Experts et associations médicales hautement spécialisées appellent désormais les autorités à franchir une étape décisive : institutionnaliser l'éducation diabétique. La gestion du diabète a changé de visage. Fini le temps où l'on se limitait à prescrire insuline et comprimés. Aujourd'hui, l'éducation thérapeutique s'impose comme un quatrième pilier du traitement, aux côtés de l'alimentation, de l'activité physique et des médicaments. « L'éducation diabétique transforme le malade en véritable acteur de sa santé », affirme le Dr Fouad Rkiouak, président du congrès maghrébin d'endocrinologie.
Du patient passif au patient acteur Apprendre à surveiller sa glycémie, interpréter les résultats, ajuster son alimentation et ses doses d'insuline : voilà les compétences que tout patient diabétique devrait acquérir. Cette démarche lui permet de prévenir les hypoglycémies, de détecter les hyperglycémies à temps et d'éviter les complications graves comme le pied diabétique. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : dans les pays où l'éducation diabétique est bien implantée, les hospitalisations chutent de près d'un tiers, les complications chroniques se raréfient et les dépenses de santé sont allégées.
L'intelligence artificielle comme catalyseur À l'ère du numérique, l'intelligence artificielle (IA) démultiplie l'impact de cette éducation. Les algorithmes analysent les courbes glycémiques et anticipent les risques avant même que les symptômes n'apparaissent. Les applications connectées envoient des alertes en temps réel et offrent un coaching personnalisé, y compris aux patients vivant en zones rurales. Au-delà de l'aspect médical, ces outils redonnent confiance et motivation : la ludification des programmes séduit les jeunes, favorisant leur adhésion au traitement et réduisant l'errance thérapeutique.
Des résultats probants et un modèle pour le Maghreb Lors du congrès de Marrakech, le Pr Mariem Benkacem dévoilera les résultats d'un projet pilote combinant IA et accompagnement personnalisé. Résultat : amélioration de l'HbA1c, baisse des hypoglycémies graves et satisfaction élevée des patients. Un modèle duplicable à l'échelle nationale et régionale.
Un appel à l'action législative Pourtant, un obstacle majeur persiste : la consultation d'éducation diabétique n'est pas toujours reconnue ni remboursée. Experts et sociétés savantes appellent désormais les autorités à franchir une étape décisive : institutionnaliser l'éducation diabétique. Un décret ou une loi pourrait en faire un acte thérapeutique officiel, coté et pris en charge par les caisses d'assurance maladie (CNOPS, CNSS, mutuelles, assurances privées). Cette reconnaissance donnerait aux patients un accès équitable à cette prise en charge et garantirait un financement durable pour les centres et les professionnels qui la pratiquent.
Un investissement pour l'avenir Moins d'hospitalisations, moins de complications, moins de dépenses : chaque dirham investi dans l'éducation thérapeutique en économise plusieurs en soins lourds et en perte de productivité. Soutenue par l'intelligence artificielle, l'éducation diabétique devient une arme stratégique de santé publique et une opportunité pour bâtir un système de soins plus humain, plus préventif et plus efficient.