Les discussions entre les États-Unis et l'Arabie saoudite sur un accord de coopération nucléaire civile prennent désormais une tournure indépendante de la question hautement sensible de la normalisation diplomatique avec Israël. C'est ce qu'ont confié à Reuters deux sources proches du dossier, quelques jours avant la visite du président américain Donald Trump prévue le 13 mai. Ce changement d'approche constitue, selon plusieurs observateurs, une concession significative de la part de Washington. Jusqu'ici, les négociations nucléaires s'inscrivaient dans un cadre plus large, défini sous l'administration de l'ancien président Joe Biden. Ce cadre liait explicitement tout progrès en matière de coopération nucléaire à une normalisation entre Riyad et Tel-Aviv, en plus de la conclusion d'un éventuel traité de défense entre les deux puissances. Mais cette exigence semble désormais mise de côté. Riyad, de son côté, a toujours affirmé qu'aucune reconnaissance officielle d'Israël ne serait envisagée tant qu'un État palestinien n'aurait pas vu le jour. Une position ferme qui a contrecarré les efforts de Washington visant à élargir les Accords d'Abraham – ces traités conclus sous la première présidence Trump, qui avaient permis à des pays comme les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Maroc d'établir des relations diplomatiques avec l'État hébreu, explique la même source. Mais la guerre en cours à Gaza a renforcé l'impasse. Selon Reuters, elle a rendu toute tentative de rapprochement avec Israël politiquement intenable pour le royaume saoudien, dans un contexte de tensions croissantes dans le monde arabe. De plus, les négociations sur le nucléaire achoppent depuis des mois sur les exigences américaines en matière de non-prolifération. L'un des principaux points de blocage réside dans l'article 123 de la loi américaine sur l'énergie atomique. Ce texte conditionne toute coopération nucléaire civile avec un pays tiers au respect de critères rigoureux de non-prolifération, notamment l'interdiction d'enrichir l'uranium. Or, l'Arabie saoudite souhaite précisément conserver la possibilité d'enrichir l'uranium sur son sol, ce qui soulève des inquiétudes profondes à Washington. Pourtant, des signes indiquent une volonté mutuelle de faire avancer les discussions soutient la même source. En avril, à l'issue de sa visite à Riyad, le secrétaire américain à l'Énergie, Chris Wright, s'est voulu optimiste, déclarant que les deux pays étaient sur « la voie » d'un accord. Une déclaration interprétée par certains comme le prélude à une entente technique sur le nucléaire, bien que de nombreux obstacles persistent. Interrogé par Reuters, James Hewitt, porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, a tenu à calmer le jeu : « Lorsque nous aurons quelque chose à annoncer, vous l'entendrez de la bouche du président. Tous les rapports à ce sujet sont spéculatifs ». Le gouvernement saoudien, pour sa part, n'a pas donné suite aux sollicitations de Reuters pour commenter l'état actuel des discussions. Même si la normalisation avec Israël n'est plus officiellement exigée pour avancer sur le dossier nucléaire, la conclusion d'un accord global reste incertaine. D'après l'une des sources interrogées, les négociations font désormais partie d'un cadre élargi, centré sur un futur traité de défense, mais la signature d'un accord ne semble pas imminente. Dans ce contexte, la visite de Donald Trump en Arabie saoudite la semaine prochaine s'annonce cruciale. Au programme, des discussions économiques de grande ampleur, avec notamment la perspective d'un paquet d'armement d'une valeur estimée à 100 milliards de dollars. Reste à savoir si, sur le front nucléaire, les deux alliés parviendront à aplanir leurs divergences et franchir une nouvelle étape.