Prêt à prendre le large? Le business de la plaisance connaît une poussée de croissance remarquable ces dernières années. Le nombre de plaisanciers reçus par le Maroc a, en effet, progressé de 22% entre 2007 et 2008 (dernières statistiques disponibles) pour atteindre les 330.000 individus... Un rythme maintenu depuis trois ou quatre ans déjà, selon une étude sur le secteur du nautisme au Maroc, publiée récemment par la Fédération française des industries nautiques. Avec ça, on n'en serait encore qu'au début du boom, du moins à voir les ambitions du plan national pour le développement du tourisme de niche actuellement en préparation et dont l'un des objectifs serait d'atteindre 2 millions de plaisanciers (soit plus de six fois plus qu'en 2008) d'ici à peine cinq ans. C'est dire si l'activité de plaisance sera génératrice de business sur les années à venir. Des affaires, il devrait d'abord s'en créer pour la filière nationale d'équipement nautique. Il y a, en fait, tout un marché à conquérir puisque seules 2.000 unités de plaisance voguent actuellement sur les eaux nationales. Flairant le bon filon, les professionnels de la filière se sont déjà regroupés, en juin dernier, dans le cadre de l'Association marocaine des professionels du nautisme et des marinas. Aujourd'hui, le secteur de l'industrie marine comprend deux principaux types d'acteurs. D'une part, les plus importantes sociétés, ayant pignon sur rue. Ce sont surtout quelques chantiers navals de taille moyenne (ATB shipyard, Team Industry, Hesaro...) et une cinquantaine de sociétés spécialisées dans l'importation et la distribution de matériel nautique de marque étrangère (Marina Marbella, Aquaquad, World Marine Logistics, Maroc Nautisme...). D'autre part, vivote un tissu de petits fabricants, artisans, dont l'activité principale est la réparation, et dans une moindre mesure la fabrication et la revente de matériel. «Ces derniers acteurs, atomisés, évoluent bien souvent dans l'économie informelle», note la fédération française des indutries nautiques. De cela, il découle que le chiffre d'affaires de la production locale reste très faible, ce qui fait du marché national davantage un marché d'importation. L'autre niche qui devrait nécessairement profiter du boom attendu de la plaisance est l'assurance couvrant cette activité. Ayant déjà constaté un engouement grandissant, certaines compagnies d'assurance mettent, aujourd'hui, en avant leur garantie plaisance, alors que cette assurance ne bénéficiait d'aucun effort promotionnel il y a encore quelques années. Mais c'est surtout pour les promoteurs de marinas que la machine devrait tourner à plein régime. Pour remplir les objectifs du plan national du tourisme de niche, plusieurs marinas devront voir le jour au cours des années à venir. Par exemple, le port de Tanger devrait prochainement faire l'objet d'une reconversion en port destiné à la plaisance et au tourisme de croisière, notamment. En tout, ce sont 13 projets additionnels de plaisance qui seront mis en place à l'horizon 2020. On s'en doute, un plan de développement aussi ambitieux n'est pas sans intéresser les promoteurs internationaux. Dernier en date, Mourjan Marinas, un promoteur émirati d'immobilier de luxe spécialiste des marinas vient de lancer un projet de construction d'un vaste complexe touristique sur la côte sud-ouest du pays. À voir le besoin à combler, ce ne serait pas se hasarder que dire qu'il y aura de la place pour tout le monde. Aujourd'hui, sur ses 3.500 kilomètres de côtes, le Maroc ne dispose que de six marinas réunissant environ 3.000 anneaux (emplacements pour bateaux) : Rabat, Casablanca, Saïdia, Marina Smir, Kabila et Agadir. Ces sites sont les seuls à disposer véritablement d'infrastructures spécifiques pour l'accueil du nautisme de plaisance. C'est dire que la trentaine de ports que compte le Maroc demeure essentiellement destinés à la pêche ou à vocation industrielle, sans offrir de possibilités d'accueil de plaisanciers. Cette lacune a induit par ailleurs un important retard dans le domaine de la croisière pour le Royaume. Il y a encore quelques années, Tanger et Casablanca étaient comparables en termes de volume de plaisanciers de croisière drainés avec Marseille ou Barcelone. Aujourd'hui, ces deux derniers ports ont creusé l'écart: les deux ports marocains captent aujourd'hui 340.000 plaisanciers de croisière contre deux millions pour Barcelone et un million pour Marseille. À l'actuel défaut d'infrastructure s'ajoute un autre obstacle qui dessert le business de la plaisance. Il s'agit de l'inadaptation de la réglementation. Sur ce point, les experts s'accordent sur l'aspect problématique de certains points du règlement de la navigation au Maroc dont notamment l'obligation de prévenir à l'avance des sorties en bateau, jugée contraire à l'esprit de plaisance ou encore l'absence de permis de navigation au Maroc