arc républicain et d'oublier ses fondements idéologiques racistes et antisémites. Sur le Proche orient, l'opportunisme électoral de l'extrême droite est une évidence. La stratégie était qu'en soutenant de manière aussi totale la politique israélienne de Netanyahu, le RN voudrait faire oublier que dans l'histoire récente, les pères fondateurs et inspirants de l'extrême droite, ont été les impitoyables bourreaux de la communauté juive d'Europe.