Rabat. Abdellatif Hammouchi reçoit l'ambassadrice de Chine au Maroc    Conseil supérieur du pouvoir judiciaire : Plus de 7 500 plaintes reçues en 2024 (Rapport)    Maroc – Sénégal. Un partenariat stratégique « exceptionnel »    Africa Sports Expo : Casablanca accueille la 4e édition du plus grand salon du sport en Afrique    Fiscalité : le Nigeria prépare 50 mesures d'allègement    Réseaux sociaux : Le Maroc cherche à protéger ses enfants, mais...    L'UNESCO et la Fondation Maroc 2030 renforcent l'impact durable des grands événements sportifs à venir    The Best 2025 : Hakimi, vedette du PSG, dans la liste des nominés    Surf. Odriozola et Salgado remportent le Junior Pro Taghazout Bay    Présidentielle en Guinée : 9 candidatures retenues parmi 51    Grammy Awards 2026 : Youssou Ndour décroche une nomination    La MAM célèbre la Fête de l'Unité    L'Allemagne met le régime algérien à l'épreuve : la libération de Boualem Sansal en échange de la poursuite des soins de Tebboune    CAF : « Le ballon officiel de la CAN 25 rend hommage au zellige marocain »    JSI Riyad 2025. Finale . Futsal / Maroc-Iran ce mardi : Horaire ? Chaînes ?    Palestine : Escalade de la violence des colons en Cisjordanie occupée    Terres rares : Pékin suspend les restrictions des exportations vers les USA    Etats-Unis / Shutdown : Le trafic aérien réduit « à peau de chagrin »    Amical Maroc-Ouganda : La billetterie lancée dès ce lundi    France : La police enquête sur les célébrations des supporters du Wydad Casablanca à Paris    París: En el Olympia, los 50 años de la Marcha Verde se celebran con alegría    España: En sus memorias, el rey Juan Carlos guarda silencio sobre la cuestión del Sáhara    Le Maroc, pionnier de la souveraineté génomique africaine    Safi: Santé pour tous, un hommage en actes !    Jadida: L'Association "All Riding Family" s'envole au chevet des familles démunies des zones rurales de Demnat    Abdeslam Alaoui Smaili : "Les stablecoins font partie des infrastructures de la finance du futur"    Alger sous pression pourrait libérer l'écrivain Boualem Sansal après demande allemande    Paris : À l'Olympia, les 50 ans de la Marche verte célébrés dans la joie    Nabil Mouline explore mille ans d'histoire du Sahara dans un documentaire    «Entre deux continents» : Aymane Bufrakech expose à la Fondation Hassan II pour les MRE    Nour-Eddine Lakhmari signe son grand retour avec Mira, en compétition au Festival de Tallinn    L'Italie célèbre les 2500 ans de la ville de Naples avec deux concerts à Rabat et Tanger    Réunion au Palais Royal : une nouvelle étape dans la mise en œuvre de l'autonomie au Sahara marocain — du dialogue politique à l'application sur le terrain    La République du Sénégal a salué, lundi à Rabat, les Initiatives de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et l'engagement constant du Souverain en faveur du développement du Continent africain.    Rabat : la FIFA lance une plateforme mondiale pour la protection des droits des joueurs    Niger : Plus de 220 terroristes "neutralisés" en octobre dernier    Le Sénégal est déterminé à renforcer son partenariat stratégique avec le Maroc (Ministre sénégalais des Affaires étrangères)    Le dirham se déprécie de 0,8% face à l'euro entre septembre et octobre 2025    PLF 2026 : Fitch met en garde contre les dépassements des budgets alloués aux infrastructures    La Bourse de Casablanca démarre dans le rouge    Conseil de gouvernement: Prix de transfert, centres de vacances et statut des fonctionnaires du Conseil de la concurrence au menu    Akhannouch : «Aid Al Wahda célèbre l'unité du peuple marocain et sa mobilisation derrière son Roi»    Nasser Bourita : Les relations maroco-sénégalaises, une référence en matière des liens maroco-africains    Info en images. CAN-Maroc 2025: le ballon officiel de la TotalEnergies CAF dévoilé    Guelmim-Oued Noun: Près de 1 MMDH d'investissement public    Baisse de 17% des demandes d'autorisation de mariage de mineurs en 2024, selon le CSPJ    Aziz Akhannouch : « La consécration de la justice sociale dans les provinces du Sud est au cœur des priorités du gouvernement »    FIFM 2025 : Le film marocain "Derrière les palmiers" de Meryem Benm'Barek en compétition officielle    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Comment la neuvième symphonie de Beethoven a conquis le Japon
Publié dans L'observateur du Maroc le 26 - 11 - 2013

Dans un livre consacré à l'engouement du peuple japonais pour la neuvième symphonie de Beethoven intitulé « Le Sacre de l'hiver », on retrouve l'éducation, encore l'éducation, toujours l'éducation comme fondement du développement économique, social et culturel d'une nation et de son accès à la modernité. Vérité de la Palisse que de rappeler que l'ère Meiji en élisant l'éducation comme un des principes fondateurs du nouveau Japon a fait aujourd'hui de ce pays, qui était au début de cette ère encore archaïque, soumis à l'autorité dictatoriale du Shogun, replié sur lui-même et rétif à l'accueil de l'auteur, l'un des plus innovants de la planète. Ce qu'il est toutefois indispensable de rappeler, c'est que ce choix irréversible était adossé à un autre choix encore plus irréversible : celui de l'empereur Meiji d'engager son pays dans « une entrée organisée et volontaire dans la modernité ». Organisée, parce que méthodique, réfléchie, raisonnée, couvrant l'ensemble des manifestations de la civilisation de l'Occident, à imiter, à appréhender, sans écarter celle qui comme la musique classique pourrait paraître futile dans cette course à l'absolue maîtrise de la technologie.
Volontaire, parce que mue par une détermination, une énergie, une ténacité et une opiniâtreté qui la rendaient irrévocable. Cette irréversibilité encouragera le peuple japonais à chercher les secrets de la modernité jusque dans ce qui se dissimule derrière les phrases musicales les plus élaborées de la neuvième symphonie de Beethoven. Daniel Pipes, un des éditorialistes américains des plus conservateurs n'hésitera pas à écrire que « la modernité implique la maîtrise de la musique classique ». Sans adhérer à une si impérative affirmation, on est amené à constater que dans sa conquête méthodique et vigoureuse de la modernité, le Japon a investi l'ensemble des disciplines et des secteurs où elle se manifeste. La musique classique est l'un de ces domaines. La première école de musique classique est édifiée en 1887 à Tokyo. Les premiers concerts sont exécutés dès le début du siècle. L'orchestre philharmonique de la NHK est créé en 1925, et à cette époque déjà, la neuvième de Beethoven commençait à être l'une des pièces préférées d'un public de plus en plus averti. Et ce sera par la suite une méthode japonaise d'apprentissage du violon, la méthode Suzuki qui deviendra la plus célèbre et ce sera une marque de piano japonaise Yamaha que préféreront les apprenti-artistes. (On vient d'apprendre il y a quelques jours, que les célèbres pianos Pleyel ne seront plus fabriqués en France).
Les résistances ne manqueront pas au Japon qui tenteront de freiner cette dynamique, mais le désir de modernité était tel que plus rien ne pouvait entraver ni arrêter sa marche vers le progrès. Ni le conservatisme religieux, ni le nationalisme méfiant, ni l'embarras vis à vis de l'autre, étranger. Comme tout, bien-sûr, va se jouer dans l'école, le système éducatif accueillera la modernité dans toute son ampleur. L'enseignement musical sera par exemple obligatoire dans le cours préparatoire et l'élève apprendra à déchiffrer le solfège comme il apprendra à écrire et à lire sa langue maternelle et son alphabet. Il l'apprendra en même temps que trois systèmes d'écriture, comme le signale Michel Wasserman, auteur du « Sacre de l'hiver » et fait-il remarquer avec l'alphabet occidental enprime. La frilosité de certains de nos pédagogues et de certains parents qui hésitent à inscrire leur progéniture simultanément dans l'apprentissage de plusieurs langues étrangères à la fois, de la musique, de la danse, de la peinture, des arts ménagers, de la calligraphie, de peur d'une accumulation épuisante des disciplines pour leur âge nous paraît bien dérisoire face aux capacités des jeunes esprits à apprendre et à comprendre. Leurs prouesses dans le maniement du langage des tablettes, des Smartphones est la preuve la plus désarmante de leur ingéniosité. Elle continue à étonner les plus sceptiques de nos éducateurs. Daniel Pipes, dont je ne partage pas les analyses ni les prises de position politiques réactionnaires et hostiles fait remarquer toutefois à juste titre « qu'au Japon, la musique classique a perdu son caractère étranger pour devenir un art entièrement japonais ».
Ce pays ira jusqu'à faire exécuter en allemand le dernier mouvement de cette symphonie, « L'hymne à la joie », par une chorale de 10.000 chanteurs, impressionnante de rigueur. La chaîne télévisuelle ARTE a consacré à cette gigantesque chorale des dix mille une émission passionnante de vérité. J'entends déjà surgir les critiques et persifler les persifleurs. Comment prôner l'enseignement de cette musique quand on sait l'échec de l'enseignement le plus basique qui soit de l'écriture et de la lecture ? Quand dans les régions les plus déshéritées, les enfants sont démunis de tout ce qui peut aider à faire éclore leur génie. Pourtant, « Que de Mozart assassinés ! ». Nous hésitons encore à embrasser la modernité jusque dans ce qui en fait l'ornement. Frileux, embarrassés, beaucoup d'entre nous croient perdre leur âme dans la jouissance que procure cet ornement. La réussite des festivals de Rabat, de Fès, d'Essaouira, d'Agadir, de Casablanca, en dépit des critiques acerbes et des dénonciations ridicules, a démontré que le désir de modernité traversetoutes les couches sociales de notre pays dans leur diversité. Il faut simplement transformer l'essai. Mais pourquoi dès lors ces succès ne se traduisent-ils pas par des conservatoires équipés, un enseignement musical généralisé dans les écoles, les collèges, les universités, et les quartiers, qu'ils soient, favorisés ou défavorisés. Les artistes talentueux de l'orchestre philharmonique ne sont pas issus des familles les plus aisées, les plus privilégiées, mais bien au contraire de familles modestes, les plus humbles. Beaucoup d'entre eux peinent encore à acquérir leur propre instrument, et peineront longtemps.
Les concerts qu'ils offrent à un public enthousiaste sontla preuve que cette musique émeut un public aussi éloigné de ses harmoniques que l'était le public japonais. Qu'est-ce qui fait dès lors qu'il y a peu d'écoles de musique ? F. Bensaïd, fondateur de l'Orchestre philharmonique du Maroc, initie courageusement au Maroc une expérience qui s'inspire de celles entreprises au Venezuela et au Brésil et quiont réussi. Et c'est « Mazaya ». Au Venezuela et au Brésil, Beethoven s'apprend et se joue dans les favelas, dans les bidonvilles, dans des environnements les plus improbables, dans les quartiers les plus pauvres, les moins accueillants. Et le miracle, c'est que cela fonctionne. Avec « Mazaya » chez nous aussi, cela fonctionnerait et Farid Bensaïd ne prêcherait pas dans un désert d'indifférence pour peu que l'enseignement musical l'emporte sur les hésitations sceptiques des gestionnaires de l'éducation et de la culture et investisseles espaces délaissés de nos cités, surtout les espaces abandonnés. L'orchestre philharmonique du Maroc qu'il a fondé jouera bientôt la neuvième de Beethoven, comme un écho aux séances de préparation de tous les concerts qui se joueront en cette fin d'année à Tokyo, à Osaka, et dans une centaine de bourgades japonaises, comme pour nous dire, qu'au Maroc, cette symphonie peut être exécutée aussi avec talent, comme pour nous inviter à nepas oublier Ahmed Essayed, génial compositeur,« ermite » à Meknèset pas du tout prophèteenson pays, à ne pas oublier non plus tous nos artistes éparpillés de part le monde, qui ont conquis ce monde mais ont peu joué et chanté chez eux, comme pour nous dire qu'il faut aller chercher les Beethoven, et les Mozart dans les espaces les plus reculés du royaume. Le Japon l'a fait. Le Maroc peut relever le défi et le faire. Ce n'est pas une provocation, c'est une conviction


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.