L'annonce de l'alliance pour la démocratie a été très commentée. Malheureusement les observateurs se sont attachés aux apparences et non au contenu. Ainsi c'est le fait que cette alliance intègre des partis de droite, de gauche et même d'extrême gauche qui fait l'objet des commentaires. Or, l'objectivité voudrait que l'on salue cette initiative. Nous ne sommes pas face à une coalition électorale, ni même un projet de coalition gouvernementale. C'est une alliance autour de valeurs, d'un projet de société. Pour la première fois, des structures partisanes défendent un tel projet et revendiquent le clivage. De manière claire, cette coalition se définit comme porteuse d'une ambition moderniste face à un projet conservateur qui existe dans la société et qui est porté par des partis tels que le PJD et, un peu moins, l'Istiqlal. L'importance de l'événement réside dans cet aspect de clarification. La vie politique a longtemps souffert d'un unanimisme qui a fini par étouffer la politique. Il est clair qu'il n'y a pas 36 projets de société. A l'ancien clivage gauche-droite, se substitue dans la réalité un nouveau clivage. Le choix est entre un Maroc ouvert tolérant, intégrant les valeurs universelles, sans renier son identité et un pays arcbouté sur sa spécificité, son histoire, refusant la modernité. La nouvelle coalition affirme avec force qu'elle a choisi la modernité et qu'elle veut faire face au projet concurrent. C'est un chargement radical dans la vie politique nationale. Réduire cette profession de foi à une manœuvre pré-électorale est injuste et dangereux. Dangereux parce qu'il institutionnalise la défiance vis-à-vis de la classe politique, défiance incompatible avec la construction démocratique. Les autres partis doivent se définir, la recomposition est à ce prix. Il y a un espace pour une force de gauche, qui prône la solidarité, une politique de redistribution par la fiscalité et le service public. De la même manière, il y a un espace pour une vraie force conservatrice, représentative de larges pans de la société, et disons le clairement, ce n'est pas une insulte, tout au contraire. Hors de ces trois blocs, il n'y a pas d'espace. En fait, la nouvelle coalition est le début de la fin d'une transition qui a trop duré. Le consensus qui a fondé la transition marocaine doit laisser place aux clivages, au débat d'idées et à la confrontation des projets de société. La démocratie est basée sur la divergence et non l'unanimité. Cet effort de clarification est donc le bienvenu.