De lourds soupçons de prosélytisme pèsent sur l'école américaine de Casablanca. Le point sur l'affaire. «Si la George Washington Academy ferme, les Etats-Unis d'Amérique stopperont toutes leurs aides financières en direction du Maroc». Ces propos, rapportés par des parents d'élèves de l'école américaine de Casablanca, ont été tenus par la directrice de l'établissement, qui affirmait, lors d'une réunion avec les parents d'élèves mercredi dernier, avoir été contactée par un sénateur américain. Maman, j'ai trouvé le chemin !» Ces déclarations font suite aux menaces qui pèsent contre la GWA depuis la plainte déposée il y a une dizaine de jours. Un père d'élève, Kader Ighiri, poursuit un certain nombre d'enseignants et le conseil d'administration de l'école pour «ébranlement de la foi d'un musulman mineur». Représenté par l'avocat Mustapha Ramid, il demande l'ouverture d'une enquête. «Mon fils, âgé de 12 ans, a commencé à aller très mal physiquement et psychiquement. Il disait qu'il était chrétien. Il me racontait des visions apocalyptiques qu'il avait, comme celle récurrente où il se voyait me tuer ainsi que ma femme», nous raconte Kader Ighiri, père de deux élèves scolarisés au sein de l'établissement. Au début, le père met cela sous le compte d'une adolescence difficile, mais, un jour, le principal et la conseillère en éducation de l'école l'informent que son fils a demandé à avoir une bible. Par la suite, ces derniers, qui depuis ont été renvoyés, lui conseillent tout bonnement de retirer son fils de l'école. «Après diagnostique, le psychiatre, qui a lui-même eu recours à l'avis de l'un de ses confrères pédopsychiatres, nous a dit que notre fils avait subi un conditionnement en bonne et due forme et que son cas était très sérieux», affirme Kader Ighiri. La famille demande alors des explications à de la direction de l'école, qui rétorque que ce conditionnement s'est fait à l'extérieur de la GWA. Impossible, riposte Kader Ighiri, affirmant que son fils ne fréquente que son domicile et l'école et qu'il est systématiquement accompagné par un membre de la famille lors de sorties. Preuves à l'appui ? D'autres témoignages font peser de lourds soupçons de pratiques de prosélytisme au sein de l'établissement. Créé par plusieurs parents d'élèves, le site internet www.lesenfantsdumaroc.ma entend démontrer les tentatives d'évangélisation des enfants. Ce portail entend apporter des preuves en fournissant des documents (établis par certains membres du personnel) qui révèle les techniques de recrutement du personnel depuis les USA où les intéressés doivent prouver leur activisme et les méthodes utilisées pour l'endoctrinement d'enfants en bas âge. Selon les récits de plusieurs parents d'élèves, les enseignants commencent par donner de nombreux avertissements aux enfants, pour que leurs familles les punissent. Puis, quand l'image de la famille est ternie et la relation enfant-famille fragilisée, ces enseignants font comprendre aux enfants que la violence vient de la religion des parents, et que le christianisme est la vraie religion qu'il faut suivre. D'autres témoignages signalent la présence d'un adulte arabe lors de «séances de prosélytisme» pour donner une certaine crédibilité aux propos du prosélyte et mettre les enfants en confiance. Le site web affirme également, sur la base de coupures de presse, que l'ancien directeur, Jack Rusenko, est interdit de séjour au Maroc depuis mars dernier, pour avoir été pasteur à Rabat avant d'exercer sa fonction de directeur de GWA. Face à cette levée de boucliers, l'école nie catégoriquement s'adonner à des pratiques de prosélytisme. Contactée par Le Temps, la direction n'a pas souhaité s'exprimer. «La directrice de l'école, lors d'une réunion de parents d'élèves, il y a une dizaine de jours, a demandé aux parents de signer une pétition pour démentir les accusations qui pesaient sur l'école», confie un parent d'élève qui tient à garder l'anonymat. «Aujourd'hui, j'ai retiré mes deux enfants de l'école et je la poursuis en justice pour que les responsabilités de chacun soient établies», conclut Kader Ighiri. Amine Amerhoun Que risque GWA ? Si les activités de prosélytisme de la GWA sont avérées, la direction de l'établissement et les personnes ayant participéà l'endoctrinement risquent de six mois à trois ans selon l'article 220 du Code pénal marocain qui réprime «quiconque emploie des moyens de séduction dans le but d'ébranler la foi d'un musulman ou de le convertir à une autre religion, soit en exploitant sa faiblesse ou ses besoins, soit en utilisant à ces fins des établissements d'enseignement, de santé, des asiles ou des orphelinats». Selon le même article, «en cas de condamnation, la fermeture de l'établissement qui a servi à commettre le délit peut être ordonnée, soit définitivement, soit pour une durée qui ne peut excéder trois années». Le plaignant, Kader Ighiri, devra donc démontrer qu'il y a eu «emploi des moyens de séduction dans le but d'ébranler la foi musulmane ou de convertir à une autre religion». L'exploitation de faiblesse citée dans l'article, peut en l'occurrence être l'immaturité de l'enfant. L'utilisation d'établissements d'enseignement, elle, n'est pas à démontrer.