Le dernier sommet du C.C.G, (Conseil de coopération des pays du Golfe) a montré que les pays de la région n'ont aucune stratégie face à la percée de l'Iran dans le monde arabe. Pis encore, pour la première fois, Téhéran hausse le ton au point de menacer, sans les citer, les Etats arabes qui se rangent aux côtés des Etats-Unis contre elle. À la veille de son deuxième voyage à Beyrouth pour le jouer le médiateur entre l'opposition dirigée par hezbullah qui assiège le palais gouvernemental, et la majorité conduite par les Forces du 14 mars, le secrétaire général de la Ligue Arabe, Amr Moussa, disait à la Gazette du Maroc que la «solution du problème libanais se trouve aujourd'hui à Téhéran et nulle part ailleurs» ; et de poursuivre : «Les Iraniens tiennent, en même temps, une partie importante des trois autres cartes, à savoir l'Irak, la Palestine et l'Afghanistan». Cela dit, la concurrence avec la République islamique demande une mise en place d'une stratégie arabe globale intelligente. C'est de l'avis de l'ancien chef de la diplomatie française, Hubert Vedrine. Ce dernier considère que cette administration américaine qui pourrait intimider le comportement régional iranien ; moins encore, l'attitude des dirigeants iraniens en ce qui concerne le dossier nucléaire. Vedrine voulait dire par là, que les bonnes portes que les pays arabes de la région doivent frapper, sont celles de la Russie et de la Chine, et non occidentales, particulièrement en ce moment. Ce qui n'a pas été fait jusque-là, alors que Téhéran consolide ses positions et ses percées régionales. Les Etats arabes les plus concernés n'ont, pas selon les analystes politiques, joué la carte des intérêts économiques énergétique ou même géostratégique d'une manière coordonnée avec Moscou et Pékin. Ce qui laisse le champ libre à l'Iran pour mieux tenir ses cartes, et, devenir un passage obligé pour toute solution des crises majeures du Moyen-Orient. Force est de souligner que la force du régime iranien réside à l'heure actuelle, dans le besoin aussi bien de la Russie que de la Chine, de son rôle, de ses «services» que de ses richesses naturelles, sans parler de sa position géostratégique dans cette région, la plus riche du monde, pour faire échouer les tentatives des Etats-Unis visant à dominer le monde. Ce, malgré que ces deux puissances n'aient jamais eu, par le passé, une alliance stratégique avec l'Iran. Ce sont uniquement leurs nouveaux intérêts qui dictent désormais ce rapprochement. D'où le soutien remarqué dans toutes les instances internationales à ce pays ; notamment, au Conseil de sécurité de l'ONU, et, auprès de l'agence internationale de l'Energie Atomique (AIEA). Pour le ministre Saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud al-Fayçal, la percée de cette relation privilégiée de circonstances autre les pays arabes et ces deux grands pays «n'est pas aussi facile que l'on croit» ; néanmoins, «elle n'est pas impossible». La concurrence avec l'Iran demande en cette période délicate, une intelligence, un engagement, et surtout, beaucoup de patience une partie de cette stratégie, qui devrait être mise sur pied conjointement par les Etat-Unis alliés arabes, doit être basée sur le facteur énergétique et sur les investissements. L'autre partie devra porter sur la pensée, la nature du pouvoir, et, la manière avec laquelle il faut prendre en considération les spécificités internes de la Russie et de la Chine. Plus particulièrement, en ce qui concerne la dimension islamique de ces pays arabes. Les responsables, Russes et Chinois, l'avaient déjà dit à tous leurs interlocuteurs arabes qui ont récemment visité leurs pays, précisément, le roi d'Arabie Saoudite, Abdallah ben Abdel Aziz, le chef de l'Etat du Koweït, Cheikh Sabah al-Ahmed Al-Sabah, et il y a deux semaines, le président égyptien, Hosni Moubarak. À Moscou, comme à Pékin, on n'a pas hésité à faire savoir aux interlocuteurs arabes que la distribution de l'argent et des armes aux musulmans de Tchétchénie et de Chine, est inutile. De plus, il n'est pas demandé de conclure des marchés sur le dos de ces populations. Il serait quasi impossible d'endiguer la percée iranienne au Moyen-Orient, et limiter son influence au sein des trois pays arabes si les Etats concernés n'adoptent pas des réformes de taille ; pour éviter de rester sur les périphéries. Cela dit, il faut que les régimes amis aux Etats-Unis exportent des idées contraires à celles propagées par l'exemple iranien. Il faut que ces Etats s'ouvrent politiquement sans craindre les résultats de ce pays en avant et, en même temps, réviser leurs relations économiques en s'orientant de plus en plus vers la diversification des partenariats. En attendant la stratégie Si les pays arabes modérés continuent à donner des cadeaux, surtout aux sociétés américaines et européennes, notamment dans les domaines de l'achat de l'armement, du secteur hydrocarbure, ils ne pourront jamais contrecarrer l'avancée iranienne. Ils perdront aussi la capacité à «acheter la sécurité importée». Là, les exemples ne manquent pas, même si l'on essaye de les camoufler. Il ne suffit pas donc de prendre position aux côtés d'une partie contre l'autre, comme cela se passe actuellement avec le Liban. Mais, d'intervenir directement dans le conflit israélo-palestinien en soutenant sérieusement, et par tous les moyens les droits légitimes du peuple palestinien ; ce, après un éloignement qui a permis à l'Iran de combler le vide dans ce sens ; en aidant financièrement ce peuple, alors que la majorité des Etats arabes se pliaient aux exigences de Washington et participaient, bon gré mal gré, au blocus imposé, auquel les Européens ont été, malheureusement, parti pris. La sortie du rapport de la commission Baker / Hamilton, notamment le volet portant sur la recommandation visant à trouver une solution rapide du conflit israélo-arabe, pourrait être de taille pour les Etats arabes concernés afin de prendre des initiatives significatives, et, par là, récupérer un rôle perdu que l'Iran a pu arracher intelligemment. Le problème palestinien et le retour à l'aide de ce peuple afin de créer son Etat, est la porte qui «réhabilitera» ces Etats arabes et minimisera l'influence iranienne dans la région. Reste à savoir maintenant si les Etats-Unis de George Bush sont prêts à chercher cette solution et l'imposer aux israéliens. Le moment est plus que jamais favorable, soulignent les analystes politiques israéliens les plus avisés. Car Ehud Olmert est très affaibli, et la société israélienne est prête à faire des concessions. Sur le plan irakien, ces Etats arabes doivent démontrer à Washington qu'ils sont capables de jouer un rôle, d'une part dans l'apaisement de la situation jouer un rôle efficace dans la réconciliation nationale, et, de l'autre, prouver que les Arabes Irakiens, sunnites en majorité et chiite, en minorité, peuvent composer avec eux. Le sommet tenu à la Mecque, il y a environ deux mois, rassemblant des leaders arabes irakiens, sunnites et chiites, bien qu'il n'ait pas donné ses fruits, il a été néanmoins un début. D'autant qu'il a montré que Riyad pourrait avoir un rôle. Dans ce même ordre de conception, l'article qu'avait publié récemment, Nawat obeid, le conseiller du gouvernement saoudien pour les affaires sécuritaires, dans le Washington poste sur un soutien probable aux sunnites en Irak, ne cesse de se répercuter à tous les niveaux aussi bien en Irak, que dans le monde arabe et en Occident. Au point que le président Français, Jacques Chirac, aurait demandé à son ambassadeur à Riyad, Charles Henri d'Aragon, de se renseigner rapidement sur ce sujet pour savoir si les dirigeants saoudiens ont pris véritablement la décision de se mêler directement et explicitement dans ce qui se passe en Irak. Dans ce contexte, on apprend de source égyptienne, que les Saoudiens ont discuté discrétement cette éventualité avec les responsables russes. Un message à l'Iran à travers leur nouvel ami, ou bien de savoir leur position au cas où les Etats arabes franchissent le pas ? Un des signes de l'«Offensive» politique arabe visant à réduire l'influence iranienne dans la région, la tentative de prendre en main, certes à travers la Ligue Arabe, le dossier libanais. La proposition d'une solution à la crise et éviter la confrontation sur le terrain est un de ses aspects. Dans ce contexte, on apprend du ministre libanais de l'Intérieur, Hassan al-Sabeh, que les deux parties optent maintenant pour assouplir leurs positions en ne rejetant plus les initiatives, et en haussant moins la barre de leurs revendications. Cependant, force est de reconnaître que Washington et Damas n'ont pas jusque-là donné leur feu vert. La première versait, vendredi dernier, l'huile sur le feu, en annonçant qu'elle a décidé d'accorder une aide militaire à l'armée libanaise. Le timing ne peut que raviver les craintes de l'opposition, notamment le Hezbullah. La deuxième, la Syrie, à travers la déclaration de son vice-président Farouk al-Charah, qui a déclaré que si «son pays voulait intervenir, il aurait arrêté les manifestations en un jour». Déclaration qui a été très mal prise même par les neutres qui, jusque-là, justifiaient les revendications de l'opposition. Face à ces prémices de contre attaque, de la tentative de mettre sur pied une stratégie visant à endiguer l'influence iranienne dans la région et surtout à minimiser l'impact des parties des cartes que Téhéran détient, Mohamed Jawad Larijani, cette figure de proue de l'establishment iranien et chargé du dossier nucléaire, est passé vendredi soir, à l'attaque. «Les pays arabes de la région doivent comprendre que leurs intérêts seront aussi touchés si l'Iran est visé par une résolution de la part du Conseil de sécurité de l'ONU. Cela dit, la confrontation, jusque-là, indirecte et verbale pourrait passer au matériel. Ce qui s'est passé hier à Rafah, à Gaza n'est qu'un début, souligne un analyste politique jordanien proche des frères musulmans.