Les câbles sous-marins sont l'épine dorsale d'Internet et un levier de souveraineté pour l'Afrique. Le Maroc, grâce à sa position stratégique, peut en être le moteur régional. Investir dans nos propres infrastructures renforcera notre indépendance numérique. A l'ère de la connectivité mondiale, les câbles sous-marins sont la base d'Internet. Ils transportent plus de 95 % des flux de données mondiaux, reliant continents, économies et services numériques. Ces infrastructures, bien que discrètes, sont devenues des actifs stratégiques : elles influencent directement la souveraineté numérique, les coûts de connectivité et la capacité d'un pays à s'intégrer dans l'économie digitale mondiale. De plus en plus d'Etats cherchent à réduire leur dépendance aux liaisons internationales gérées par des intermédiaires, en déployant ou en cofinançant leurs propres câbles sous-marins. L'objectif est clair : accroître leur Bande Passante Internationale (BPI), c'est-à-dire la capacité de transmission de données entre un pays et le reste du monde. Une BPI élevée est un indice de performance, de fiabilité et d'autonomie dans l'accès aux services numériques mondiaux, notamment ceux des géants du Web (cloud, streaming, services en ligne, etc.). Dans ce contexte, le Maroc se distingue. Fort de sa position géographique stratégique entre l'Europe, l'Afrique et l'Amérique, il dispose d'une infrastructure sous-marine diversifiée, dense et résiliente. Le pays bénéficie également d'un savoir-faire reconnu dans le domaine des télécommunications maritimes. Cette combinaison fait du Maroc un hub numérique potentiel pour l'Afrique de l'Ouest, capable de servir de passerelle directe et fiable pour la connectivité régionale. Mais ce rôle de "gatekeeper" ne doit pas être une fin en soi pour le continent. L'Afrique ne peut plus se contenter d'être un simple point de transit pour les données mondiales. Elle doit devenir actrice de sa propre infrastructure numérique. Cela passe non seulement par l'augmentation de sa BPI, mais aussi par le renforcement de ses points d'échange Internet (IXP). Un IXP est une infrastructure physique permettant aux fournisseurs d'accès Internet (FAI), aux opérateurs et aux hébergeurs de s'échanger localement du trafic Internet, sans passer par des routes internationales coûteuses. Un bon maillage d'IXP favorise la baisse des coûts, l'amélioration des performances, et le développement des contenus locaux. Dans cette perspective, la coopération Sud-Sud devient essentielle. Le Maroc, grâce à son infrastructure et à son expérience, peut initier des partenariats avec ses voisins pour construire ensemble une souveraineté numérique africaine. Cela pourrait se traduire par des projets conjoints de câbles, de data centers régionaux, ou encore de plateformes d'échange et d'hébergement local de contenus. Investir dans les câbles sous-marins et les infrastructures associées (IXP, data centers, interconnexions terrestres) ne relève plus uniquement de la technique. C'est désormais un choix politique et stratégique, qui engage la place de l'Afrique dans le monde numérique. A l'instar du Maroc, il est temps que le continent se dote des moyens de son ambition digitale, pour ne plus subir les routes tracées par d'autres, mais les façonner lui-même.