Un espion silencieux vient de prendre place au-dessus de nos têtes. Ce n'est pas un satellite militaire ni une caméra géante de télé-réalité, mais bien un bijou de technologie né d'une alliance inédite entre deux puissances spatiales : la Nasa et l'Isro, l'agence spatiale indienne. Ce mercredi 30 juillet, elles ont mis en orbite Nisar, un satellite d'observation de la Terre qui pourrait bien révolutionner notre compréhension des cataclysmes naturels et de l'évolution du climat. Derrière ce nom discret se cache un outil d'une précision redoutable, capable de surveiller la planète sous toutes ses coutures, des glaciers fondants aux failles géologiques prêtes à rompre. Anticiper l'imprévisible Tremblements de terre, glissements de terrain, volcans dormants... Autant de phénomènes que l'on subit souvent sans les voir venir. C'est là que Nisar entre en jeu. Grâce à ses radars ultra sensibles, il pourra détecter les microdéformations du sol qui annoncent une rupture sismique ou une éruption volcanique. Mieux encore : il distingue les failles lentes, invisibles à l'œil nu mais potentiellement dangereuses, des fractures susceptibles de provoquer des secousses majeures. Ces données permettront aux chercheurs de mieux prédire les catastrophes, mais aussi aux gouvernements de sécuriser des infrastructures critiques, des ponts aux barrages. Surveiller les géants de glace Le changement climatique a un baromètre silencieux : la glace. Et c'est justement dans les régions polaires que Nisar montre toute son utilité. En orbite héliosynchrone, il scrute sans relâche les calottes glaciaires, notamment en Antarctique, où la fonte s'accélère. En cartographiant les moindres mouvements des glaciers, il permettra d'estimer avec une précision inédite la quantité d'eau douce libérée dans les océans, un facteur clé dans la montée du niveau de la mer. Pour les climatologues, c'est un trésor d'informations qui s'annonce. Une double vision radar Si Nisar est si performant, c'est grâce à sa combinaison unique de deux radars. Le premier, développé par la Nasa, fonctionne en bande L (25 cm de longueur d'onde), idéal pour traverser la végétation dense ou analyser les grandes structures géologiques. Le second, conçu par l'Isro, utilise la bande S (10 cm), plus adaptée à l'observation des sols cultivés et des plantes basses. Ensemble, ils sondent la Terre avec une finesse inégalée, générant quelque 80 téraoctets de données par jour — un record pour une mission de ce type. Un œil aussi tourné vers les forêts et les champs Au-delà des catastrophes, Nisar offrira aussi des informations précieuses sur la déforestation, la santé des forêts et l'évolution des cultures agricoles. Les chercheurs espèrent ainsi mieux évaluer les impacts de l'activité humaine sur les écosystèmes, et suivre en temps réel les conséquences de politiques de reforestation ou de pratiques agricoles durables. Une mission scientifique à double drapeau Pour la Nasa comme pour l'Isro, Nisar marque un tournant. Il s'agit de la première mission de collaboration matérielle de cette ampleur entre les Etats-Unis et l'Inde. Pendant trois ans, ce satellite scrutera inlassablement la Terre, tissant entre les deux agences un pont scientifique solide. Dans un monde où la coopération devient cruciale pour affronter les défis globaux, Nisar incarne un espoir concret : celui d'une planète mieux comprise... et mieux protégée.