Le 8 mai, la chambre criminelle de la cour d'appel de Rabat a prononcé une peine de quinze années d'emprisonnement ferme, par contumace, à l'encontre de Hicham Jerando, ressortissant marocain résidant au Canada, reconnu coupable de «constitution d'une organisation terroriste en vue de la préparation et de la commission d'actes de nature à troubler gravement l'ordre public par l'intimidation, la menace et la terreur.» L'affaire trouve son origine en mai 2023, lorsque M. Jerando a diffusé sur sa chaîne YouTube une vidéo contenant des propos explicites appelant à «l'exécution, la résurrection, puis la réexécution» de Najim Bensami, magistrat marocain et ancien procureur général du roi près la cour d'appel de Casablanca. Peu après, une lettre à caractère menaçant est parvenue au domicile de M. Bensami au Maroc. Elle comportait notamment les formulations suivantes : «il mérite d'être enterré vivant» et «qu'on lui tranche la tête ainsi qu'à tous les membres de sa famille.» En début d'année 2024, M. Jerando a poursuivi la diffusion de contenus analogues sur diverses plates-formes numériques, reproduisant un discours de haine explicite et des menaces de mort à l'encontre de M. Bensami. Ces publications répétées ont conduit ce dernier à déposer deux plaintes : l'une auprès des juridictions marocaines à Rabat, l'autre devant la Cour supérieure du Québec, au Canada. Dans sa requête civile au Canada, M. Bensami sollicite un dédommagement de deux millions de dollars canadiens, dont 1,5 million au titre des préjudices moraux, et 500 000 dollars à titre de dommages punitifs, en raison de la gravité des atteintes subies. Le dossier met en lumière un ensemble de préjudices : atteinte à l'intégrité psychique du plaignant, sentiment d'insécurité permanent, déstabilisation de son image dans l'espace judiciaire, et exposition à la vindicte publique. Des mesures de protection spécifiques ont été prises par les autorités compétentes afin d'assurer la sécurité du magistrat et de ses proches. L'action publique, conduite au Royaume par la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) et les services du parquet, a abouti à l'ouverture d'une procédure criminelle transférée à la chambre compétente de la cour d'appel de Rabat. Le jugement, rendu en l'absence de l'accusé, s'inscrit dans le cadre d'une réponse judiciaire ferme à l'encontre des discours menaçants portés depuis l'étranger à l'encontre d'agents de l'Etat. La procédure introduite devant la justice canadienne demeure en cours. Elle s'appuie notamment sur des précédents jurisprudentiels, parmi lesquels figure une décision antérieure des tribunaux québécois ayant enjoint M. Jerando de retirer des contenus à caractère diffamatoire. L'issue de ce second volet judiciaire pourrait donner lieu à une reconnaissance complémentaire des torts subis par M. Bensami dans le cadre transnational de cette affaire.