Encore trop cher, l'impôt au Maroc. C'est le moins que l'on puisse déduire à parcourir la dernière étude intitulée «Global Effective Tax Rates», que vient de diffuser le cabinet américain PricewaterhouseCoopers (PwC). La grande révélation en est que, de 2006 à 2009, le Maroc a prélevé un taux d'impôt moyen effectif de 33,9%, ce qui le classe... deuxième mondial sur un groupe de 59 pays considérés par PwC. Seul le Japon a prélevé plus sur la période avec un taux de 38,8%. Et encore, le pays du soleil levant songe à réduire de cinq points de pourcentage son taux d'impôt sur les sociétés à compter de l'année en cours, ce qui pourrait sous peu propulser le Maroc en pole position du classement. Où en est-on de la compétitivité ? Ce qui est sûr, en l'état actuel des choses, c'est que le Maroc est bien au-dessus des standards de taux pratiqués par les pays non membres de l'OCDE et présentant un niveau de développement comparable. En effet, dans leur ensemble, ces pays enregistrent une moyenne de 16,5% de taux d'imposition effectif de 2006 à 2009, soit moins de la moitié de ce que prélève le Maroc. En outre, le royaume fixe la barre considérablement plus haut que plusieurs pays de son proche voisinage. Pour s'en convaincre, notons que dans toute la région de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient, mis à part le Maroc, un seul pays pratique un taux d'imposition effectif à deux chiffres. Il s'agit d'Oman qui, en dépit de cela, demeure bien loin du record marocain avec un taux d'imposition effectif de 11,9%, qui classe la nation 50e à l'échelle mondiale, selon le rapport de PwC. Tout cela n'est naturellement pas pour rassurer sur les chances du Maroc dans l'actuelle compétition qui bat son plein au sein de la région MENA pour attirer les investisseurs internationaux. À ce titre, des observateurs commentant l'étude de Pricewaterhouse avancent, sans ambages, qu'il est préoccupant qu'un pays comme le Maroc, soucieux d'attirer les entreprises internationales, continue de pratiquer des taux d'imposition aussi élevés. Un paradoxe que les mêmes commentateurs notent également chez l'Indonésie (quatrième mondiale en termes de prélèvements fiscaux), l'Afrique du Sud (11e) ou encore la Thaïlande (16e). Poussant la logique, on avance même la réforme du système de taxation comme une piste à explorer sérieusement par les pays de la région MENA pour répondre aux revendications des jeunes réclamant plus d'opportunités d'emploi, partant de la logique que moins de prélèvements fiscaux favorisent l'implantation d'entreprises internationales et donc le développement de l'emploi. Le Venezuela, un cas d'école On pourrait toutefois nuancer cet avis en rappelant qu'un faible niveau de taxation n'est pas le seul facteur motivant les entreprises à établir leur activité dans un pays donné. Preuve en est que des pays tels que le Japon, l'Italie, l'Allemagne, les Etats-Unis et l'Australie qui se retrouvent dans le top ten des pays pratiquant les plus forts niveaux de prélèvements d'impôts entre 2006 et 2009 demeurent également les économies les plus dynamiques au monde. Toujours est-il que dans la région MENA, les pays du Golfe semblent beaucoup croire à l'opportunité de pratiquer de faibles niveaux d'imposition et exploitent ce levier à l'extrême jusqu'à prélever les plus faibles taux d'impôt de tout le classement de PWC. Plus singulier encore, ces pays vont encore plus bas que des paradis fiscaux de notoriété mondiale tels le Liechtenstein, le Panama ou encore les îles Cayman. C'est spécifiquement aux Emirats arabes unis que revient la palme du plus faible niveau de prélèvement fiscal, soit un taux de 2,2%. Qatar, Arabie saoudite, Koweït ou encore Bahreïn confortent les pays du Golfe en tant que cluster pratiquant les plus faibles niveaux de prélèvements à l'échelle mondiale. En fait, seul le Venezuela prélève moins d'impôts que l'ensemble des pays du Golfe et même moins que l'ensemble des pays classés par PwC. Il faut dire que ce pays sud-américain affiche un taux d'impôt effectif négatif de -3,4%, vraisemblablement dû à des reports déficitaires. Quand PWC dit inquiétant, la Banque Mondiale dit moyen L'étude «Paying taxes 2011», diffusée il y a encore peu par la Banque mondiale positionne le Maroc au 99e rang sur 183 pays en termes de lourdeur des prélèvements fiscaux auprès des entreprises. Un positionnement de milieu de tableau qui diffère du tout au tout du deuxième rang mondial attribué par l'étude de PriceWaterhouse Coopers (PWC). Pourquoi un tel écart? La réponse se trouve essentiellement dans la méthodologie adoptée par l'un et l'autre des classements. L'étude de la Banque mondiale se base sur le taux d'impôt global, autrement dit la somme des taux d'impôt prélevés au titre de l'impôt sur le revenu et les sociétés ainsi que d'autres taxes. En revanche, PWC se base sur le taux d'impôt effectif (équivalent à l'impôt total sur le résultat d'entreprise divisé par le résultat avant impôt). En termes plus simples, le cabinet américain considère ce qui est effectivement prélevé auprès de l'entreprise au titre de l'impôt. Par ailleurs, il est à préciser que l'étude de PWC a été commandée par Business Roundtable, une association de grandes entreprises américaines. Pour son étude, PWC a calculé et compare les taux d'impôt effectifs par pays pour les 2.000 plus grandes entreprises au monde telles que classées par la liste «2010 Forbes Global 2000».