Stratégie floue, manque de visibilité, absence de capitaine. Fin de l'accalmie, les critiques reprennent autour du groupe Lagardère. Tout commence par l'annonce, le 10 mars, d'un bénéfice 2009 en recul de 77%. Au cœur des contestations, le manque de résultats de la stratégie d'Arnaud Lagardère, dont le groupe est actionnaire du «Monde». C'est l'édition, branche historique du groupe, et non les deux pôles médias et sport sur lequel il a décidé de se développer, qui sauve les meubles grâce à la saga des vampires Twilight. Et voilà qu'un financier franco-américain, Guy Wyser-Pratte, veut présenter une résolution visant à mettre fin au statut juridique de la commandite lors de l'assemblée générale du groupe, le 27 avril. Le détenteur de 0,53% du capital préserve le groupe familial de toute prise de contrôle. Au temps du père... Les perspectives 2010 ne sont guère favorables. Le groupe va donc continuer de céder des activités à «croissance limitée», ainsi que ses participations minoritaires dans EADS, Canal+, Amaury et le groupe Marie Claire. Le cours de Bourse est même revenu sous son niveau de mars 2003, quand le fils avait pris en catastrophe les rênes du groupe après la mort brutale de son père. «Son absence conjuguée à des performances décevantes conduisent à une déstabilisation de fait», estime un connaisseur du groupe. En 2007, les attaques étaient venues de l'extérieur. Une tentative de raid avait été sérieusement évoquée pour mettre fin à la structure de commandite. On reprochait déjà au fils de préférer le tennis aux affaires. Et surtout de défaire ce que son père avait fait en voulant se séparer d'EADS. Le tout dans un groupe affaibli par des soupçons de délits d'initiés. La situation a changé. Arnaud Lagardère a conforté sa présence dans la holding et ses avocats ont réussi à ce que le groupe sorte blanchi de l'affaire EADS. A 49 ans, ce proche de Nicolas Sarkozy, «son frère», se fait très discret. Est-il parti vivre aux Etats-Unis, comme l'affirme la rumeur ? «Il habite Paris, il participe au comité exécutif tous les mercredis matin et je prends chaque vendredi un petit-déjeuner avec lui en tête à tête», affirme Dominique d'Hinnin, directeur financier du groupe. Il ajoute qu'Arnaud Lagardère «rencontre en général une fois par semaine chacun des patrons de branche». Les quatre dirigeants principaux qui entourent Arnaud Lagardère ont tous été recrutés par son père. Aucun ne l'a été par celui qui dirige pourtant le groupe depuis sept ans. «C'est lui qui a choisi quasiment tous les patrons opérationnels», nuance son entourage. La crise aggrave la situation Comme dans tous les groupes de médias, la crise a aggravé la situation. «Les analystes contestent moins notre stratégie que notre portefeuille d'actifs», tempère D'Hinnin. Pour lui, ce qui pollue l'image du groupe est de deux ordres. Tout d'abord, «cela fait des années que l'on évoque la possibilité de céder nos parts dans EADS et Canal+. Nous donnons l'impression d'hésiter alors que nous cherchons à bien valoriser nos parts». De plus, la récession depuis deux ans a accéléré un certain nombre de mouvements de désengagement que le groupe voulait faire. Aux dernières nouvelles, le groupe s'est retiré de la presse régionale, puis masculine, mais il a lancé un hebdomadaire féminin, Be. Si le groupe avait fait une acquisition en temps de crise, il serait mort à l'heure actuelle.