Des sources bien informées ont indiqué à Hespress que les services de l'administration centrale du ministère de l'Intérieur ont ouvert des enquêtes administratives au sein des services de l'urbanisme de plusieurs préfectures relevant des régions de Casablanca-Settat, Marrakech-Safi et Rabat-Salé-Kénitra. Ces investigations font suite à des fuites de documents d'urbanisme avant leur approbation officielle, révélées par des plaintes accusant certains fonctionnaires de collusion avec des spéculateurs immobiliers. Les mêmes sources précisent que le chef du service de l'urbanisme d'une préfecture de la région de Rabat a sollicité sa démission après que des investigations ont mis au jour des irrégularités dans ce secteur. Les enquêtes administratives en cours se sont arrêtées sur la répétition des fuites enregistrées dans divers projets de documents d'urbanisme, et ce, sur une période couvrant les cinq dernières années. Les premiers cas remontent à début 2019, mais sont restés confidentiels jusqu'à ce que les réclamations des usagers des services de permis de construire se multiplient. Ces derniers ont dénoncé des pratiques suspectes imputées à certains agents, notamment la vente de terrains, la prestation de conseils à des spéculateurs et promoteurs immobiliers, ainsi que l'accaparement de prérogatives par des responsables de l'urbanisme au détriment des autres composantes de la structure administrative des collectivités. Ces pratiques sont actuellement passées au crible dans le cadre des opérations d'audit. Les mêmes sources révèlent également que les missions d'inspection ont été étendues à certains agents d'autorité, dont les noms figurent dans des rapports signalant des fuites d'informations sensibles relevant de l'administration territoriale. Dans les provinces marquées par la prolifération de la construction anarchique et considérées comme des bastions traditionnels de « lobbies » immobiliers, les gouverneurs ont convoqué des conseils disciplinaires qui ont abouti à des sanctions à l'encontre de plusieurs moqaddems, allant de la suspension à la révocation définitive. Les gouverneurs des provinces concernées — dont certains ont été récemment touchés par le mouvement de mutation — ont mis en œuvre une large opération de remaniement dans les rangs des Mokadems et des Cheikhs, en réponse aux remarques formulées par des caïds et des chefs d'annexes administratives locales. Ces derniers ont révélé que des agents d'autorité avaient transmis les dates et horaires des descentes sur le terrain menées par les commissions chargées de constater les infractions en matière d'urbanisme. Certains de ces agents sont allés jusqu'à détourner leurs prérogatives liées aux enquêtes de terrain pour en faire une activité illégale génératrice de revenus, notamment avec la multiplication des constructions illicites dans leurs zones de compétence et la prolifération d'ateliers clandestins de fabrication de sacs plastiques interdits par la loi. Selon les sources de Hespress, les conseils disciplinaires ont coïncidé avec la distribution de formulaires aux agents d'autorité, comportant des rubriques détaillées sur leurs biens patrimoniaux. Cette démarche s'inscrit dans le cadre de dispositifs spécifiques au système de déclaration de patrimoine, visant à circonscrire les foyers de corruption impliquant ces agents dans des relations douteuses avec des réseaux mafieux générant des milliards de dirhams en contrepartie d'un laxisme face à des irrégularités qu'ils sont pourtant censés surveiller et signaler. Il convient de rappeler que la Cour des comptes avait annoncé le lancement de l'opération de renouvellement de la déclaration obligatoire de patrimoine, exigée tous les trois ans pour certaines catégories de fonctionnaires et d'agents relevant de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics ainsi que d'autres organismes sous tutelle. Les services concernés ont entamé la réception des déclarations le 3 février dernier, une opération qui devait se poursuivre tout au long du mois, conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 5 de la loi 54.06 relative à l'instauration de la déclaration obligatoire de patrimoine pour certains élus locaux, membres des chambres professionnelles et catégories spécifiques de fonctionnaires ou d'agents publics. Enfin, les sources de Hespress soulignent que des rapports parallèles émanant des services des affaires intérieures ont mis en évidence une augmentation notable du nombre d'agents d'autorité devenus propriétaires fonciers ou entrepreneurs. Des soupçons sérieux d'enrichissement illicite pèsent sur leurs dossiers, en particulier dans les zones où la construction anarchique connaît une forte expansion, cette dernière étant identifiée comme l'une des principales sources de prélèvements illégaux.