Un mal invisible ronge en silence les sphères dirigeantes dans le monde de l'entreprise et l'administration. Selon une étude menée par Dina Lahlou, holistique coach, spécialisée en santé mentale au travail, 82 % des cadres et entrepreneurs interrogés ont été confrontés de près ou de loin au burn-out. Plus grave encore : 62 % l'ont personnellement vécu, souvent sans en parler. Et dans 71 % des cas, aucun dispositif clair de prévention ou d'accompagnement n'existe dans leurs structures, ajoute l'étude. Ce sondage, mené auprès de 163 professionnels issus de différents secteurs, lève le voile sur un phénomène passé sous silence : l'épuisement émotionnel et psychologique des profils à haute responsabilité. Un sujet encore tabou, malgré ses conséquences humaines et économiques comme le soutient l'auteure de l'étude. « Le burn-out n'est pas une fragilité personnelle. C'est une alarme émise par le corps et le système. Il est urgent de repenser nos environnements de travail avec humanité et pragmatisme », alerte Dina Lahlou. Quand le corps dit stop Fatigue chronique, insomnies, douleurs inexpliquées, irritabilité, anxiété... Les signes d'un burn-out sont connus mais trop souvent ignorés. « Parce qu'ils s'installent insidieusement, parce qu'ils sont banalisés, surtout chez ceux que l'on considère comme « solides » ou « increvables » », ajoute la spécialiste. Loin d'être anodins, ces signaux peuvent, à terme, évoluer vers des pathologies graves comme les troubles cardiovasculaires, les dépressions ou encore les maladies auto-immunes, explique Lahlou. « Le burn-out n'est pas un passage à vide : c'est l'effondrement d'un individu épuisé par un système qui ne reconnaît ni ses limites ni ses besoins », insiste-t-elle. Au Maroc, aucune donnée officielle ne recense les arrêts de travail liés aux troubles psychologiques. En France, à titre d'exemple, ces derniers représentaient 24,5 % des arrêts longue durée en 2023. Cet écart statistique en dit long sur l'invisibilité du problème en l'absence de statistiques. Pour Dina Lahlou, cette absence de reconnaissance institutionnelle empêche les entreprises d'agir. « Il est temps d'intégrer la santé mentale dans les politiques RH, RSE et ESG. La performance durable ne peut plus ignorer l'élément humain », recommande la spécialiste Corrélation Pourtant le lien entre santé mentale et performance est une évidence selon l'auteure de l'étude. Un cadre ou un leader épuisé est incapable d'innover, de décider ou de mener ses équipes. « Une tension insurmontable finit par avoir raison de la rentabilité et du rendement d'un dirigeant tout en affectant et désengageant ses équipes » explique Lahlou. Cette dernière estime par ailleurs qu'un système qui épuise ses ressources humaines s'expose dangereusement à « des ruptures internes profondes ». Mais au-delà de son impact direct sur l'activité des personnes touchées, le burn-out pèse par son effet « stigmatisant ». « Le burn-out ne doit plus être perçu comme un tabou. Ce n'est pas une faiblesse personnelle mais plutôt un indicateur de déséquilibre structurel. Il faut donc briser le silence autour de ce mal », explique Lahlou. Pour mettre en garde contre ce mal silencieux, l'experte lance une campagne nationale de sensibilisation, destinée à toucher entreprises, institutions, médias et citoyens. Objectif : sensibiliser au burn-out et faire du bien-être mental un pilier stratégique de développement, repenser en profondeur l'hygiène de vie dans les entreprises et intégrer la santé mentale dans les politiques RH, RSE tout en offrant des espaces de parole autour de ce mal silencieux.