Le Maroc et le Malawi renforcent leurs liens parlementaires    Marsa Maroc et les syndicats concluent un accord social jusqu'en 2030    Commerces de proximité : L'inéluctable mise à jour des « Moul l'hanout » [INTEGRAL]    L'Humeur : L'humour vin de BFMTV    Sidi Bennour – Douar El Abdi : 96 familles bénéficient des premiers lots de terrain dédiés à leur relogement    Mondial féminin de handball 2025 : l'Allemagne et la Norvège en finale ce dimanche    FIFA Challenger Cup : ce samedi, Flamengo vs Pyramids FC pour une place de finaliste face au PSG    Athlétisme : Kénitra organise la 5 édition de son ''10 Km International''    Nouveau succès du Maroc à l'UNESCO après le sacre du Caftan    ZLECAF : Le Royaume du Maroc au cœur de l'essor économique continental    Les influenceurs, nouvelle vitrine du Maroc    Après l'Algérie, le Polisario consulte l'Afrique du sud sur la prochaine phase des négociations    Début des travaux de la 36e session ordinaire du Conseil supérieur des Ouléma    Le Maroc, un exemple à suivre en matière de transformation des systèmes alimentaires (Haut responsable de l'UA)    Pourrions-nous faire front contre la corruption ?    Coupe arabe (Qatar-2025): Le Maroc affronte les Emirats arabes unis aux demi-finales    Mondial 2026 : 5 millions de billets demandés en 24 heures, Brésil–Maroc est le 2ème match le plus prisé, selon la FIFA    Prévisions météorologiques pour samedi 13 décembre 2025    Maroc : Alerte orange, neige et pluies de samedi à dimanche    Le Parc national de Dakhla : Un sanctuaire écologique et un levier de développement durable    Métaux lourds : Le poison discret des sociétés modernes    Stocks halieutiques sous pression : Un signal fort pour l'avenir de la pêche nationale    Le Royaume consolide sa diplomatie culturelle à l'international    Colloque international à Rabat – Lire le sacré : Enjeux géopolitiques de l'exégèse    Rabat. SAR la Princesse Lalla Asmaa préside la cérémonie d'ouverture du 1er Congrès africain sur l'implantation cochléaire de l'enfant    Art's Factory lance sa 2e édition pour soutenir les jeunes talents dans les industries créatives    Maroc : 270 M€ de la BAD pour moderniser les infrastructures aéroportuaires    Talbi Alami exhorte l'Afrique à rompre avec les logiques de fragmentation    Message de solidarité libyen avec la déclaration d'indépendance de la Kabylie    Mondial 2026 : des associations de supporters réclament l'arrêt de la vente des billets jugés « excessivement chers »    Regragui : « Je me suis basé sur des critères objectifs dans le choix des joueurs »    Trump annonce un cessez-le-feu entre la Thaïlande et le Cambodge    Armement : Après le fiasco des Caesar, les FAR lorgnent la technologie française    SM le Roi félicite le Président de la République du Kenya à l'occasion de la fête d'indépendance de son pays    Caftan : quand la diplomatie algérienne transforme une défaite en "victoire"    Maroc : à quoi s'attendre avec la circulation du nouveau variant de la "super-grippe" dans le monde?    Maroc - France : Les forces navales concluent l'exercice conjoint «Chebec 25»    Maroc - France : 15 projets pour 26,4 MDH renforcent la coopération territoriale    Lancement de la 1re édition du Forum économique et culturel « Le Sénégal sur la baie de Dakhla »    BNP Paribas en négociations exclusives avec Holmarcom pour la vente de BMCI au Maroc    De la danse martiale à l'argan et au caftan : Les trésors du Maroc inscrits à l'UNESCO    Maroc : Les 31e Semaines du film européen s'invitent dans trois villes    « Les Invisibles » : Le film-plaidoyer de l'ADFM qui expose les violences juridiques faites aux femmes    Biodiversité: Bientôt la création du parc national de Dakhla-Oued Ed-Dahab    Production céréalière record en Chine renforçant la sécurité alimentaire et la reprise agricole    Morocco: Orange Alert, Snow and Thunderstorms from Friday to Sunday    Maroc : Fusillade et course-poursuite sur 250 km contre des trafiquants de drogue    El Jadida/Sidi Bennour : la stratégie culturelle présentée aux médias régionaux    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Voici le meilleur livre de Fouad Laroui : La vieille dame de riad
Publié dans Le Soir Echos le 18 - 08 - 2011

Ce qui est fort réussi par Fouad Laroui avec La vieille dame du riad, (Julliard, 2011) c'est la leçon d'histoire du Maroc glissée d'abord comme subrepticement puis triomphalement dans un roman qui sera acheté par quelques-uns, peut-être, comme s'il s'agissait d'un vade me cum immobilier !
On l'avait déjà lu s'acoquinant peu ou prou avec La femme la plus riche du Yorkshire (Julliard, 2008). Voici Fouad Laroui hanté par la vieille dame du riad. Les milliers de kilomètres séparant la France du Maroc sont avalés d'un seul trait par François et Cécile qui s'installent à Marrakech.
Laroui donne à lire des dialogues drôles et fins. Bien plus vraisemblables, en tous cas, que ce que l'on entend au cinéma. Et son nouveau roman ferait sûrement un beau film. Dès la page 19, on s'amuse car Cécile a un sommeil très agité : « Bergé gifla Delon, devant Cécile ébahie. » Bref, le choc des people sur les rêves de la classe moyenne supérieure. Quelquefois, pour rire, Fouad Laroui pousse le bouchon (le tarbouche ?) un peu loin. Cécile dit : « -On sera bientôt plus marocains que Bourguiba. » Lorsque le couple découvre dans son riad à Marrakech une vieille dame qui semble squatter, un voisin conseille : « Le plus simple, c'est d'aller voir la police. Allez au poste qui se trouve à côté du club Med, sur la place Jamaa el Fna. Ce n'est pas loin d'ici, demandez le commissaire Chaâbane».
« - Un de vos cousins ? »
« - Non, mais un jour, dans une manif de syndicalistes, il m'a mis une gifle. Ça crée des liens».
« C'est peut-être ça, le but de la manœuvre (songe Cécile) : ils vous vendent une maison puis ils y plantent une complice grimée en spectre et ils attendent qu'on déguerpisse, morts de trouille».
Et le lecteur mort de rire ? Ce que la vieille Massouda a raconté à Mansour, le professeur d'université voisin de Cécile et François, « ça fera quelque chose de fort. Un roman… » finit par avouer le voisin qui travaille jour et nuit pour le finir, ce roman. Cécile en a commencé un autre et nous en lisons un troisième, à moins qu'il ne s'agisse du premier.
Mansour, à la fin de la semaine, surgit et tire de son cartable Histoire de Tayeb puisque Massouda avait murmuré : « ces chrétiens sont venus me ramener mon fils Tayeb».
La deuxième partie du livre donne à lire cette histoire. On découvre vers l'an 1900, le hadj Fatmi arrivé de Fès pour acheter un riad à Marrakech. « Cousin du ministre des Dépenses de l'Empire chérifien, il l'accompagna sur ses instances pressantes, à la conférence d'Algésiras qui se déroula en l'an 1906… »
Et puis vint la catastrophe : « au détour d'une ruelle, il les voit. Il s'arrête, pétrifié. Ce sont quelques hommes vêtus d'un uniforme, ils ont le teint pâle et le regard bleu et conquérant» . (…) le dénommé Orsini crie : – Balek ! Balek !
Le hadj Fatmi ne bouge pas.
- Balek !Balek.
(…) Une estafilade apparaît sur sa pommette droite, quelques gouttelettes de sang en sourdent. »
Nous sommes en 1912, Hadj Fatmi vient de faire un serment : il ne sortira plus tant que son pays sera occupé.
On apprendra, quelques chapitres plus loin, et vingt-quatre ans plus tard, lorsque le résident Noguès dissout le Comité d'action marocaine que Hadj Fatmi et Allal El Fassi sont apparentés : « leurs grands-mères sont sœurs. »
Le fils de Hadj Fatmi a participé dans le Rif, à la bataille d'Anoual : « Le général Sylvestre, après avoir remis à son ordonnance ses décorations et ses insignes d'aide de camp du Roi, fait le signe de la croix et se tire une balle dans la tête. Les Rifains ont gagné la bataille d'Anoual. » L'Espagne y perd vingt mille hommes, l'évocation de cette bataille rend bien pâle le souvenir que le lecteur conserve de François et Cécile. Mais qu'importe ! Le talent de Fouad Laroui dans La vieille dame du riad tient précisément en sa capacité à relier d'un fil ténu, mais sans fausse note, le passé lointain et tragique et le présent bouffon ou fantaisiste.
A la fois précis et lyrique, Fouad Laroui maîtrise la dramaturgie nationale et on a rarement lu sous sa plume des pages moins affectées par le souci de s'allier la connivence des lecteurs pas toujours très exigeants. C'est vraiment avec son cœur qu'il a écrit l'histoire de Tayeb, soldat d'Abdelkrim.
En outre, quel romancier marocain, avant lui, nous avait rappelé qu'on estime de 10 à 15 000 le nombre de Marocains morts sur les champs de bataille de la Seconde Guerre mondiale ? Personne avant Fouad Laroui n'était ainsi parvenu à conter en langue française l'histoire du Maroc au vingtième siècle avec ce mélange de gravité et de fébrilité inquiète qui restitue les soubresauts connus par le pays et témoigne finement de son unité. Comme on est loin des tentatives de Kébir M. Ammi, réitérées, certes, mais poussives- quand elles n'ont pas frisé l'inepte avec Le Ciel sans détours (Gallimard, 2007). Fouad Laroui, qui lit ses confrères, a ici parfaitement compris ce qu'il ne faut pas faire et, d'abord, qu'il ne faut pas prendre ses lecteurs pour des niais.
Il ne cesse jamais d'être romancier dans cet excellent livre d'histoire où il rappelle des faits capitaux : « La conquête du Maroc ne s'achève qu'au milieu des années 30. La résistance à la colonisation a fait, depuis 1902, trente-huit mille morts français, plus que n'en fera la guerre d'Algérie entre 1954 et 1962 (trente-trois mille). » De telles informations ne nuisent pas à la matière romanesque. Elles l'informent et elles constituent aussi un rappel du fait que l'existence d'un individu est un fétu dans le feu
Fascinés par le destin de Tayeb, les époux Girard vont-ils transformer leur riad en « Musée des tirailleurs marocains » ? Oui. Une photo montre Tayeb « qui a déjà vu l'enfer, et que la vie n'effraie pas ». Et c'est ainsi que Fouad Laroui vient de réussir avec La vieille dame du riad son meilleur livre. Bravo !


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.