Aujourd'hui, je vais encore vous parler cinéma. Mais pas de ce cinéma qui nous fait rêver et nous fait vibrer, ce cinéma créateur d'émotions et de plaisir, ce cinéma qui nous rend moins tristes et plus joyeux, moins bêtes et plus intelligents. Non, je ne vais pas vous parler du vrai cinéma, celui de Godard ou de Pasolini, de Scorcèse ou de Truffaut, de Woody Allen ou de Fellini. Hélas, le cinéma dont je vais vous parler aujourd'hui est celui d'intrus et de mauvais comiques, de faux Tarzans et de Zorros de pacotille, des pantins même pas capables de nous arracher le moindre sourire ni même la moindre larme. Pourtant, ils sont capables de nous faire chialer de honte et hurler de rage. Je ne vous cache pas que pendant longtemps, et jusqu'à un passé récent, ces gens-là me faisaient marrer. Je les voyais gesticuler, vociférer, s'agiter, beugler, discourir, parler pour ne rien dire, et tout ça me faisait vraiment rire. En fait, je ne réalisais pas le danger de ces mecs-là, ces maires-là. Eh oui ! C'est d'élus qu'il s'agit. De «grands élus» ! Que dis-je ? De grands patrons de villes. Mieux ou plutôt pire : de grands patrons de grandes villes ! Et, mon Dieu, quelle ville ! Fès ! La capitale spirituelle, la cité de toutes les lumières, le carrefour des cultures et des civilisations, l'espace de l'ouverture et de la tolérance, le croisement de l'art et du savoir. Savez-vous ce que Fès est en train de devenir, entre les mains de certaines personnes qui confondent mandat d'élu et titre de propriété, carte d'électeur et procuration. C'est à vous faire détester la démocratie! Au fait, je parle, je parle, mais je ne sais même pas si vous êtes au courant de cette nouvelle mascarade de l'homme qui voulait devenir «Mehdi l'attendu» et qui nous arrive par là où on ne l'attendait pas : les festivités. C'est vrai, pour faire un peu d'esprit, que Fès et festivités, c'est toujours allé de pair, et depuis bien avant qu'on institue le système des maires. Mais là, on n'est plus dans les petites fêtes, on est dans les réjouissances surfaites. Mesdames et messieurs, vous êtes, toutes et tous, pauvres ou riches, artisans ou patrons, serveurs ou savants, mineurs ou ministres, invités, au mariage en gros de 100 malheureux orphelins et 100 malheureuses orphelines qui vont enfin connaître le grand bonheur grâce à la générosité de Monsieur le Maire et de Madame le Maire, sous vos sifflements chaleureux. C'est à hurler de rire ! J'en ris aux larmes. Aux larmes, citoyens ! Car, au moment où Madame le Maire va officier les cérémonies de convolage collectif et de «goinfrage» fédératif, Monsieur le Maire, lui, va entonner son plus beau discours démago, sorti de derrière les fagots, contre les spiritueux et les spirituels, les voyous et les voyelles, les modérés et les modernistes, et, c'est tout nouveau, les vieux garçons et les vieilles-filles ! Fassis, vous êtes foutus ! Bon week-end quand même.