La flambée du cacao et la pression sur les budgets ne dissuadent pas les entreprises qui tiennent mordicus à leurs stratégies de cadeaux d'affaires. Indétrônable, le chocolat conserve une forte valeur symbolique mais voit son statut évoluer au profit de présents plus porteurs de sens, d'identité et d'impact. C'est un marché en pleine mutation qui se dessine, notamment autour de l'artisanat, du «Made in Morocco», de l'expérience immatérielle et de la responsabilité sociale. C'est pour instaurer un climat de convivialité et entretenir des relations professionnelles durables que la pratique des cadeaux de fin d'année s'est progressivement imposée entre partenaires économiques. Cette attention, devenue presque rituelle, reste un levier puissant de fidélisation et de reconnaissance mutuelle. Longtemps, le chocolat en a constitué l'incontournable vedette. L'essor de ce marché a d'ailleurs conduit, au fil des ans, les chocolatiers à rivaliser d'ingéniosité pour proposer les compositions originales, les associations de saveurs et les présentations les plus raffinées. Mais ces dernières années, la donne a changé. La flambée du cours du cacao, jusqu'à 12.000 dollars la tonne à la Bourse de New York, a profondément bouleversé les équilibres du secteur. Dans ce panorama, le chocolat conserve-t-il sa place d'antan dans l'univers des cadeaux d'affaires ? La valeur du lien prime Si certaines structures continuent d'investir dans des présents d'exception, porteurs de sens, d'émotion et d'ancrage territorial, d'autres reconnaissent que leur politique de fidélisation a subi une transformation structurelle. La logique purement quantitative a cédé la place à une approche qualitative, recentrée sur la valeur du lien et la cohérence du message transmis. «La tendance est à la recherche d'une forte valeur perçue, qui n'est pas nécessairement proportionnelle au coût», résume un responsable de la communication d'un grand groupe. Ainsi, la sélection des cadeaux obéit à des critères de plus en plus précis. Le premier demeure l'alignement stratégique. Le cadeau devient un prolongement de l'identité de l'entreprise, une incarnation tangible de ses valeurs. Aux organisations qui revendiquent l'innovation, on privilégiera les objets design, technologiques ou connectés. À celles qui cultivent leur enracinement territorial, on mettra en avant l'artisanat local et les savoir-faire traditionnels. La durabilité s'est, par ailleurs, imposée comme un impératif. Les donneurs d'ordres se montrent désormais particulièrement exigeants sur l'impact environnemental, la traçabilité des produits et l'usage d'emballages écologiques. Dans ce paysage en recomposition, le chocolat conserve une forte charge symbolique, mais son statut a profondément évolué. Fini le cadeau universel et interchangeable. Le chocolat industriel recule au profit du chocolat artisanal, porteur de récit, souvent enraciné dans le terroir marocain. Les coffrets de chocolats fins signés par des artisans reconnus, associés à une infusion rare du Souss ou à des amandes du Rif, rencontrent ainsi un succès croissant. De plus en plus, le chocolat s'insère dans un ensemble plus vaste, valorisant le patrimoine gastronomique national, lorsqu'il s'agit de concevoir un cadeau à forte dimension culturelle, identitaire et gustative. Nouvelles tendances Ce mouvement est confirmé par les professionnels du secteur. Pour Sofia El Kendouci, gérante de l'enseigne Le Monde de Sophie, la demande s'intensifie fortement à l'approche des fêtes, sous l'effet conjugué des budgets annuels à consommer et de la multiplication des événements institutionnels. Le handmade local parvient progressivement à s'imposer face aux franchises internationales, en misant sur l'authenticité, la qualité et la personnalisation. Malgré la hausse du prix du cacao, les chocolatiers tentent de préserver leurs marges en optimisant leurs volumes, en rationalisant leurs chaînes d'approvisionnement et en développant des économies d'échelle. La période de fin d'année est déterminante, et peut représenter jusqu'à 80% de leur chiffre d'affaires annuel. Au-delà du chocolat, le marché marocain du cadeau d'affaires est traversé par plusieurs tendances. La première est la montée en puissance de l'expérience immatérielle, réponse directe à la quête croissante de sens et de moments de qualité. La seconde est l'affirmation d'un «Made in Morocco» haut de gamme et d'exception. Il ne s'agit plus simplement d'offrir un produit local, mais de célébrer l'excellence du savoir-faire marocain. Les coffrets, associant maroquinerie fine, céramiques ou encore parfums aux essences rares, séduisent ainsi une clientèle exigeante, aussi bien locale qu'internationale. L'autre évolution majeure est l'essor des cadeaux utiles et connectés, particulièrement dans les secteurs de la tech et des services. Les objets du quotidien, enrichis par le design ou la technologie, enceintes bluetooth, kits de bureau ergonomiques, accessoires intelligents, s'imposent désormais comme des instruments privilégiés de communication relationnelle. Enfin, la tendance du «Gifting with purpose», ou cadeau à impact, connaît une adoption rapide. Désormais, nombreuses sont les entreprises qui consacrent une part de leur budget à des dons pour des causes sociales ou environnementales, effectués au nom de leurs partenaires. Cette pratique, lorsqu'elle est portée avec sincérité et transparence, contribue à renforcer durablement l'image RSE et le capital de confiance des organisations. Maryem Ouazzani / Les Inspirations ECO