Les Kenyans ne veulent pas uniquement parier sur leurs réputés milers mais vont aussi miser sur leurs sprinteurs, lanceurs et autres sauteurs pour gagner "leurs jeux". Par Khalid Abouchoukri Stephen Mwaniki, l'entraîneur en chef de la sélection, n'y va pas par quatre chemins. Rééditer l'exploit des championnats du monde de cross country Mombasa (2007, cinq titres sur les huit en jeu) est l'objectif assigné aux troupes. Pour la première dans les annales de ces championnats, les Kenyans s'alignent dans toutes les épreuves, tablant sur ce nombre pour pouvoir se faufiler sur le podium et "subtiliser" quelques breloques à ceux réputés maîtres des courtes distances, les Nigérians et Sud-africains, dit confiant Mwaniki, qui caresse l'espoir de les voir mettre fin à la longue traversée du désert. "Nous voulons donner un nouveau look et motiver plus d'athlètes à s'orienter vers les concours, épreuves traditionnellement non associées aux kenyans", estime le président de la fédération Isaiah Kiplagat. La sélection a exceptionnellement engagé 142 athlètes contre une moyenne de 30 à 40 lors des précédentes éditions. Le manque de moyens financiers y est pour beaucoup ainsi que les équipements. L'appareillage existant pour les concours est obsolète datant de 23 ans (1987), alors que le sport a subi des métamorphoses technologiques. Le nouvel attirail (Starting blocks, javelots, perche, cage pour le lancer du marteau etc...) utilisé lors de ces championnats (28 juillet- 1er août) est un investissement dans l'avenir et balisera la voie aux athlètes afin d'acquérir le savoir-faire technique pour ne plus se limiter au fond et demi-fond, ajoute-t-il. Les dernières consécrations des kenyans dans les courtes distances remontent à une éternité, avec le doublé victorieux de Joseph Gikonyo Victor aux 100m et 200m en 1990. Kennedy Ochieng s'était aussi, trois ans plus tard, illustré sur le tour de piste après les lauriers de Samson Kitur en 1990. L'objectif minimum est de surpasser la récolte d'Addis-Abeba en 2008 (5 or, 5 argent, et 6 bronze), concède Mwaniki. Cela pourrait être atteint grâce à la qualité des athlètes qui ne voudront pas décevoir mais attention à la pression du public, une arme à double tranchant. Les sprinteurs, lanceurs et sauteurs ont aussi des chances "quoique minimes" à faire valoir devant les leurs. Mais, les pronostics ne semblent pas leur ouvrir trop les chemins de gloire. "C'est une compétition pour s'émuler, de gagner en galons avant d'atteindre les standards internationaux", estime Elizabeth Olaba, en charge des préparations des lanceurs qui regrette le manque de techniciens pour les concours, le staff technique étant formé pour la plupart de spécialistes de demi-fond et de longue distance. Le javelot n'est pas commun au Kenya mais le groupe des engagés est à même d'atteindre un nouveau palier. Julius Yego, dont la performance personnelle est de 74 mètres, et Sammy Keskeny (bronze à Addis Abeba) qui affiche 73 mètres comme sa meilleure marque individuelle, sont de probables médaillés alors que le troisième représentant est assez loin avec un modeste 64 mètres. Dennis Sakawa avec ses 54 mètres au marteau pourrait aussi figurer dans le panier des vainqueurs, tout comme sa compatriote Linda Oseso, basée aux USA, qui a amélioré de près de 8 mètres le record du Kenya du marteau (48,19m), affirme-t-elle. Toutefois, la traditionnelle moisson kenyane, comme cela s'est produit chez les juniors à Moncton (Canada), devra être confirmée par leurs réputés milers en dépit de la rude concurrence des voisins éthiopiens dans "le choc des titans" aux 5.000m et 10.000 m, alors que le 3.000m steeple, chasse gardée des kenyans, semble encore leur être destiné après le fait d'arme de 2008 et le parfait podium. Le double tour masculin est l'une des épreuves les plus attendues et probablement la plus ouverte avec le médaillé d'argent des mondiaux de Berlin Alfred Kirwa qui brûle d'envie de prendre sa revanche sur le sud-africain Mbulaeni Mulaudzi. Mais, la quête de l'or ne se jouera pas entre les deux, d'autres prétendants vont mettre plus de sel dans la course à la plus marche du podium à l'instar de son compatriote David Rudisha, le tenant du titre qui a établi le 10 juillet à Heusden la 3ème meilleure performance de tous les temps (1:41.51), ou du marocain Amine Laalou, reconnaît Kirwa. Au 1.500m, Asbel Kiprop, considéré comme "l'héritier", une décennie après, de Noah Ngeny (or olympique à Sydney), veut faire taire les doutes sur son aptitude à régner. "Promu" vainqueur à Pékin après la disqualification de Rachid Ramzi pour dopage, il échoue au pied du podium aux mondiaux de Berlin. Chez les dames, l'épreuve sera aussi ouverte aux candidates. La tâche de Nancy Jebet Lagat ne sera pas aisée contre l'éthiopienne Gelete Burka et la Marocaine Ibtissam Lakhouad, avoue-t-elle. D'ailleurs, ces deux athlètes sont les seules à l'avoir battue cette année, dans ce même ordre à la réunion de la Golden League à Lausanne, en Suisse.