Lors de la séance plénière du 8 décembre consacrée aux questions orales, la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable a dévoilé une série de mesures structurantes destinées à refonder le secteur minier. Entre sécurisation du travail, nouveaux projets de loi et ambitions industrielles, le gouvernement entend repositionner les mines comme un pilier de souveraineté économique et territoriale. En prenant ses fonctions, Leila Benali a été immédiatement confrontée à une réalité brutale. Parmi les premiers dossiers transmis à la nouvelle ministre de la Transition énergétique, figurait la disparition tragique de cinq travailleurs des mines dans un accident. Cet événement a servi de point d'ancrage à une réforme qui entend replacer la protection humaine au cœur de la politique minière. Devant la Chambre des représentants, la ministre a rappelé que cette activité constitue un pilier essentiel de l'économie. Elle représente, selon ses mots, «10% du produit intérieur brut», près de «20% de la valeur des exportations nationales» et génère «plus de 40.000 emplois directs». Ces chiffres donnent la mesure d'un secteur stratégique, engagé dans une transition où se conjuguent pressions économiques et recherche de souveraineté industrielle. La sécurité des mineurs comme fondation de la réforme Leila Benali a ensuite donné une dimension plus personnelle à son intervention en revenant sur ce dossier inaugural. «Le premier dossier que j'ai reçu le jour même de ma prise de fonction concernait la mort de cinq travailleurs miniers». Une phrase qui a marqué l'hémicycle et qui éclaire l'ensemble des réformes engagées. Cette réalité a poussé le gouvernement à retirer en 2021 le projet de loi 33-13 pour le réécrire intégralement. La ministre explique que ce travail a été mené afin de «placer la vie et la sécurité du travailleur minier parmi les priorités». C'est dans ce cadre que s'inscrit, notamment, la future carte professionnelle garantissant à chaque mineur «l'ensemble de ses droits et acquis» et visant à mettre fin aux «drames qui se produisent dans les mines». Le texte remanié, devenu projet de loi 72-24, dépasse la simple correction technique. Il propose de simplifier les procédures, d'encourager l'industrie de transformation, de créer un comité national dédié aux minerais stratégiques et de renforcer le contenu local. Pour la responsable gouvernementale, cette refonte s'inscrit dans un mouvement plus large d'amélioration de la gouvernance et de consolidation des chaînes de valeur nationales. Des territoires longtemps en marge replacés au centre La ministre a ensuite élargi son propos aux réalités régionales, rappelant que les zones minières traditionnelles comme le Tafilalet et Figuig ne peuvent plus être considérées comme de simples périphéries. Leur potentiel, tout comme leurs vulnérabilités, font désormais partie intégrante de la stratégie nationale. À ce titre, Benali est revenue sur la 3e réunion du conseil d'administration du CADETAF, qu'elle a présidée le vendredi 31 octobre 2025, dans le cadre de la mise en œuvre de la loi 74-15 relative à la zone minière de Tafilalet et Figuig. Cette séance, consacrée au bilan de l'année 2025 et au programme de travail 2026-2027, marque, selon elle, «un tournant dans la gestion de cette institution» et «un nouveau départ pour la conduite de ses missions». Cette vision s'est également nourrie de ses déplacements sur le terrain. Ses visites dans le Tafilalet lui ont permis de «constater de près les contraintes auxquelles font face les artisans miniers traditionnels». C'est dans cette logique qu'une convention «très importante» a été signée pour moderniser la prospection, renforcer les services techniques et créer des zones industrielles dédiées, dont certaines incitatives ou franches. L'objectif affiché est clair : intégrer pleinement ces territoires au nouveau modèle de développement et leur offrir des perspectives économiques durables. La province de Jerada occupe, elle aussi, une place singulière dans l'intervention de la ministre. Chargée d'une mémoire énergétique forte, la ville bénéficiera d'un plan intégré destiné à lancer «une nouvelle génération de programmes de développement territorial». L'objectif est, entre autres, de mettre en place une plateforme numérique reliant directement les mineurs de charbon au marché national afin de leur garantir «un revenu équitable et un cadre légal clair». Une ambition industrielle qui dessine les prochaines années Dans sa dernière partie, Leila Benali inscrit clairement l'avenir du secteur dans une trajectoire industrielle assumée. Elle évoque une initiative décrite comme «une innovation africaine», présentée récemment à Marrakech, et consacrée à la valorisation des matériaux miniers recyclés. Pour la ministre, cette orientation traduit la capacité du Maroc à anticiper les transformations globales. Le gouvernement prépare également des chantiers d'infrastructures reliant Nador et Jorf Lasfar, avec des axes routiers et des pipelines destinés à soutenir «le décollage national de l'industrie de transformation minière». L'année 2026 marquera par ailleurs le lancement du registre minier national digitalisé, appelé à regrouper «plus de deux cent quarante procédures administratives» afin de «simplifier les démarches, de renforcer la transparence et d'améliorer l'accès à l'information». Enfin, la transformation de l'Office national des hydrocarbures et des mines en Office national des industries minières, à travers le projet de loi 56-24, sera examinée prochainement. Un tournant que Benali qualifie d'essentiel en vue de dynamiser la recherche, de diversifier les financements et d'améliorer la gouvernance sectorielle. Faiza Rhoul / Les Inspirations ECO