Faire laver sa voiture sans une goutte d'eau consommée, c'est la formule que propose un nouveau genre de business qui commence à faire ses premiers pas au Maroc. Il s'agit du lavage véhicule écolo sans eau. Le créneau a été investi récemment par deux opérateurs. Le premier est Vireo, une franchise locale, et l'autre, Greenwash, nous vient de la France. En effet, si les enseignes diffèrent, le concept reste tout de même similaire : partir du concept «écolo» pour établir un business. Leurs arguments de vente ? «Ce sont des centaines de litres d'eau qui sont économisés par véhicule lavé», scande-t-on d'un côté. «On lustre, nettoie et protège pour quelques millilitres de gouttes d'eau», lance-t-on de l'autre. Le principe appliqué est également partagé. «Ces millilitres de gouttes d'eau» proviennent en fait d'un produit nettoyant, formulé à base de cire naturelle ou d'huiles essentielles, et vaporisé sur la surface de la carrosserie puis frotté avec un tissu microfilm. Sur le long terme, ce sont des microrayures évitées, et une protection durable de la couche peinte de la carrosserie du véhicule, ce qui réduit les fréquences de toilettage de ce dernier. Business «durable» ? Démarrer des affaires est une histoire. Les développer et les rendre économiquement en est une autre beaucoup plus compliquée. Vireo est l'enseigne la plus ancienne à ce jour sur le territoire national. Il s'agit d'une «franchise 100% marocaine», comme le précise Hicham Bayed, le patron de l'enseigne à Casablanca. Créée depuis juillet 2008, elle a pris tout son temps pour s'installer avec des centres ouverts à Casablanca, Rabat, et s'est également déjà exportée hors des frontières marocaines (Grenoble et Paris). Sur la capitale administrative, cette représentation a été ouverte en partenariat avec le Compagnie générale des parkings (CGP), filiale de la CDG. Le tout roule sur un chiffre d'affaires de 600.000 DH durant la deuxième année d'exercice, et des prévisions de hausse de 20% pour les trois prochaines années. À l'horizon 2012, la franchise marocaine devrait se retrouver à Tunis, Beyrouth et Abou Dhabi. Le secret de ses ambitions ? Hicham Bayed l'explique par le fait qu'il existait un vide complet, et aussi par la qualité du service qui garantit les mêmes résultats -ou plus- comparé au lavage classique. Pour développer ce service, des enseignes du genre de Vireo ont dû se baser sur des études de marché. Au premier abord, on serait tenté de dire que lancer ce genre de business écolo dans un pays en développement serait risqué. Mais les résultats ressortis de l'étude de marché nuancent ce constat. «Le Marocain est écologique, quand c'est économique», résume Bayed. La principale leçon à retenir est donc qu'il serait tout à fait inutile pour ces franchises de jouer sur la sensibilité «verte», mais plutôt sur le rapport qualité-prix. «Nous avons alors tranché pour des formules tarifaires en abonnement à la portée de l'automobiliste marocain moyen», explique le président de Vireo. Et le projet est rentable. Il a d'ailleurs commencé à séduire plusieurs concessionnaires de marques de véhicule étrangères, comme CFAO et SMEIA, avec un concept mobile développé par la franchise marocaine. Morocco Mall, Marsa Maroc, Sport Plazza, Kitéa, Génat... sont aussi autant d'enseignes qui ont noué des partenariats contractuels avec cette franchise. Clientèle croissante Toujours sur le même registre et jouant sur le même terrain, Greenwash. Ajoutez «Center» à ce mot, et vous avez le nom d'une toute nouvelle autre enseigne qui a «osé» s'aventurer sur le créneau local du lavage auto sans eau. Le centre casablancais est niché en plein milieu d'un quartier d'affaires. Cela laisse supposer le profil de la clientèle qui se prête aux prestations de cette franchise, basée à Paris. «C'est surtout des clients de la classe moyenne et plus». À peine un mois après la première voiture lavée, Greenwash Center en est à présent à plusieurs cylindrées qui font la queue dans ses 410 m2 de locaux, «Le plus grand centre d'Afrique pour l'instant», se targue Djibril Sarr, le responsable développement à l'international. Et à l'international, justement, l'enseigne prévoit prochainement une installation dans d'autres capitales du monde. Pour ce qui est du Maroc, «On est en cours de négociations pour l'ouverture de franchises dans des villes comme Tanger, Marrakech, Agadir, etc.». Par contre, si le voile est levé sur les ambitions de développement de nos deux prestataires, le mutisme est partagé sur leurs fournisseurs respectifs. Concurrence oblige sûrement. La seule certitude est que ces fournisseurs sont français. Ils sont également disponibles sur Internet, en surfant sur n'importe quel moteur de recherche, libre aux conducteurs de s'en servir à domicile. Quoi qu'il en soit, le contexte du prochain salon de l'automobile tombe parfaitement bien pour des enseignes de ce genre, pour communiquer autour de ce concept qui en est encore à ses balbutiements au Maroc. Bientôt copié... et égalé ? Laver écolo n'empêche que la voiture demeure à ce jour l'un des plus classiques émetteurs de CO2 dans le monde. Mais l'arrivée de ce concept sur le marché marocain semble un prélude à une dépollution progressive de l'ensemble du secteur automobile, en attendant le premier tour de chauffe d'une voiture électrique sur nos routes. Ce qui est sûr, c'est que les deux patrons interrogés sont sûrs d'être partis sur le bon pied et s'attendent à l'arrivée de nouveaux concurrents bientôt sur le même marché. Ces futurs opérateurs seront à coup sûr des franchises importées de l'Hexagone d'une part, mais aussi les grandes compagnies pétrolières exploitantes de stations-service au Maroc. Ces dernières proposent en effet actuellement un service de nettoyage de véhicule à haute pression et en self-service. Pour conserver leurs clients, elles se verront sans doute obligées de revoir leurs procédés, et d'adopter in fine la formule du lavage à sec. On n'en est certes pas encore là. Pour l'instant, «l'hémorragie» hydrique continue pour faire briller nos véhicules... Hicham Bayed : Président de Vireo «En plus du développement à l'international que nous ciblons, nous avons déposé un brevet auprès de l'Ompic pour un concept de stations self service de lavage sans eau que nous souhaitons développer au Maroc. Nous offrons du haut de gamme. Ce haut de gamme se situe au niveau du service, mais pas au niveau de la distinction élitiste de clientèle. On a voulu miser sur ce créneau écolo du lavage pour faire marcher ce business. Mais il faut le reconnaître : il arrive à point nommé au Maroc». Djibril Sarr : Responsable développement à l'international chez Greenwash Center «Je pense que ce secteur se développera très vite. Si on voit en effet le rythme effréné sur lequel évolue le parc automobile des grandes villes marocaines, on ne peut être qu'optimiste sur cela. En plus, le parc national se dote chaque année de nouveaux modèles de véhicule conçus avec des carrosseries qui nécessitent des traitements spéciaux et parfois délicats. Il est vrai que le secteur a enregistré un retard de démarrage par rapport à d'autres pays, mais les gens s'y intéressent de plus en plus. La preuve en est que, lors de notre première implantation au Maroc, nous n'avons pas eu vraiment besoin d'une communication agressive de masse pour nous annoncer. L'information a circulé toute seule, de bouche à oreille, et résultat : notre magasin ne désemplit pas ! ».
