La passion du football au Maroc, parfois excessive, déborde trop souvent des gradins pour se transformer en violences incontrôlées. Bagarres, jets de projectiles, saccages de biens publics, voire pertes humaines. Et le phénomène du « hooliganisme« , bien que minoritaire, entache régulièrement l'image du sport national et fait planer une menace permanente sur la sécurité publique. Cette problématique, désormais structurelle, mobilise les autorités depuis plusieurs années. Pourtant, les débordements continuent de surgir, signe d'un malaise profond. En réponse à une question écrite du parlementaire du groupe Haraki, Brahim Aâba, le ministre de l'Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports, Mohamed Saad Berrada, a rappelé l'ampleur de la tâche. Dans sa réponse, il dépeint un tableau préoccupant notant que le phénomène de la violence dans les stades n'est pas seulement une question d'ordre public, mais un véritable défi sociétal. « La violence dans les stades, lorsqu'elle entraîne la perte de vies humaines, devient une atteinte au droit à la vie, ce qui engage la responsabilité des auteurs et impose l'application de la loi avec la plus grande rigueur », a souligné le ministre. En effet, Berrada a estimé que ce fléau est étranger aux valeurs marocaines, fondées sur la tolérance et le rejet de la violence sous toutes ses formes. Pour y faire face, le ministère a mis en place une stratégie qui combine approche sécuritaire et actions de sensibilisation. Plusieurs mesures concrètes sont prévues, telles que l'interdiction du déplacement collectif des supporters hors de leur préfecture ou province d'origine lorsque ce mouvement est jugé potentiellement dangereux pour l'ordre public. Une attention particulière est également portée aux mineurs, désormais interdits d'accès aux stades sans accompagnement, tandis que la responsabilité des parents est explicitement engagée. Le ministre a aussi annoncé un vaste plan de modernisation des infrastructures sportives. Les stades accueillant des matchs de la Botola Pro seront équipés de caméras de surveillance, de portiques électroniques, et leur système de billetterie sera revu. L'objectif étant de renforcer les protocoles de sécurité et mieux identifier les fauteurs de troubles, a-t-il précisé. Mais l'approche sécuritaire ne peut suffire. Mohamed Saad Berrada insiste sur la nécessité d'un accompagnement éducatif. « Si la répression permet en partie de freiner le phénomène, elle doit être renforcée par un volet de sensibilisation et d'éducation, notamment en valorisant le rôle de la société civile et en l'intégrant davantage dans la gestion des enceintes sportives », a-t-il soulevé notant que son ministère entend ainsi cibler les jeunes publics à travers des contenus numériques de prévention et impliquer les médias dans la lutte contre la banalisation de la violence dans les tribunes. La coordination interinstitutionnelle est également jugée cruciale. Le ministère travaille avec la Gendarmerie royale, la Sûreté nationale, les Forces auxiliaires, la Protection civile, le Comité national olympique marocain, la Fédération royale marocaine de football, ainsi que plusieurs ONG. Cette collaboration vise à appliquer de manière rigoureuse la loi 09.09, qui prévoit des peines lourdes pour les actes de violence commis dans ou autour des événements sportifs. Un texte complémentaire, l'article 308-19 du Code pénal, prévoit la mise en place de commissions locales chargées de la prévention de la violence dans les stades. L'opérationnalisation de ces structures est désormais à l'ordre du jour, tout comme l'application stricte du code disciplinaire par la Fédération, y compris l'organisation de matchs à huis clos pour sanctionner les clubs dont les supporters sont responsables de débordements. Face à ce phénomène complexe, une seule certitude s'impose, c'est qu'aucune solution miracle n'existe. Selon les observateurs, la réponse doit être multidimensionnelle, mêlant sanctions, prévention, éducation, et responsabilisation collective.