C'est aujourd'hui que le premier semestre prend fin. Pour les finances publiques, il aura été du moins plein de rebondissements. Renflouement massif de la Caisse de compensation dans un premier temps, puis concessions salariales, couplés à un baril de pétrole reparti vers les sommets et à des cours de matières premières incandescents (voire indécents), n'ont fait que creuser le déficit budgétaire, rendant la loi de finances 2011 caduque, déphasée et irréversiblement déséquilibrée. Dès lors, l'éventualité d'une loi de finances rectificative s'imposait d'elle-même. Salaheddine Mezouar, ministre des Finances, avait d'ailleurs, dans un premier temps, expliqué «qu'il fallait attendre le 30 juin pour avoir la visibilité nécessaire pour initier ce processus législatif». Le 30 juin c'est aujourd'hui, mais depuis l'annonce de Mezouar, la donne politique est toute autre. Et ce n'est vraisemblablement pas la publication du Haut commissariat au plan (HCP), parue tout juste hier, mettant à jour les prévisions économiques de l'exercice 2011 et esquissant les projections pour 2012, qui viendra y changer grand-chose. Il faut dire que le ministre RNIste a pour l'instant d'autres priorités. En pleine campagne référendaire, et au passage implicitement préélectorale, Mezouar est toujours en tournée nationale, hier et aujourd'hui dans sa dernière étape, dans nos provinces du Sud. Le contexte est donc particulièrement délicat pour envisager la proposition, la discussion puis le vote d'une loi de finances rectificative pendant son mandat actuel aux Finances. La question sera vraisemblablement reléguée au prochain gouvernement, auquel Mezouar prendra certainement part, selon les observateurs politiques. En attendant, les derniers chiffres du HCP tirent la sonnette d'alarme sur plusieurs aspects, touchant pour une grande part aux finances publiques. Balance des échanges extérieurs, réserves en devise et même compétitivité des entreprises seraient plus que jamais aggravées. Les tendances sur ces indicateurs sont en tout cas nettement dans le rouge pour le second semestre de l'année, ainsi que pour l'exercice 2012. «La balance des échanges extérieurs en valeur dégagerait une accentuation du déficit en ressource qui représenterait 12,2% du PIB en 2011, au lieu de 10,8% en 2010», révèle le HCP dans ses prévisions actualisées. Même l'amélioration de la balance des transferts, compensant une partie de ce déficit, ne permettrait pas de retrouver l'équilibre financier. «Le besoin de financement des transactions courantes de la balance des paiements atteindrait 4,3% du PIB en 2011», poursuit la publication du Haut commissariat. Où trouver alors ces ressources ? L'endettement paraît incontournable, et plus probablement externe qu'interne. Car de plus, comme le HCP le confirme, la mobilisation du financement international et en termes d'investissements directs et d'emprunts extérieurs, serait insuffisante pour atténuer l'épuisement du stock des réserves de change. «Les avoirs extérieurs nets devraient représenter 6 mois d'importations de biens et services en 2011 au lieu d'environ 7 mois en 2010», estime le département de Lahlimi. Un ensemble de tendances dont les évolutions montrent les limites de la politique budgétaire «interventionniste», où l'inflation est artificiellement maintenue à des niveaux très bas, compte tenu du niveau de croissance qui a d'ailleurs été revu à la hausse à 4,8% en 2011. Certes, les décideurs n'ont pas trop le choix, mais il faudra redoubler de vigilance pour éviter la spirale du gouffre budgétaire, incontournable à moyen et long termes, en l'absence de réformes budgétaires structurelles.