L'attentat de Marrakech n'a pas eu les effets escomptés par ses auteurs. Le jour même, les habitants de la capitale du sud et les touristes ont tenu à investir les lieux publics en signe de défi au terrorisme .Malgré la douleur des pertes humaines, la vie continue. Politiquement, le débat sur les réformes n'a pas été impacté, les institutions fonctionnent et une grande unanimité se dégage contre la barbarie terroriste. Quelle que soit la partie qui a organisé ce lâche attentat, les indices vont vers Al Qaida. Elle n'a pas réussi à ébranler le Maroc et a donc échoué. Cependant, cela ne doit pas empêcher le débat autour de l'idéologie qui couvre le terrorisme et qui est inscrite dans le contexte de l'ouverture politique au moment où le Roi a gracié des détenus de la Salafiya Jihadia. Cette grâce n'est ni une condamnation a posteriori des procès ayant abouti à leur incarcération, ni une acceptation des idées qui sont les leurs. Dès sa sortie de prison, Mohamed El Fizazi a excommunié des jeunes du 20 février qualifiés d'apostats. Ce qui, dans son idéologie, équivaut à une condamnation à mort. Mohamed Maghraoui, à peine revenu d'Arabie Saoudite, a réitéré sa fatwa sur le mariage des petites filles de 9 ans. Les salafistes encore en prison accusent la « main invisible » d'être derrière l'attentat d'Argana. Il faut se rendre à l'évidence, l'idéologie de la haine n'est pas soluble dans la démocratie. Si elle accepte d'utiliser les espaces de liberté offerts, elle n'en demeure pas moins une idéologie réfractaire à l'idée même de liberté. Elle milite pour une société autocratique et totalitaire, niant aux individus tout droit et toute liberté. Le recours à la violence est non seulement permis, mais il fait office de devoir religieux, impérieux pour cette idéologie. L'une des erreurs fatales serait de banaliser la Salafiya Jihadia, de la dédouaner de ses expressions terroristes et de lui ouvrir l'espace public sans précautions. De la même manière, il est clair que l'approche sécuritaire toute seule est incapable de réduire ce mouvement. Les démocrates doivent dénoncer tous les obscurantismes, toutes les idéologies de haine et de violence. Ils doivent le faire de manière constante, claire et résolue. L'Etat de droit impose qu'à chaque fois qu'une loi est violée, la justice est appliquée. Ce n'est que par cette attitude que ce mouvement régressif et dangereux peut être contenu. Le Maroc debout, solide et inébranlable est une réalité qui s'impose à tous. Cependant, cela ne pourrait justifier la moindre faiblesse à l'égard de tels mouvements. S'ils veulent s'intégrer à la démocratie, ils doivent d'abord en accepter les valeurs et s'attacher au pluralisme qu'elle présuppose...