Abdellatif Jouahri rassurant, c'est une image qu'on n'avait pas trop l'habitude de voir lors des traditionnelles sorties du gouverneur après la tenue de chaque réunion du conseil de la Banque centrale. Finances publiques, sous-liquidité, stocks de devises... à chaque fois que Jouahri était interpellé sur l'une de ces problématiques qui guettent l'économie nationale, deux réponses revenaient souvent : "Pas inquiétant" et "rester vigilant". L'opinion publique avait certes l'habitude d'assister, par moments, à un optimiste parfois exagéré de certains officiels marocains, mais quand cela vient de Abdellatif Jouahri, lui qui ne fait jamais dans la langue de bois, cela ne passe pas inaperçu. Faut-il y voir une volonté d'apaiser les inquiétudes qui se sont amplifiées après la récente sortie du HCP où il annonçait une croissance de 2,4% seulement avec la persistance de certaines problématiques structurelles, tel que le creusement du déficit commercial ? En tout cas, cette dernière réunion du conseil de la Banque centrale n'a pas apporté de grandes nouveautés, comme c'était le cas lors de celle de mars dernier, où le taux directeur à été réduit pour la première fois en trois ans. Le conseil a cette fois jugé bon de maintenir son taux de référence à son niveau (3%), compte tenu de l'analyse de l'évolution de l'économie nationale. La seule décision à retenir, est l'abaissement du taux d'inflation prévu pour 2012 et que la Banque centrale a ramené à 1,4% au lieu de 1,7%. Il faut dire que cette décision a pris de court plus d'un, notamment après la hausse des prix à la pompe, qui a provoqué une hausse des prix de plusieurs produits. Pourtant, Abdellatif Jouahri a insisté sur le fait que le conseil a tenu compte de cette hausse, mais la baisse importante enregistrée au niveau des prix des télécommunications a tiré vers le bas l'indicateur global de l'inflation. De même, l'atténuation de l'inflation au niveau international et l'affaiblissement de l'activité chez les pays partenaires du Maroc aura au moins eu le mérite d'indiquer que les tensions inflationnistes d'origine externe devraient rester modérées au cours des prochains trimestres. Dans ce contexte, la Banque centrale prévoit qu'au troisième trimestre, l'inflation devrait s'établir à 1,5%, soit au même niveau atteint au cours de l'exercice précédent. Au dernier trimestre de l'année, elle devra s'établir à 2%. Quant à la prévision de l'inflation au cours du premier semestre de l'année 2013, elle sera de l'ordre de 2,1%, au lieu de 1,9% prévu précédemment. Cela dit, la Banque centrale ne manque pas de souligner dans son rapport sur la politique monétaire que ces projections restent soumises à des risques. Il s'agit notamment des incertitudes entourant les cours des matières premières hors énergie, la demande étrangère adressée au Maroc et les effets de second tour liés au relèvement des prix des hydrocarbures. «La matérialisation d'un ou de plusieurs de ces risques pourrait conduire à une déviation du niveau de l'inflation par rapport à la prévision centrale», prévient-on auprès de Bank Al-Maghrib. Pour ce qui est du taux de la réserve obligatoire, que beaucoup de professionnels du système bancaire espéraient voir rabaissé, la Banque centrale a là aussi maintenu le statu-quo, se réservant ainsi le droit de jouer le rôle de «sauveur» des trésoreries bancaires via les interventions hebdomadaires sur le marché interbancaire. À ce titre, le gouverneur de Bank Al-Maghrib souligne que le besoin en trésorerie des banques s'est établi à 60 milliards de DH, que la Banque centrale compense à la fois par ses interventions hebdomadaires, mais aussi par le renouvellement des pensions à 3 mois. Notons par ailleurs que les premiers résultats de la dernière mesure prise pour soutenir le financement des PME semblent satisfaire Jouahri. Selon ce dernier, le marché a enregistré une réaction positive des banques, le financement des PME ayant crû de 14% pour s'établir à 14 milliards de DH. Cependant, «ce n'est qu'un bilan provisoire, en attendant celui prévu à la fin du trimestre pour jauger véritablement l'apport des mesures prises».