Les directions régionales des impôts de Casablanca, Marrakech et Tanger intensifient leurs contrôles sur des dizaines d'entreprises, actives ou non, bénéficiant de contrats de domiciliation fiscale. Ces vérifications révèlent des pratiques frauduleuses, notamment l'usage de fausses factures et la dissimulation d'activités, dans le cadre d'un dispositif complexe de fraude à la TVA et à l'impôt sur les sociétés. Les équipes de contrôle relevant des directions régionales des impôts de Casablanca, Marrakech et Tanger ont intensifié leurs opérations d'audit élargies, ciblant des dizaines d'entreprises actives et inactives bénéficiant de contrats de « domiciliation fiscale ». Cette opération s'inscrit dans le cadre d'une mission de vérification ciblée, menée en coordination avec le service de gestion de la conformité fiscale des entreprises, rattaché à la Direction générale des impôts. Selon des sources bien informées citées par Hespress, les vérifications sur pièces menées dans un premier temps ont permis de déceler des cas où des fraudeurs ont détourné le mécanisme de domiciliation fiscale pour contourner le contrôle fiscal. Certaines entreprises auraient été transformées en entités émettant de fausses factures, avec des manipulations dans les déclarations fiscales, notamment en ce qui concerne la TVA. Les mêmes sources indiquent que les agents du fisc ont élargi leur champ d'action, passant des entreprises ayant déclaré un changement de siège aux sociétés qui, bien qu'ayant connu une croissance notable de leurs activités commerciales et financières selon leurs propres déclarations fiscales, n'ont jamais formulé une telle demande de transfert. Ces entreprises s'acquittent pourtant de leurs obligations déclaratives dans les délais légaux. À Casablanca notamment, les services de contrôle fiscal s'appuient sur les résultats d'enquêtes et d'investigations de terrain menées auparavant sur des sociétés spécialisées dans les services de domiciliation fiscale. Ces investigations ont révélé que ces structures ne notifiaient pas à l'administration fiscale la situation réelle de leurs clients domiciliés. Elles ne prenaient pas non plus de mesures légales pour mettre fin aux activités d'entreprises inactives, ni n'alertaient leurs gérants ou actionnaires sur les risques liés à leur situation fiscale non régularisée. Ces entreprises se contentaient d'encaisser des commissions sur des contrats de domiciliation, la plupart renouvelés automatiquement chaque année, sans se préoccuper des obligations fiscales de leurs clients. Les sources du journal précisent que les agents de contrôle fiscal ont eu recours à l'analyse centralisée des bases de données électroniques de la Direction générale des impôts afin d'identifier des cas de fraude liés à la TVA et à l'impôt sur les sociétés. Ces analyses ont mis au jour des entreprises ayant longtemps profité des « zones protégées de domiciliation » pour dissimuler d'importantes transactions commerciales et des montants financiers très élevés. Le contrôle actuellement en cours a permis de repérer des opérations suspectes entre certaines de ces sociétés, sous forme de fausses factures, qui apparaissent également dans les déclarations fiscales de dizaines d'autres entreprises, alors qu'aucune relation commerciale réelle ne les lie. Ces fausses transactions ont été étayées par des paiements effectués par virements bancaires, chèques ou lettres de change. L'examen approfondi des déclarations fiscales a confirmé l'usage systématique de factures fictives à des fins de fraude, ce qui a conduit à la transmission de plusieurs dossiers au parquet compétent, en vue de l'ouverture de procédures judiciaires contre les personnes impliquées, conformément aux articles 192 et 231 du Code général des impôts. Les sources de Hespress révèlent que les opérations d'audit se sont étendues à des cabinets comptables, accusés d'avoir exploité, avec la complicité d'intermédiaires, un grand nombre d'entreprises inactives. Ces dernières ont été abandonnées par leurs fondateurs, après avoir échoué à obtenir des financements bancaires ou un soutien public dans le cadre de programmes bien connus tels que l'Initiative nationale pour le développement humain, "Intelaka", "Forsa" ou d'autres dispositifs. Il s'agirait, selon les sources, d'un nombre important d'entreprises créées uniquement sur le papier, sans aucune activité réelle. Les contrôleurs fiscaux ont toutefois constaté l'émission de demandes émanant de ces sociétés, ainsi que des factures comportant leur identifiant fiscal ICE, intégrées dans les déclarations fiscales d'autres contribuables. Il est à noter que l'article 93 de la loi n° 15‐97, promulguée en tant que Code de recouvrement des créances publiques, stipule : « Sont exécutoires les tableaux d'impôts, les listes de recettes et tout autre titre de perception émis légalement à l'encontre des débiteurs les y inscrits, ainsi qu'à l'encontre de leurs ayants droit, et de toute autre personne que les débiteurs auraient désignée comme leur domicile fiscal, avec leur accord. » Cela signifie que ces titres peuvent être exécutés non seulement contre les débiteurs eux-mêmes, mais aussi contre leurs ayants droit ou toute personne désignée comme domiciliataire fiscal. Par ailleurs, les entreprises spécialisées dans la domiciliation fiscale ne peuvent interrompre ce service sans procéder au transfert effectif du siège fiscal de l'entreprise cliente, ce qui nécessite la tenue d'une assemblée générale de la société concernée. À défaut, quelques prestataires optent pour la voie judiciaire en demandant la radiation de la société du registre du commerce — une démarche qui prend généralement entre un mois et deux, pour un coût d'environ 3 000 dirhams par dossier, auxquels s'ajoutent des frais judiciaires d'environ 100 dirhams.