Le pseudo-parler cru, la violence des mots, la posture démagogique, les excès verbaux, la stigmatisation, bref une politique de mœurs et de sautes d'humeur au lieu d'une politique d'idées et de réflexion s'est avérée une stratégie de communication difficilement audible dans un secteur dont la réforme doit s'inscrire dans la durée avec un seul mot d'ordre, évoqué par le Souverain dans son discours du 20 Août : La capitalisation. Oui, pour améliorer la capacité de réussir des projets d'une manière qui soit fondée sur des bonnes pratiques, un des meilleurs moyens est de capitaliser sur les expériences acquises au cours des projets antérieurs. Apprendre et améliorer grâce à l'expérience est une activité qui se fait tout au long du cycle de la vie d'un projet. Cela permet de devenir beaucoup plus efficace dans la maîtrise des coûts et de la qualité. Des expériences réussies devraient être consolidées, d'autres améliorées dans une stratégie réelle d'évolution graduelle qui positive, corrige, innove et conforte les acquis. Le programme du gouvernement dans le secteur de l'Education doit nécessairement puiser ses fondements et sa légitimité dans la poursuite de la mise en œuvre des chantiers de réforme prévus par la Charte nationale de l'éducation et de la formation et la continuation des efforts engagés par le Plan d'urgence visant à augmenter la cadence des réalisations dans des espaces d'interventions prioritaires comme la généralisation de l'enseignement primaire,, l'égalité des chances, la mise en œuvre d' actions et procédures appropriées visant à réduire le surpeuplement que connaissent certains établissements d'enseignement, la réduction du taux de déperdition scolaire, la consolidation de la culture de l'excellence, le renforcement de l'expérience des établissements pilotes, leur institutionnalisation et leur consolidation, le renforcement de la politique d'orientation des élèves et surtout le renforcement du rôle des Académies en tant qu'autorités régionales. L'objectif étant de pouvoir ressusciter la confiance dans l'école publique à travers une implication de tous les partenaires. Cela passera par la mise en place de l'école de l'excellence et l'évaluation de l'action des Académies, institutions clés dans tout processus de réforme dans une vision de décentralisation et de déconcentration. En effet, afin de consacrer la politique de déconcentration administrative dans la gestion des affaires pédagogiques et la mise en place d'une administration de proximité, devenue un choix stratégique pour renforcer les capacités de gestion des institutions régionales appelées à constituer la base de départ pour toute politique globale de développement, on a procédé à la création des Académies régionales de l'éducation et la formation (AREF) en 2002 et dont la publication de la loi 07-00 a constitué une étape importante vers la gestion déconcentrée de l'éducation et de la formation et son orientation vers une politique de proximité tenant en compte les spécificités régionales et locales afin de répondre avec efficience aux demandes exprimées par les partenaires sociaux, les parents d'élèves et surtout la clé de voûte de tout l'édifice, les besoins des apprenants. Au niveau de la gouvernance, l'arsenal réglementaire a été renforcé et la décentralisation accentuée en vue d'une meilleure gestion des ressources et d'une meilleure application de la politique éducative. Ce qui a permis de passer à une autre étape beaucoup plus importante pour le consolider et le renforcer dans le cadre du programme d'urgence, en impliquant la famille dans la vie scolaire et en mobilisant toutes les composantes de la société civile dans le projet éducatif. Si l'objectif affiché de la réforme de l'éducation reste l'optimisation de la gestion des ressources humaines pour répondre de manière continue et durable aux exigences de la généralisation de l'enseignement à travers la décentralisation de la gestion des ressources humaines (recrutement régionalisé du personnel avec une dotation globale par AREF), renforcement de la formation initiale et continue du personnel d'enseignement, cet objectif ne peut être atteint sans l'émergence d'une élite régionale, de vrais gestionnaires de la chose éducative, capables d'anticiper sur les problèmes et surtout capables de décliner régionalement des objectifs conçus pour la nation. La planification régionale de l'éducation, basée sur une gestion de proximité fondée sur des plans d'action spécifiques et pertinents à dimension régionale, demande la formation de gestionnaires capables de vision stratégique tout en intégrant les contraintes du quotidien. La création des AREF au Maroc, auxquelles a été conférée l'exécution de la politique de l'enseignement et de la formation au niveau régional, représentait une mutation distinguée et exclusive au secteur de l'Education nationale, pour la consolidation du processus de la décentralisation et de la déconcentration. L'autorité de tutelle reste responsable de la mise en place de la politique éducative et de l'identification des priorités et des objectifs. Concernant la préparation des budgets, le ministère se contente d'assurer un suivi car, désormais, ce sont les AREF qui s'en occupent. Ces nouvelles attributions demandent un personnel qualifié et surtout un système de contrôle rigoureux pour éviter des dérives possibles qui puissent rendre caduc cet effort. Les axes de la réforme budgétaire sont désormais explicités, une programmation pluriannuelle, une gestion budgétaire axée sur les résultats avec des Indicateurs de performance quantifiables et une contractualisation des relations entre services centraux et déconcentrés. L'idée est de donner plus de clarté aux choix stratégiques pour avoir une visibilité des actions engagées et à venir, de créer les conditions nécessaires susceptibles d'accroître la performance en orientant le budget vers les résultats moyennant des indicateurs de performance. Avec la GAR (Gestion Axée sur les Résultats), on voulait responsabiliser les gestionnaires autour d'objectifs prédéfinis mesurés par des indicateurs de performance, renforcer l'efficacité de la dépense publique en assurant un lien logique entre les objectifs, les crédits alloués et les résultats attendus, renforcer la culture de transparence, de performance et de reddition des comptes. Mais tout système a besoin d'instance d'évaluation et de régulation, voire de sanction pour pouvoir évoluer, on se demande si on a toujours pris les dispositions nécessaires pour s'assurer d'une bonne utilisation de l'argent des contribuables. Avec le programme d'urgence, la réforme du système éducatif semble assez engagée pour déclarer, en toute objectivité, que le Maroc dispose, grâce au cumul des expériences acquises, d'une vision claire, d'une approche rationnelle et d'une volonté politique pour une refonte complète du système national d'éducation et de formation. Le plan d'urgence (2009-2012) a touché à sa fin. Une évaluation objective, basée sur les réalisations effectives et mettant en exergue les contraintes possibles est plus que souhaitable pour que les responsables actuels puissent avoir une idée claire sur l'état des lieux et pouvoir évaluer leur action plus tard. Reconcentrer tous les pouvoirs au niveau des décisions sur le plan national, dévaluer le rôle des académies, marginaliser les partenaires sociaux ne peut que créer une tension nuisible à une école déjà à bout de souffle.