Scandale du CIH Le rapport d'instruction sur le scandale financier du CIH est entre les mains des magistrats de la Cour spéciale de justice (CSJ). L'investigation judiciaire achevée, l'examen de l'affaire débutera le 19 janvier 2004 à Rabat. Le nombre des protagonistes a été réduit à 18 cadres qui comparaîtront dans le box des accusés. Le rapport d'instruction mentionne également le degré de responsabilité de chacun des prévenus ainsi que les chefs d'inculpation retenus par la CSJ. La boucle est bouclée. La date de l'examen du dossier brûlant du CIH à la Cour spéciale de justice (CSJ) est enfin fixée au 19 janvier 2004. La décision a été prise par le département de la Justice suite à la clôture de l'instruction de l'affaire et la remise du dossier au Parquet de la même juridiction. Les prévenus, dont le nombre a été réduit à 18 personnes, comparaîtront lundi 19 janvier 2004 devant les juges en état de liberté provisoire. Le procureur général du Roi près la CSJ, Abdallah Hamoud, a déjà procédé à l'envoi des convocations aux concernés pour se présenter le jeudi 15 janvier à Rabat. Aucune explication n'a été pour autant fournie aux prévenus sur les raisons de l'assignation. Toutefois, la procédure, telle que définie dans le règlement intérieur de la CSJ, laisse entendre que le Parquet procédera à la lecture des chefs d'accusation maintenus contre les cadres de la banque ainsi que l'annonce de la date du procès. La nouvelle liste arrêtée par Mohamed Sefrioui, juge d'instruction de la CSJ, comprend les noms des ex-dirigeants de la banque ainsi que ceux de leurs collaborateurs (voir encadré) en tenant compte du degré de leur culpabilité dans le scandale financier qu'a connu la banque durant la période allant de 1985 à 1999. De 37 prévenus auditionnés, arrêtés puis remis en liberté provisoire, le juge d'instruction n'a gardé que 18 accusés mis en cause dans des délits de détournements et dilapidation de deniers publics. Les clients de la banque ne sont pas inquiétés Dans sa missive adressée au procureur général du Roi de la CSJ, le juge d'instruction note que les poursuites concernent les accusés dont la culpabilité est avérée dans les malversations et les dépassements qu'a connus cet établissement bancaire. Le rapport d'instruction mentionne également le degré de responsabilité de chacun des prévenus ainsi que les chefs d'inculpation retenus par la CSJ. Cela va de l'implication directe dans des opérations bancaires illégales, à la complicité, en passant par l'abus de confiance et autres délits financiers non moins importants. Ce qui a coûté des pertes considérables estimées par la commission d'enquête parlementaire à 14 milliards Dhs. Cependant, le rapport du juge d'instruction ne fait aucune mention des clients, auparavant cités dans l'enquête de la BNPJ, qui sont toujours redevables de la banque. Selon une source de la CSJ, cette omission n'est pas due au hasard. Depuis la présentation de l'affaire devant la justice, la majorité des clients ont procédé au règlement des créances en souffrance par voie de négociations avec le CIH. Le montant des créances a été réduit pratiquement à 50 % entre 1999 et fin 2002 et la banque a réalisé d'importantes opérations de recouvrement. “Les procédures judiciaires aboutissent rarement dans ce cas de figure. Si le débiteur ne dispose pas de moyens pour payer, il est emprisonné et ce n'est pas une solution efficace”, indique la même source. L'intérêt n'étant pas d'appliquer la contrainte par corps, mais plutôt de récupérer l'argent de la banque. Autre son de cloche, celui des cadres de l'association du CIH. Ces derniers considèrent que les clients récalcitrants, et ils sont nombreux, doivent également faire l'objet de poursuites pénales devant la même juridiction qui traite le dossier du CIH. Etant donné que les actions menées par la banque auprès des juridictions de droit commun (les tribunaux de première instance ) n'ont jamais abouti. Cette protestation, qui semble légitime aux yeux des cadres du CIH, bute encore sur un refus systématique de la Cour. Dans son rapport, le juge d'instruction ne donne aucune indication à propos des mauvais payeurs qui ont bénéficié pendant longtemps des largesses des ex-dirigeants de la banque, commente un haut cadre de la banque. La seule solution qui s'offre à tout établissement bancaire, en cas de litige avec sa clientèle, est d'abandonner une partie des intérêts et des pénalités de retard. Les dispositions de la loi bancaire sont claires et précisent qu'en cas de contentieux, il faut arrêter les intérêts et provisionner. Le CIH n'appliquait pas cela vu qu'il disposait de garanties solides particulièrement dans l'immobilier. Mais, avec la crise qu'a connue ce secteur, le calcul des intérêts de manière normale a fait que les créances douteuses ont atteint des niveaux difficiles à négocier. C'est ce qui explique, entre autres, la détérioration des comptes de la banque. Les ordonnateurs de deniers publics coincés En tout cas, l'expertise bancaire à laquelle a fait appel le juge d'instruction de la CSJ dans cette affaire mentionne les causes des anomalies constatées dans tous les dossiers soumis à l'appréciation des juges. Aussi bien pour le Parquet que pour le juge d'instruction de la CSJ, il est évident que dans le lot des accusés se trouvent des innocents qui vont être acquittés au fil du procès. Dans son rapport, le juge d'instruction fait la distinction entre des contentieux qui peuvent être résolus par les mécanismes de transaction internes et les cas passibles de poursuites judiciaires. Les coupables convaincus de détournements ou de dilapidation de deniers publics sont également identifiables et doivent payer le prix pour que justice soit faite. C'est justement l'enjeu de cette affaire pour que tous les protagonistes que la procédure d'instruction aura confondus répondent de leurs délits et remboursent ce qu'ils ont détourné du CIH. Pour la justice, le problème est que derrière les uns et les autres se cachent les vrais récipiendaires des privilèges qu'ils se sont offerts. Des grands ordonnateurs de deniers publics qui ont octroyé des lignes de crédits et des facilités de caisses en contradiction avec les procédures habituellement appliquées par les organismes financiers. Une véritable rapine organisée, sans vergogne, avec l'assurance déconcertante d'agir en toute impunité. Les deux listes dressées par le juge d'instruction dans l'affaire du CIH Les cadres poursuivis 1-Othman Slimani : ex-Pdg du CIH 2-Moulay Zine Zahidi : ex-Pdg du CIH 3-Abdelhak Benkirane : ex-directeur général adjoint du CIH 4-Kamal Agueznaï : directeur délégué du CIH 5-Rkia Jaïdi : directrice générale adjointe du CIH 6-Driss Hamri : directeur central au sein du CIH 7-Ahmed Basset : cadre évaluateur des crédits 8-Abdallah El Haïmer : directeur général du CIH 9-Abderrazak Ouali Allah : directeur central du CIH 10-Belkacem Aouragh : directeur délégué au sein du CIH 11-Abdellatif Sadek : directeur délégué au sein du CIH 12-Mokthar Filali Anssari : directeur délégué au sein du CIH 13-Zakaria Machich : directeur d'agence du CIH 14-Ahmed Skali : directeur délégué au sein du CIH 15-Moulay Arafa Alaoui : ancien secrétaire général du CIH 16-Mohamed Bennani : directeur d'agence du CIH 17-Mohcine Laraïchi : cadre évaluateur des crédits 18- Naïma Houyame : directrice d'agence en fuite à l'étranger Les cadres relaxés 1-Taoufik Jaïdi : directeur central au sein du CIH 2-Mustapha Baja : directeur d'agence 3-Noureddine Berrechid : directeur d'agence 4-Lahcen Boumediane : directeur d'agence 5-Taïeb Belkahia : cadre, chef de service 6-Abdelkrim Ragni : directeur général du CIH 7-Saïd Boufahim : directeur central au sein du CIH 8-Ahmed Hajji : chef de département au siège du CIH 9-Mohamed Andaloussi : chef de service 10-Mohamed Drissi : chef du département contentieux 11-Abderrahim Taha : chef de division 12-Mohamed Saïdi : directeur d'agence 13-Abderrahman Merdass : chef de division 14-Aïcha Bennani : chef de département au sein de la banque 15-Naima Tayane : directeur d'agence 16-Saâdia Tahour : directrice d'agence 17-Samir Hjioui : directeur au sein du CIH 18- Drissi Riyahi : cadre supérieur de la banque 19- Abdelkrim Koubi : directeur d'agence.