Le 6 novembre 1975, 350 000 volontaires marocains marchaient pacifiquement vers le Sud, brandissant le Coran et le drapeau national. Aujourd'hui, ce sont des milliards de dirhams qui « marchent » vers ces mêmes territoires, transformant le geste politique en une réalité économique tangible. Alors que le Maroc s'apprête à célébrer l'anniversaire de la Marche Verte, cet événement historique ne se limite plus aux seuls manuels d'histoire. Près d'un demi-siècle plus tard, la vision géostratégique du Roi Hassan II a donné naissance à un projet de développement économique ambitieux, qui transforme radicalement le visage des Provinces du Sud. « La Marche Verte n'était pas une fin en soi, mais le point de départ d'un projet de développement intégré », explique le Dr Khadija Bennani, économiste spécialisée dans le développement régional. « L'objectif était double : affirmer la souveraineté marocaine et faire de ces provinces un pôle de croissance pour l'ensemble du Royaume. » Des chiffres éloquents Les investissements dans la région racontent une histoire significative : * 45 milliards de dirhams investis entre 2015 et 2021 dans le cadre du Programme de développement des Provinces du Sud ; * + 7,5 % de croissance annuelle moyenne dans la région, dépassant régulièrement la moyenne nationale ; * 120 000 emplois créés depuis 2015 ; * 92 % de taux d'électrification rurale, contre 30 % en 1975. Le port Dakhla Atlantique : une vision continentale Avec un investissement de 12 milliards de dirhams, ce projet phare illustre l'ambition marocaine. « Ce port n'est pas seulement une infrastructure maritime, c'est une porte d'entrée vers l'Afrique de l'Ouest », souligne Mohammed Amin, directeur régional de l'Agence pour la promotion et le développement économique des Provinces du Sud. Les énergies renouvelables : l'or vert du désert Les immenses étendues désertiques se transforment en atout énergétique. Le complexe Noor Ouarzazate, bien que situé plus au nord, ouvre la voie à des projets similaires dans le Sud. Le Maroc vise à produire 52 % de son énergie à partir de sources renouvelables d'ici 2030, et les Provinces du Sud y jouent un rôle crucial. Pêche et agriculture : une modernisation en marche Le Plan Halieutis a transformé la pêche artisanale en une industrie moderne, tandis que le Plan Maroc Vert a permis le développement de l'agriculture sous serre et de la culture du cactus. Les produits de la mer s'exportent désormais vers les marchés les plus exigeants, et les tomates cerises arrivent sur les tables européennes en hiver. Le développement des Provinces du Sud génère des retombées économiques concrètes et diversifiées. Le secteur privé connaît une croissance remarquable, avec une augmentation de 40 % des créations d'entreprises depuis 2018. Les investissements dans le tourisme ont permis la création de plus de 2 000 chambres d'hôtel et la diversification vers l'écotourisme et le tourisme d'aventure. Les Provinces du Sud représentent aujourd'hui un marché en pleine expansion .Le pouvoir d'achat local a augmenté de 25 % au cours des cinq dernières années, stimulant la consommation et attirant de nouvelles enseignes commerciales, selon les données du ministère de l'Intérieur. L'économie numérique n'est pas en reste. Le déploiement de la fibre optique et les investissements dans les technologies vertes positionnent la région comme un futur hub digital. Vers une économie intégrée et durable Les perspectives économiques s'annoncent prometteuses, avec plusieurs projets structurants en cours de réalisation. La Zone économique libre de Dakhla, d'une superficie de 1 500 hectares, vise à attirer 5 milliards de dirhams d'investissements et à créer 25 000 emplois directs. Le développement des énergies renouvelables devrait permettre l'exportation d'électricité verte vers l'Europe et l'Afrique subsaharienne. « Le Nouveau Modèle de Développement fait des Provinces du Sud un laboratoire de la croissance durable », analyse le Dr Bennani. « La combinaison entre ressources naturelles, position géostratégique et vision politique crée des opportunités uniques pour les investisseurs. » Le secteur logistique bénéficiera également de la position stratégique de la région, avec le développement de corridors routiers et ferroviaires qui renforceront la connectivité avec le reste du Maroc et le continent africain. Ainsi, nous assistons à l'émergence d'un nouveau pôle économique qui dépasse les frontières nationales. Les Provinces du Sud deviennent progressivement la plaque tournante des échanges entre le Maroc, l'Afrique et l'Europe.