Des rapports émanant des services des affaires générales dans plusieurs préfectures ont provoqué un état d'alerte au sein des services centraux compétents du ministère de l'Intérieur. Ces rapports pointent une hausse préoccupante des flux de « déchets inertes » dans un certain nombre de communes urbaines et rurales à travers plusieurs provinces, notamment dans la région de Casablanca-Settat. Selon les documents transmis, cette augmentation est directement liée à l'accélération des opérations menées par les autorités locales pour démolir les constructions anarchiques et libérer l'espace public occupé illégalement. Selon des sources bien informées qui se sont confiées à Hespress, les rapports soumis à l'administration centrale contiennent des données actualisées mettant en lumière une ruée de certains élus pour exploiter les engins et bulldozers des collectivités locales en vue de transporter des gravats et des pierres dans des circonscriptions électorales bien déterminées. Ces pratiques, menées dans des conditions opaques, soulèvent de sérieuses interrogations quant à leurs véritables motivations. En réaction, les services concernés ont diffusé des directives aux responsables territoriaux afin de suivre de près ces manœuvres et de veiller scrupuleusement au respect des procédures légales en matière d'évacuation des « déchets inertes » et d'utilisation des équipements communaux. L'accumulation de ce type de déchets sur le territoire de certaines communes, notamment en périphérie de Casablanca, a conduit à des coupures de routes, à la détérioration de terrains et d'espaces verts, et à une aggravation de la situation dans certaines décharges publiques existantes. Les mêmes sources révèlent également une augmentation continue du volume des « déchets inertes » dans plusieurs zones périphériques de la capitale économique, telles que Ouled Saleh, Nouaceur, Deroua, Bouskoura, Tit Mellil et d'autres encore. Suite aux instructions de l'administration centrale, et en coordination avec les services de la Wilaya de la région Casablanca-Settat, plusieurs responsables territoriaux ont lancé des initiatives pour renforcer la surveillance des nouveaux points de démolition anarchique, et assurer un suivi rigoureux de l'élimination des déchets générés. Une attention particulière est portée à la carrière de Nouaceur, mise à disposition de la commune de Casablanca à la faveur d'un accord conclu avec l'Office national des chemins de fer (ONCF), et réservée spécifiquement à la réception de ce type de déchets, qui ne peuvent être enfouis dans les décharges ménagères. Les directives en question devraient, à terme, déboucher sur une campagne de grande envergure qui sera menée simultanément dans plusieurs préfectures. Il est à noter que les opérations en cours de démolition de constructions anarchiques devraient faire gonfler encore davantage le stock de « déchets inertes » dans de nombreuses villes, en particulier à Casablanca, où ce stock est estimé à 4 millions de tonnes, selon une étude réalisée antérieurement par le Conseil de la ville. Selon les dispositions de la loi 28-00 relative à la gestion et à l'élimination des déchets, ces matériaux doivent être traités dans une décharge contrôlée de deuxième catégorie. Or, aucun traitement dans une installation agréée n'a été effectué depuis 2018. Pour remédier à cette situation, le Conseil, en partenariat avec le ministère de l'Intérieur, a mobilisé une enveloppe de 150 millions de dirhams pour assurer la gestion provisoire de ce stock en vue de son élimination. Parallèlement, une redevance de 10 dirhams par tonne a été instaurée pour l'enfouissement des déchets inertes dans la carrière temporaire spécialement aménagée à cet effet, située dans la province de Nouaceur, conformément au décret fiscal adopté par le Conseil communal. Par ailleurs, d'après les mêmes sources, les rapports des services des affaires générales font également état d'une prolifération des activités de courtiers spécialisés dans l'évacuation des déchets issus des démolitions anarchiques et des chantiers immobiliers. Ces derniers réclameraient des sommes importantes, établies en fonction du tonnage transporté. Pour contourner les points de contrôle routier, ces intermédiaires recourent à des méthodes de dissimulation, notamment en utilisant des factures et documents censés attester du transport de matériaux de construction (pierres, sable, etc.), alors qu'il s'agit en réalité de déchets. De nombreux terrains vagues, notamment ceux situés le long des autoroutes, se sont ainsi transformés en carrières à ciel ouvert destinées à accueillir ces « déchets inertes ». Il convient de rappeler que lors d'une réunion tenue mardi par la Commission des infrastructures, de l'énergie, des mines, de l'environnement et du développement durable, Benali a fait savoir que 19 projets de gestion des déchets ménagers, entièrement financés par l'Etat dans le cadre du programme national 2008-2022, n'ont toujours pas été réalisés. Selon la ministre, ces projets représentent un investissement total de 955,97 millions de dirhams, dont 371,08 millions (soit 39%) ont été apportés par le ministère. Ils concernent notamment la réalisation de décharges contrôlées et de centres de traitement et de valorisation, ainsi que la réhabilitation ou la fermeture de décharges anarchiques. Plus précisément, 7 projets visent la création de centres d'enfouissement et de valorisation des déchets, pour une enveloppe de 672,46 millions de dirhams, financée à hauteur de 229,30 millions par le ministère. De plus, 12 autres projets, dédiés à l'assainissement des points noirs et à la fermeture de décharges sauvages, mobilisent 283,51 millions, dont 141,78 millions d'apport public. Et pourtant, malgré les financements alloués depuis plus de quatre ans pour certains, les chantiers n'ont pas vu le jour. Un phénomène préoccupant que Benali attribue en partie à un manque de gouvernance locale et de suivi rigoureux, affirmant que l'efficacité des projets ne repose pas uniquement sur l'argent.