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Une catastrophe écologique passée sous silence
Publié dans Les ECO le 21 - 01 - 2010

Un peu comme Janus, Mohammédia offre deux visages. Située à quelques kilomètres de Casablanca, première métropole du pays, la ville porte encore le nom usurpé de «Cité des fleurs». Mais, dans la réalité, même si prétendument il y ferait bon vivre, la ville devrait porter un autre nom, puisqu'il ne fait pas bon y respirer. En effet, si son parc automobile réduit et ses constructions peu élevées séduisent les citadins qui fuient le tumulte des grandes villes, Mohammédia souffre d'un mal profond: la pollution. Eau, air, sol... d'où vient le mal ?
El Maleh ne fait plus rire !
Si le mot «El Maleh» évoque habituellement le rire, (allusion faite à Gad) elle suscite le dégoût des habitants de la cité de Mohammédia. La puanteur de l'oued El Maleh, la rivière qui longe la ville pour aller déverser ses eaux usées directement dans la mer, est légendaire. Principal responsable de cette situation, la décharge de Mesbahiat. «Depuis plus de 20 ans, les déchets ménagers de Mohammédia et des communes avoisinantes sont acheminés vers cette décharge de 6 ha, qui ne dispose ni de système de récupération, ni de recyclage», lance Abderrahim Diab, ingénieur en environnement et originaire de la ville. Ceci en fait un véritable danger à ciel ouvert pour les habitants qui y sont mitoyens tout d'abord, mais surtout pour les centaines de chiffonniers qui y travaillent quotidiennement. «La décharge de Mohammédia est un véritable désastre à la fois écologique et sanitaire. Plus grave, la fumée noire et nauséabonde qui s'en dégage est souvent poussée par le vent vers les quartiers de Hassania et Essaâda», décrit Diab. Ce spécialiste de l'environnement, soutient que dans sa famille, «les enfants nés à partir des années 1990 souffrent en grande majorité de maladies respiratoires, que ce soit d'allergies ou d'asthme».
Les autorités locales reconnaissent cet état de fait. «La plage située près du centre est plus polluée que les autres, il faut l'avouer. Cependant, deux plages de Mohammedia, dont «les sablettes», ont été classées parmi les plus propres du Maroc», lance Jamila El Youssi, chef du service environnement à la préfecture de Mohammédia. Grande nouvelle, la décharge ne fera plus partie du paysage urbain dès l'été prochain. «Elle va être réhabilitée et fermée. En effet, une décharge interprovinciale, située entre Mohammédia et Benslimane, est en cours d'aménagement», ajoute El Youssi. Mis à part son emplacement, quel est l'atout supplémentaire que présente cette nouvelle décharge? «Les déchets seront traités, puis recouverts par de la terre végétale. Le recyclage sera également de rigueur». Les promesses environnementales sont nombreuses. La Lydec compte transférer toutes les eaux usées de Mohammédia vers Sidi Bernoussi, pour y être traitées sur place. El Youssi rappelle en effet que «si un prétraitement des eaux usées est actuellement réalisé, il reste insuffisant et doit être accompagné d'autres opérations». Ce bel élan d'optimiste se trouve vite dissipé lorsque l'on se promène sur les plages de Aïn Sebaa. Plusieurs conduits d'eaux usées sont déversés directement dans la mer. Les pêcheurs sur place affirment que «ces déchets liquides sont ceux de la centrale thermique voisine». Ils font évidemment référence à la centrale de l'ONE qui rejetterait mercure, soufre et dioxyde de carbone dans les eaux du littoral. Contactée à plusieurs reprises, la direction de l'ONE se drape dans son silence et donc rien ne viendra infirmer ou confirmer les propos de ces pêcheurs peu au fait des réalités environnementales. Les autres «officiels», eux, n'ont de cesse d'évoquer les projets futurs, prévus pour préserver la qualité de l'air et de l'eau à Mohammedia. Une manière de ne pas évoquer la situation actuelle qui, à en croire les habitants, est épouvantable. Ne sont-ils pas les premiers concernés par l'effet de la pollution, eux qui doivent la supporter quotidiennement ?
La pollution a le vent en poupe
«Certains jours, une pluie de particules polluantes, dont l'origine reste un mystère, s'abat sur la ville», s'exclame un riverain. Pourquoi les propres habitants de la ville se plaignent-ils de la pollution? Il n'y a pas de fumée sans feu. Et qui dit fumée, veut aussi dire pollution industrielle. Deux noms sont évoqués : la SAMIR et la Centrale thermique de l'ONE. Ces derniers se plaignent souvent que leurs efforts en matière d'environnement restent ignorés par les habitants de Mohammédia. Et à ce propos justement, les questions de «Les Echos» sont restées sans réponse, la SAMIR ayant tardé à apporter ses précisions. «La qualité de l'air à Mohammédia dépend en grande partie des conditions météorologiques, et plus particulièrement de la direction, de la vitesse et de la stabilité des vents, qui sont parfois défavorables à la dispersion des polluants émis». C'est ce qu'évoque la Direction de la météorologie nationale, qui assure la diffusion des bulletins hebdomadaires de la qualité de l'air. Au final, le principal mis en cause, c'est le vent, et non pas les industriels! Pourtant, une étude réalisée en 2002 par Airpol sur des enfants asthmatiques (âgés entre 12 et 15ans) de la ville de Mohammedia, principales victimes de la pollution, a permis d'établir que l'apparition des crises d'asthme et de toux sèche augmente lors des jours pollués en dioxyde de soufre (SO2) et en monoxyde d'azote (MO). Or, ces deux gaz correspondent à ceux émis par les grandes unités industrielles. Est-ce encore la faute au vent? Une autre étude de même type est actuellement réalisée par le Cadastre (direction dépendant de l'Agence de la conservation foncière), en collaboration avec le département de l'Environnement. «Elle a pour but d'établir un inventaire des émissions de gaz, et d'évaluer leurs incidences sur la santé de la population, pour ensuite élaborer un plan d'action de réduction de la pollution atmosphérique», indique une source au sein du secrétariat d'Etat à l'Eau et à l'environnement. En attendant que les résultats de ces études soient connus, le mystère reste aussi opaque que le nuage de fumée qui entoure souvent la cité des fleurs. Les documents de la météorologie nationale, qui décrivent quotidiennement la qualité de l'air restent vagues. En effet, la pollution de l'air y est divisée en 3 grands niveaux, à savoir «bon», «moyen» et «médiocre». Les chiffres précis restent introuvables ou, en tout cas, ils ne nous ont pas été communiqués. Contacté par «Les Echos», un expert en fonction dans un laboratoire national, a même affirmé que «les taux de pollution sont équivalents dans toutes les villes du Royaume. À titre d'exemple, Mohammédia est aussi polluée que Fès». Cette ville serait-elle également située dans un espace partagé par trois géants industriels dont une raffinerie de pétrole et une centrale thermique à charbon?
Les industriels se mettent au vert
Les discours officiels des autorités locales et des industriels restent pourtant optimistes.
Les programmes de préservation de l'environnement se multiplient. Citons à titre d'exemple le Programme de gestion et de protection de l'environnement (PGPE) à Mohammédia, fruit d'un partenariat entre le secrétariat d'Etat chargé de l'environnement (SEE) et la Coopération technique allemande. (GTZ) «Lancé en 2002, le programme présente trois composantes. Celle qui concerne Mohammédia vise la mise à niveau environnementale du tissu industriel», explique Abdelaziz El Mrani, conseiller technique à GTZ. L'année 2010 sera environnementale ou ne sera pas. Tel semble être le nouveau slogan des autorités marocaines : Charte
de l'environnement, villes vertes, célébration pour la première fois au Maroc
de la Journée de la terre en avril prochain, et la liste est longue... Finalement, les raisons qui poussent le gouvernement et les industriels à s'intéresser de près à cet aspect importent peu.
Que ce soit pour une raison humaine, ou juste pour le label, l'essentiel est que Mohammédia doit vite retrouver un état environnemental moins désastreux pour mériter d'être la bien nommée «Cité des fleurs».
L'Etat, anti-chiffonniers ?
Nombreuses sont les familles qui vivent de nos rebuts.
Les décharges publiques, telles que Mesbahiat à la périphérie de Mohammédia, ou de Akrech près de Rabat, sont un microcosme où se côtoient des centaines de chiffonniers (ou récupérateurs) de tout âge. Les conditions de travail y sont inhumaines.
Un diagnostic sur la problématique du tri, réalisée par le Programme de gestion et de protection de l'environnement (PGPE), a révélé que les récupérateurs sont touchés, à 75%, par l'analphabétisme. 24% de cette population sont des enfants et 20% des femmes. Cette population souffre principalement de maux de tête, d'asthme, de maladies de la peau et de blessures aux mains. Si l'opinion publique est choquée par cette réalité, il n'empêche que cette zone de travail à ciel ouvert permet à plusieurs familles de survivre. Quant à certains industriels, ils doivent une fière chandelle à ces trieurs professionnels à qui ils rachètent leur collecte en gros. Pourtant, ce «métier» risque de disparaître. Dans le Programme national de gestion des déchets ménagers (PNDM) doté d'un budget de 40 milliards de DH et qui s'étale sur la période 2008-2023, l'aspect social n'est pas pris en compte et entraînerait la suppression de 3.500 emplois de récupérateurs de déchets.
Au lieu de risquer d'appauvrir ce pan de la population, pourquoi ne pas structurer ce «métier» ingrat, en protégeant les récupérateurs des dangers qu'ils encourent?
Salah Souabi, responsable du laboratoire de génie de l'eau et de l'environnement- Université Hassan II-Mohammédia:«Les unités industrielles doivent agir en amont, pour atténuer les risques»
Les Echos : En quoi consiste le travail réalisé au sein de votre laboratoire ?
Salah Souabi : Nous avons en charge le développement des axes de recherche concernant les impacts des rejets à la fois liquides et solides des unités industrielles. En effet, la pollution de ces dernières touche de plein de fouet à la fois les sources d'eau (nappe phréatique), le sol et l'air. Nous sommes aujourd'hui aptes à réaliser un diagnostic des rejets industriels. Au vu des résultats, les rejets liquides n'ont pas beaucoup d'impacts sur la santé au sein de la ville de Mohammédia.
Quelles sont vos propositions en matière de préservation de l'environnement?
Première des solutions, donner au recyclage des déchets solides la place qu'il mérite. Beaucoup d'études prouvent que ce type de déchets peut être valorisé, aussi bien les papiers, le carton, que la ferraille, pour ne citer que ceux-ci.
Les unités industrielles ont-elles un souci environnemental ?
Les grandes unités industrielles telles que la SAMIR, possèdent des décharges publiques ainsi que des stations d'épuration aménagées au sein même de leur espace de travail, et qui répondent aux normes établies. Ce qui les aide, c'est qu'elles possèdent les ressources financières leur permettant de respecter l'environnement, contrairement aux PME-PMI. Le tissu industriel marocain étant composé en immense majorité de ce type d'entreprises, (95%) ce sont celles-ci qui ont besoin d'être soutenues.
Un conseil environnemental particulier à donner aux unités industrielles?
Il faut agir en amont du processus de production. Pour gérer de façon adéquate la question environnementale, la sensibilisation est primordiale. Si la production est contrôlée, la consommation en matières premières l'est également. L'industrie fabrique au final un produit de qualité, en dégageant un minimum de rejets. Tandis qu'agir en aval, cela coûte cher, et un pays en développement comme le Maroc n'en a pas les moyens financiers. Les machines de traitement des déchets ainsi que le suivi de la pollution ont en effet un coût élevé, alors que la sensibilisation est gratuite


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