Des sources bien informées ont confié à Hespress que les services centraux du ministère de l'Intérieur ont adressé des directives à caractère urgent aux walis et gouverneurs des préfectures et provinces, les enjoignant de diligenter, dans les plus brefs délais, la constitution de commissions administratives d'enquête. Ces instances auront pour mission d'examiner un nombre croissant de réclamations émanant de citoyens se déclarant lésés par des opérations de démolition ou des décisions d'évacuation visant des constructions illégales ou des occupations non autorisées du domaine public. Selon les mêmes sources, cette mesure intervient en réponse à la remontée d'un ensemble de dérives constatées sur le terrain, notamment des interventions opérées par certains agents d'autorité en dehors du cadre légal. Plusieurs de ces abus présumés ont été dûment constatés par voie d'huissiers de justice, à l'initiative des plaignants, sans pour autant donner lieu à des recours devant la juridiction administrative. Les commissions administratives seront chargées d'auditer la régularité des procédures suivies par les autorités locales, notamment les pachas et caïds, dans le cadre de la répression des infractions en matière d'urbanisme. Elles devront également vérifier le respect des droits des personnes mises en cause, notamment en ce qui concerne la notification des décisions, la production des pièces justificatives et la garantie du contradictoire, ainsi que la conformité des actes aux dispositions légales en vigueur. D'après les informations recueillies par Hespress, les services déconcentrés du ministère font face à une recrudescence des plaintes visant certains responsables territoriaux, accusés de méconnaître les procédures réglementaires et de négliger des documents officiels, notamment des autorisations d'urbanisme délivrées par des instances compétentes. La majorité des cas signalés se concentrerait dans les régions de Casablanca-Settat et Rabat-Salé-Kénitra, et concernerait des opérations de démolition touchant les façades de commerces (cafés, restaurants, etc.), des entrepôts ou des hangars érigés sur des terrains à vocation agricole. Les mêmes sources révèlent également que certains élus influents auraient exercé des pressions, usant de leur position et de leur réseau, pour tenter de faire obstacle aux opérations de démolition ayant ciblé des biens immobiliers leur appartenant, qualifiés de constructions illicites ou en infraction aux règles d'urbanisme. Il ressort par ailleurs que certains gouverneurs, notamment ceux récemment concernés par des mouvements de mutations, sont restés passifs face aux réclamations formulées par les élus susmentionnés. Certains de ces derniers auraient même entravé le travail des caïds opérant dans les périmètres des collectivités territoriales où ils siègent en tant que membres des conseils communaux, notamment en périphérie de Casablanca. Des difficultés logistiques majeures ont également été signalées concernant la mobilisation des moyens matériels nécessaires à l'exécution des décisions de démolition. Dans certains cas, les autorités ont découvert que des présidents de communes ou des conseillers avaient volontairement mis hors service les engins appartenant aux collectivités locales, alors que d'autres mettaient à disposition des bulldozers pour des opérations de dégagement de terrains appartenant à des promoteurs immobiliers influents, facilitant ainsi leur lotissement ultérieur. Les semaines écoulées ont par ailleurs été marquées par une certaine inertie de la part des autorités locales dans certaines provinces, qui se sont abstenues d'ordonner la démolition de constructions érigées en violation des permis délivrés, en contradiction flagrante avec l'article 69 de la loi n° 12-90 relative à l'urbanisme. Cet article prévoit un délai maximal de 30 jours pour la mise en œuvre volontaire des travaux de démolition par les contrevenants, à défaut de quoi l'autorité administrative est tenue de procéder à la démolition d'office, aux frais des intéressés. Or, dans plusieurs cas, des délais allant jusqu'à 18 mois ont été indûment accordés pour permettre aux contrevenants de modifier les plans initiaux et d'en manipuler les caractéristiques techniques. Toujours selon les sources du journal, les autorités provinciales de Casablanca et Kénitra ont été destinataires de nombreuses plaintes faisant suite à des démolitions ayant conduit à des contentieux entre caïds et administrés. Les bâtiments visés ont été considérés comme non conformes aux documents d'urbanisme, au motif qu'ils auraient été édifiés dans des zones réservées à l'habitat pavillonnaire ou que leurs propriétaires y auraient apporté des modifications non autorisées. D'autres cas concernent des commerces disposant de titres d'occupation temporaire du domaine public accompagnés de justificatifs de paiement des redevances, leurs propriétaires contestant avec force toute infraction à la réglementation et accusant les autorités d'avoir agi avec précipitation, sans respecter les procédures requises.